La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/06/2010 | FRANCE | N°09LY02042

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 10 juin 2010, 09LY02042


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 août 2009, présentée pour M. Youssouf A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702157 en date du 4 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 octobre 2007, par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjo

ur ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation après lui avoir délivré un récépissé l'aut...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 août 2009, présentée pour M. Youssouf A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702157 en date du 4 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 octobre 2007, par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation après lui avoir délivré un récépissé l'autorisant à travailler, dans un délai de huit jours à compter du prononcé de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser une somme de 2 700 euros à Me Isabelle Faure Cromarias, son conseil, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

M. A soutient que la décision en litige n'est pas suffisamment motivée ; que le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant tenu de refuser le titre de séjour sollicité au motif qu'il était entré en France sans visa ; que la décision en litige porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 25 novembre 2009, le mémoire en défense présenté par le préfet du Puy-de-Dôme, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que sa décision, qui comporte l'exposé des faits et les considérations de droit sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ; que l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impose à tout étranger d'être muni des documents exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; que selon l'article L. 311-7 du même code, la délivrance d'un titre de séjour est subordonnée à la production d'un visa de plus de trois mois ; que le requérant ne répondait pas à ces conditions ; qu'il aurait dû entreprendre une procédure de regroupement familial ; que, le requérant ayant encore de la famille au Maroc et ne justifiant pas de liens privés et familiaux d'une grande intensité en France, la décision en litige ne méconnaît ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et, pour les mêmes motifs, n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu, enregistré le 22 février 2010, le nouveau mémoire présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 26 mars 2010, le nouveau mémoire présenté par le préfet du Puy-de-Dôme, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; il soutient en outre que, le requérant n'entrant dans aucune des situations prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la délivrance d'un titre de séjour, il n'a pu viser que l'article L. 211-1 de ce code ; que notamment le requérant n'entrait pas dans le champ d'application du 7° de l'article L. 313-11 de ce code, dans la mesure où le refus de titre de séjour ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et en outre parce qu'il entrait dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial ;

Vu, enregistré le 13 avril 2010, le nouveau mémoire présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre par le moyen que l'arrêté de reconduite à la frontière du 2 février 2010 a été annulé par jugement du 5 février 2010 ;

Vu, enregistré le 11 mai 2010, le nouveau mémoire présenté par le préfet du Puy-de-Dôme, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre par les moyens que les faits doivent être appréciés à la date de la décision en litige et non à l'aune d'un jugement intervenu en mars 2010 ; que, pour autant, il a délivré une autorisation provisoire de séjour au requérant de façon qu'il puisse terminer son année scolaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2010 :

- le rapport de M. du Besset, président de chambre,

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant marocain, né le 23 décembre 1988, est entré en France en 2003 pour y rejoindre son oncle et sa tante, auxquels ses parents l'avaient confié par kafala ; que, par jugement du 14 février 2007, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand a délégué à ces oncle et tante l'exercice de l'autorité parentale ; que le 19 juillet 2007 M. A a demandé au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour en invoquant ses liens familiaux en France ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 octobre 2007, par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme lui a refusé le titre demandé ;

Sur la légalité de la décision du 10 octobre 2007 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : .../... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ;

Considérant que, compte tenu de sa situation familiale, M. A, qui n'a pas été adopté par son oncle et sa tante, n'entre pas dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial ; qu'ainsi il pouvait demander le bénéfice des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comme il l'a fait en invoquant ses liens familiaux en France ;

Considérant que la décision en litige a été prise aux motifs que M. A était entré en France sans visa et que le refus de titre de séjour ne porterait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, d'une part, alors que les dispositions précitées ne subordonnent pas la délivrance du titre de séjour qu'elles prévoient à une entrée régulière sur le territoire français, le premier motif est entaché d'erreur de droit ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction que le préfet n'aurait pas pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le second motif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

Considérant que le présent arrêt, compte tenu de ses motifs, n'impose pas que le préfet du Puy-de-Dôme délivre un titre de séjour à M. A mais seulement qu'il réexamine sa situation ; qu'il lui sera imparti à cette fin un délai d'un mois ; qu'il n'y a pas lieu en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Isabelle Faure Cromarias, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Faure Cromarias d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0702157 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 4 décembre 2008 et la décision du préfet du Puy-de-Dôme en date du 10 octobre 2007 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer la situation de M. A dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros à Me Faure Cromarias sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Youssouf A, au préfet du Puy-de-Dôme et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée à Me Faure Cromarias.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2010, où siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

M. Arbarétaz, premier conseiller,

Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juin 2010.

''

''

''

''

2

N° 09LY02042

nv


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02042
Date de la décision : 10/06/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : FAURE CROMARIAS ISABELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-10;09ly02042 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award