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07/07/2010 | FRANCE | N°09LY02504

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 07 juillet 2010, 09LY02504


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 26 octobre 2009 et régularisée le 2 novembre 2009, présentée pour M. Farid A, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805609, en date du 12 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 30 juin 2008, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de

pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre pr...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 26 octobre 2009 et régularisée le 2 novembre 2009, présentée pour M. Farid A, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805609, en date du 12 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 30 juin 2008, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer le certificat de résidence algérien de dix ans prévu au b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ci-après visé ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention vie privée et familiale ou, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui délivrer, en toute hypothèse, une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

Il soutient que la décision de refus de délivrance de titre de séjour, qui indique que son père ne dispose pas de ressources suffisantes sans apporter aucune précision chiffrée, n'est pas motivée ; que cette décision, qui ne fait pas état de la retraite complémentaire et de la retraite d'ancien combattant perçues par son père, est entachée d'une erreur de fait ; que son père perçoit des revenus mensuels supérieurs au salaire minimum interprofessionnel de croissance et que la décision de refus de titre de séjour méconnaît les stipulations du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ; qu'il n'est pas autonome et que ses proches vivent, pour la plupart, régulièrement en France ; que la décision de refus de titre de séjour méconnaît donc les stipulations du 5° de l'article 6 de ce même accord ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'enfin, son éloignement vers un pays où il se retrouverait isolé, alors qu'il n'est pas autonome, s'apparente à un traitement contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 juin 2010, présenté par le préfet de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que son arrêté contesté est régulièrement motivé ; qu'il n'a commis aucune erreur d'appréciation en estimant que les revenus du père du requérant son insuffisants pour assumer la charge d'une personne supplémentaire au sein de son foyer, déjà composé de trois personnes ; qu'il ressort des propres déclarations sur l'honneur du requérant qu'à la date du 6 mars 2008, certains de ses frères et soeurs vivaient en Algérie et qu'il n'est pas établi qu'ils auraient, depuis, émigré en Espagne ; qu'il n'a donc pas commis d'erreur de fait sur ce point ; qu'eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France du requérant, sa décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus, contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Aboudahab, avocat de M. A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Aboudahab ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ;

Considérant qu'il ressort des mentions de l'arrêté contesté que, par décision du 30 juin 2008, le préfet de l'Isère a refusé à M. A la délivrance du certificat de résidence algérien qu'il avait sollicité sur le fondement du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien au motif que : s'il apparaît effectivement à la charge de ses parents, la pension de retraite versée à son père tous les mois est insuffisante pour subvenir aux besoins de cette famille ; qu'en effet, cette pension de retraite est le seul revenu de la famille ; qu'elle doit servir aux besoins des trois personnes qui composent ce foyer ; (...) que les ressources nécessaires à l'ascendant pour prendre réellement en charge l'intéressé sont dans les faits insuffisantes ; que ce dernier ne peut pas obtenir un certificat de résidence algérien sur le fondement de l'article 7 bis b) de l'accord franco-algérien ; (...) ; que cette décision de refus comporte ainsi, nonobstant l'absence de précision chiffrée, des éléments de droit et de fait suffisants ; qu'elle est, par suite, régulièrement motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que cette décision de refus de délivrance de titre de séjour évoque, de façon générale, la pension de retraite de son père ; que la circonstance que ce dernier perçoive, outre une pension de retraite de base versée par la caisse régionale d'assurance maladie, une pension de retraite complémentaire ainsi qu'une pension de retraite d'ancien combattant, ne permet pas d'établir que le préfet de l'Isère n'a pas pris en compte ces deux dernières pensions de retraite, au demeurant toutes deux d'un très faible montant, et, ce faisant, entaché sa décision d'une erreur de fait ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien susvisé : Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au d) : (...) b) A l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à sa charge ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant algérien né le 5 février 1977, est entré régulièrement sur le territoire français le 26 février 2008 ; qu'il a rejoint en France son père, de nationalité française, ainsi que sa mère, titulaire d'un certificat de résidence algérien d'une durée de validité de dix ans ; qu'il a sollicité, dès le 6 mars 2008, un certificat algérien en qualité d'enfant à charge d'un ressortissant français, dont la délivrance lui a été refusée par le préfet de l'Isère, par décision du 30 juin 2008, au seul motif de l'insuffisance des ressources de son père pour le prendre en charge ; qu'il ressort des pièces du dossier que le père de M. A perçoit mensuellement une pension de retraite de base versée par la caisse régionale d'assurance maladie d'un montant de 1002,79 euros, une pension de retraite complémentaire de 26 euros environ et une pension de retraite d'ancien combattant de 43,72 euros, soit un montant total mensuel d'environ 1 072 euros, pour un foyer dont il n'est pas contesté qu'il est déjà composé de trois personnes ; que, dès lors, le préfet de l'Isère a pu estimer, sans commettre d'erreur manifeste, que de tels revenus étaient insuffisants pour assurer les besoins d'une personne supplémentaire ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Isère a méconnu les stipulations précitées du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien susvisé en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est arrivé sur le territoire français à l'âge de trente et un ans, quatre mois seulement avant la décision contestée, alors qu'il avait vécu éloigné de ses parents qui sont installés depuis de longues années en France et dont il n'est pas allégué qu'ils le prenaient en charge financièrement avant son arrivée sur le territoire français ; que s'il n'est pas autonome dans tous les actes de la vie courante, il ne conteste pas qu'il occupait un emploi en Algérie et sa soeur Zohra, auprès de laquelle il vivait lorsqu'il résidait dans ce pays et qui est également entrée en France au mois de mars 2008, ne disposait pas d'un droit non précaire au séjour sur le territoire français à la date de la décision contestée, dès lors qu'il est produit la concernant un simple récépissé de dépôt de demande de délivrance d'un premier titre de séjour délivré le 20 janvier 2009, soit, au demeurant, postérieurement à la décision contestée ; qu'enfin, M. A a attesté sur l'honneur, le 6 mars 2008 qu'une partie de sa fratrie réside en Algérie ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce, la décision du 30 juin 2008 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A n'a pas porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, dès lors, méconnu ni les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. A ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de délivrance de titre de séjour, la décision du 30 juin 2008 faisant obligation à M. A de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision portant désignation du pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. A soutient que son éloignement à destination d'un pays où il se retrouverait isolé alors qu'il n'est pas en mesure de vivre de façon autonome est assimilable à un traitement contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit, M. A n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie, où il a toujours résidé jusqu'à son entrée récente sur le territoire français, survenue quatre mois seulement avant la décision contestée ; que, par suite, le moyen tiré de la violation, par la décision fixant le pays de renvoi, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Farid A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Bézard, président de chambre,

Mme Chevalier-Aubert, Premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2010.

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N° 09LY02504


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02504
Date de la décision : 07/07/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : ABOUDAHAB

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-07;09ly02504 ?
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