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10/06/2010 | FRANCE | N°09LY01781

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 10 juin 2010, 09LY01781


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2009, présentée pour Mme Kheira A, domiciliée auprès de ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900661 du 5 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 janvier 2009, par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) à titre princi

pal, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la ment...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2009, présentée pour Mme Kheira A, domiciliée auprès de ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900661 du 5 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 janvier 2009, par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, et, subsidiairement, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans les quinze jours et de lui délivrer durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le préfet s'étant, à tort, cru lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique, il a méconnu l'étendue de sa compétence et a commis une erreur de droit ;

- que les certificats médicaux qu'elle produit établissent qu'elle ne peut bénéficier des soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine ; que le préfet a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que sa situation justifiait de l'admettre au séjour à titre exceptionnel ; que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui délivrant pas un titre de séjour ;

- que, pour les mêmes motifs que ceux soulevés à l'encontre du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, la décision d'obligation de quitter le territoire français est illégale ; que cette décision méconnaît également l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que son renvoi vers l'Algérie serait de nature à aggraver sa pathologie ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2010, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la requérante n'établit pas qu'elle ne pourrait bénéficier, dans son pays d'origine, des soins que requiert son état de santé ; qu'à cet égard, elle ne peut utilement soutenir qu'elle ne dispose pas des ressources suffisantes pour y avoir accès ; que son retour en Algérie ne saurait aggraver son état de santé ; qu'elle ne démontre, en outre, pas avoir été suivie pour sa pathologie depuis une longue période par un médecin spécialiste ;

- qu'ayant envisagé la possibilité de régularisation à titre dérogatoire, il n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence ;

- que, s'agissant de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, les moyens soulevés à son encontre, identiques à ceux soulevés à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a passé la plus grande partie de sa vie ;

- qu'elle ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa situation étant entièrement régie par l'accord franco-algérien ; qu'en tout état de cause, les violences conjugales qu'elle soutient avoir subies ne sont pas établies et elle ne remplit pas la condition de détention d'un visa de long séjour requis par la disposition susmentionnée du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être invoqué au titre de l'état de santé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu l'arrêté ministériel du 8 juillet 1999 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2010 :

- le rapport de Mme Vinet, conseiller,

- les observations de Me Méziane, avocat de Mme A,

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public,

- la parole ayant été de nouveau donnée à Me Méziane ;

Considérant qu'aux termes qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : (...) le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de la santé publique (...) émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; (...) / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. (...) ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale en Algérie ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe en Algérie des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause ; que si de telles possibilités existent mais que le ressortissant algérien fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie ;

Considérant qu'il est constant que l'état de santé de Mme A nécessite des soins dont le défaut aurait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que si le préfet du Rhône soutient, en se référant à l'avis du médecin inspecteur de la santé publique, qu'un traitement équivalent à celui qui a été dispensé en France à Mme A est disponible et accessible en Algérie, cette affirmation ne repose sur aucun élément vérifiable ; que, par ailleurs, rien ne permet d'affirmer que Mme A pourrait, le cas échéant, bénéficier effectivement des soins adaptés à son état de santé, eu égard au niveau de ses ressources dont elle peut utilement invoquer l'insuffisance ; qu'il y a lieu, en conséquence, de prescrire avant dire droit un supplément d'instruction afin que le préfet du Rhône produise les éléments relatifs, d'une part, à la disponibilité en Algérie des médicaments prescrits à la requérante par son médecin traitant (ou de médicaments ayant des effets identiques) et, d'autre part, à la possibilité pour Mme A de bénéficier, le cas échéant, d'un accès effectif à ces médicaments, compte tenu de ses ressources ;

DECIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête, procédé à un supplément d'instruction afin que le préfet du Rhône précise, dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt, d'une part, si et dans quelles conditions la population algérienne peut bénéficier des médicaments prescrits en France à Mme A ou de molécules ayant les mêmes effets, d'autre part, si, compte tenu du niveau de ressources de Mme A et du système de santé algérien, celle-ci peut, le cas échéant, avoir un accès effectif aux médicaments requis par son état de santé.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Kheira A, au préfet du Rhône et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2010 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président,

M. Arbarétaz, premier conseiller,

Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juin 2010.

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N° 09LY01781


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01781
Date de la décision : 10/06/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : MEZIANE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-10;09ly01781 ?
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