La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/06/2010 | FRANCE | N°09LY02971

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 24 juin 2010, 09LY02971


Vu, enregistrée au greffe le 22 décembre 2009, la requête présentée par le PREFET DE L'ARDECHE ;

Le PREFET DE L'ARDECHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906843 en date du 18 novembre 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 13 novembre 2009, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. Celal A, et la décision du même jour fixant le pays de renvoi ;

2°) de rejeter la demande de M. A tendant à l'annulation de ces décisions ;

Il soutient que l'arrê

té de reconduite à la frontière ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A au...

Vu, enregistrée au greffe le 22 décembre 2009, la requête présentée par le PREFET DE L'ARDECHE ;

Le PREFET DE L'ARDECHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906843 en date du 18 novembre 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 13 novembre 2009, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. Celal A, et la décision du même jour fixant le pays de renvoi ;

2°) de rejeter la demande de M. A tendant à l'annulation de ces décisions ;

Il soutient que l'arrêté de reconduite à la frontière ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale dès lors que l'intéressé, dont l'épouse et les enfants résident en Turquie, se maintient irrégulièrement en France, n'établit pas l'ancienneté de sa relation avec une ressortissante française et ne justifie pas d'une insertion particulière en France ; que la décision fixant le pays de destination est légale ; que la décision ordonnant le placement de M. A en rétention administrative est justifiée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 7 avril 2010, le mémoire en défense présenté pour M. A, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le PREFET DE L'ARDECHE a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en édictant à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière, entaché, au surplus, d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2010 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant turc, né le 15 mars 1968 en Turquie, est entré en France en septembre 2003 ; qu'il a présenté une demande d'asile territorial qui a été rejetée le 17 mai 2004 ; que le 6 janvier 2006 le préfet des Bouches du Rhône a pris à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière ; qu'il a alors déposé une demande d'asile conventionnel qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 20 janvier suivant ; qu'il vit maritalement avec une Française, depuis 2007 selon ses dires ; qu'il dispose d'une promesse d'embauche datée du 2 novembre 2009 ; qu'il est par ailleurs marié en Turquie et de ce mariage il a eu trois enfants, avec lesquels il a des contacts téléphoniques ; que, s'il soutient avoir entamé une procédure de divorce, il n'a versé au dossier aucune pièce de nature à justifier cette allégation ; que, dans ces conditions, alors qu'il a vécu en Turquie jusqu'à l'âge de trente-cinq ans et que sa vie maritale en France est récente et eu égard aux conditions de son entrée et de son séjour en France, l'arrêté de reconduite à la frontière du 13 novembre 2009 n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. A par le PREFET DE L'ARDECHE ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A, tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A ne peut justifier d'une entrée régulière en France et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'ainsi, il entre dans le cas prévu par les dispositions précitées où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière a été signé par Mme Hélène Géronimi, qui avait régulièrement reçu délégation de signature à cet effet par arrêté du 21 septembre 2009, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté de reconduite à la frontière en litige doit être écarté ;

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière comporte, outre des considérations de droit, l'énoncé de considérations de fait qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, il répond aux exigences de motivation énoncées par la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

Considérant que, compte tenu de la situation en France de M. A, décrite plus haut, le PREFET DE L'ARDECHE n'a pas apprécié de manière manifestement erronée les conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de celui-ci ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ARDECHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 13 novembre 2009, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. A, et, par voie de conséquence, la décision du même jour fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de M. A, au titre des frais exposés par lui dans l'instance ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0906843 du 18 novembre 2009 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Celal A, au préfet de l'Ardèche et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Lu en audience publique, le 24 juin 2010.

''

''

''

''

1

2

N° 09L02971


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09LY02971
Date de la décision : 24/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : VIBOUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-24;09ly02971 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award