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07/07/2010 | FRANCE | N°09LY02972

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 07 juillet 2010, 09LY02972


Vu le recours, enregistré à la Cour le 22 décembre 2009, présenté par le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905548, en date du 24 novembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 13 août 2009 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A ainsi que sa décision du même jour obligeant l'intéressé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et celle, portant la même date, désignant la pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiratio

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Vu le recours, enregistré à la Cour le 22 décembre 2009, présenté par le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905548, en date du 24 novembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 13 août 2009 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A ainsi que sa décision du même jour obligeant l'intéressé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et celle, portant la même date, désignant la pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) de mettre à la charge de M. A la somme de 1 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que son recours est recevable ; que le jugement contesté doit être annulé en en ce qu'il est insuffisamment motivé au regard des élément caractérisant la vie privée et familiale de M. A ; que les premiers juges ont commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la vie privée et familiale de M. A ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 15 avril 2010, présenté par M. Youssouf A ;

M. A demande à la Cour ;

1°) de rejeter le recours présenté par le PREFET DU RHONE ;

2°) d'enjoindre au PREFET DU RHONE, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que le jugement contesté n'est pas entaché d'un défaut de motivation ; que les premiers juges n'ont pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa vie privée et familiale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Prudhon, avocat de M. A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Prudhon ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que le PREFET DU RHONE a refusé de délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale à M. A, de nationalité comorienne et entré en France à la date déclarée du 17 février 2004, du fait de l'absence de vie privée et familiale suffisamment établie sur le territoire national et que l'intéressé ne démontrait pas contribuer effectivement aux besoins de ses enfants ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est le père de quatre enfants âgés respectivement de 17, 4, 3 et de moins d'un an, issus de trois relations différentes ; qu'il fait valoir qu'il vit avec Mme Annette B, mère de deux de ses enfants et titulaire d'un titre de séjour valable dix ans en qualité de parent d'un enfant français ; qu'il soutient encore contribuer à l'éducation et aux besoins du foyer notamment en raison des faibles revenus de sa compagne ; que, toutefois, il ressort des éléments versés au débat que M. A, dont l'entrée sur le territoire national est très récente, n'établit ni l'ancienneté ni la stabilité de la relation qu'il entretiendrait avec son actuelle compagne alors que leur vie commune n'est pas attestée avant le 20 décembre 2007 ; que s'il fait valoir qu'il contribue à l'éducation de chacun de ses quatre enfants, cette circonstance ne saurait être vérifiée par l'unique attestation en ce sens versée par une de ses précédentes compagnes ; que s'il soutient encore être impliqué dans le déroulement de la scolarité de ses enfants, les attestations qu'il produit à cet effet sont toutes postérieures à la décision en litige ; qu'enfin, il ressort des termes mêmes des écritures du requérant que celui-ci ne conteste pas avoir fait l'objet de poursuites judiciaires pour faux et usage de faux papiers à l'origine de son interpellation par les forces de police le 20 février 2006 ; qu'il est encore constant qu'il s'est volontairement soustrait à un précédent arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière en date du 21 août 2006 ; qu'ainsi, il ne saurait se prévaloir de la qualité de son intégration au sein de la société française ; que, compte tenu de ce qui précède, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le PREFET DU RHONE est dès lors fondé à soutenir que sa décision portant refus de délivrance de titre de séjour opposée à M. A n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que si la décision contestée opère une confusion à propos de l'identification des enfants du requérant, cette circonstance, qui procède d'une simple erreur matérielle, est sans influence sur la légalité de celle-ci ; que, par ailleurs, la décision contestée est suffisamment motivée en fait par l'examen de la situation privée et familiale de M. A et en droit en ce qu'elle vise les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus lors de l'examen de la situation de M. A au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la décision contestée n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que, comme il l'a déjà été dit, il n'est pas établi que M. A contribue effectivement à l'éducation et à l'entretien de ses enfants ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de ses enfants a été méconnu en application des dispositions précitées ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. A n'est pas davantage fondé au regard de ces mêmes circonstances à soutenir que le PREFET DU RHONE a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa vie privée et familiale ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour ;

Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs susmentionnés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, le PREFET DU RHONE n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la vie privée et familiale du requérant ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus, le PREFET DU RHONE n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la vie privée et familiale du requérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté du 24 novembre 2009, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 13 août 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision qui accueille le recours présenté par le PREFET DU RHONE n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. A aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions du PREFET DU RHONE tendant à la condamnation de M. A à lui verser la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0905548, en date du 24 novembre 2009, du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A devant les premiers juges comme en appel sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du PREFET DU RHONE est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à M. Youssouf A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Bézard, président de chambre,

Mme Chevalier-Aubert, Premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2010.

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N° 09LY02972


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02972
Date de la décision : 07/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-07;09ly02972 ?
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