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08/06/2010 | FRANCE | N°08LY01030

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 08 juin 2010, 08LY01030


Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2008, présentée pour M. Christian B, domicilié ... ;

M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605895 en date du 4 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, à la demande de Mlle C, annulé le permis de construire qui lui a été délivré le 26 juillet 2006 par le préfet de l'Ain ;

2°) de rejeter la demande de Mlle C devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mlle C le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice admini

strative ;

M. B soutient que Mlle C ne justifie pas un intérêt à agir ; que sa ferme est...

Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2008, présentée pour M. Christian B, domicilié ... ;

M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605895 en date du 4 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, à la demande de Mlle C, annulé le permis de construire qui lui a été délivré le 26 juillet 2006 par le préfet de l'Ain ;

2°) de rejeter la demande de Mlle C devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mlle C le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. B soutient que Mlle C ne justifie pas un intérêt à agir ; que sa ferme est à 400 m du projet ; que par sa nature et son importance, le projet n'entraîne aucune gêne pour C; qu'elle a en réalité un intérêt commercial sous-jacent ; que la demande devant le tribunal administratif est abusive ; que la direction des affaires sanitaires et sociales (DASS) après avoir émis un avis défavorable le 1er mars 2006 a modifié sa position le 25 juillet 2006 ; que par délibération du 21 août 2006 le conseil municipal a refusé l'intervention d'un hydrogéologue ; que le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle accordant à Mlle C le bénéfice de l'aide totale ;

Vu les mémoires, enregistrés le 9 septembre et le 23 décembre 2008, présentés pour Mlle C qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que compte tenu du risque de pollution de la source alimentant le hameau d'Egieu, elle a intérêt à agir ; que le projet porte atteinte à la sécurité publique ; qu'en délivrant le permis litigieux, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 juin 2009, présenté par le ministre de l'écologie qui conclut à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande de Mlle C devant le tribunal administratif ;

Le ministre soutient que Mlle C ne justifie d'aucun intérêt à agir ; qu'il ne peut reposer sur le risque d'atteinte à la qualité de l'eau, un bâtiment de stockage de fourrage ne présentant aucun inconvénient à ce titre ; que le stockage de fourrage et de matériel agricole n'est pas susceptible d'altérer la qualité des eaux ; qu'une étude hydrogéologique ne présentait aucune utilité ; que la circonstance que postérieurement à la délivrance du permis de construire, le pétitionnaire a modifié la destination du bâtiment est sans incidence sur sa légalité ;

Vu le mémoire en intervention, enregistré le 21 août 2009, présenté pour Mme Anne-Marie D qui conclut au rejet de la requête de M. B ;

Elle indique qu'elle vient aux droits du propriétaire du terrain à la date du permis de construire ; que M. B a déposé la demande du permis de construire sans justifier de l'accord des propriétaires ; que la parcelle leur a été vendue comme libre de location ou occupation ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction au 30 octobre 2009 ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 mai 2010, présenté pour Mme D ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2010, présenté par M. B ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2010 :

- le rapport de M. Fontbonne, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Sur l'intervention de Mme D :

Considérant que Mme D justifie être propriétaire de la parcelle A324 sur laquelle le projet de M. B prévoit l'établissement d'une partie de la voie d'accès au bâtiment autorisé par le permis litigieux ; qu'elle a par suite intérêt à intervenir à l'instance en défense à l'appui des conclusions de C; que son intervention doit être admise ;

Sur la recevabilité de la demande de C devant le tribunal administratif :

Considérant que le projet litigieux consiste dans la construction d'un bâtiment de 780 m² de SHOB pour une hauteur de 9 m 86 au faîtage aux abords du hameau d'Egieu le long de la route départementale qui dessert ce hameau qui compte seulement 15 habitants ;

Considérant que C habite ledit hameau où elle est propriétaire d'un ensemble de parcelles agricoles d'une superficie totale de 18 hectares ; que, par suite, s'agissant d'un projet aux dimensions relativement importantes eu égard notamment à la taille du hameau et, en outre, susceptible de perturber l'alimentation en eau potable dudit hameau, C justifie, en sa qualité d'habitante et de propriétaire de terrains non bâtis, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, alors même qu'elle n'aurait pas depuis son domicile de vue directe sur le projet ;

Sur la légalité du permis de construire litigieux :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M. B a présenté à la commune de Rossillon et à la Communauté de communes un projet d'installation, prévoyant entre autres activités, l'élevage de vaches allaitantes et une pension pour chevaux en indiquant que son projet impliquait la construction d'un bâtiment pour les abriter ; que le 1er mars 2006 la direction départementale des affaires sanitaires et sociales a indiqué qu'un projet d'implantation d'un bâtiment d'élevage ne pourrait recevoir un avis favorable, en raison d'une relation souterraine directe du secteur du projet, avec un captage d'eau potable ; que M. B a déposé le 30 juin 2006 une demande de permis de construire pour un bâtiment destiné à entreposer du matériel agricole et du fourrage ; que le préfet de l'Ain a délivré, le 26 juillet 2006, le permis litigieux assorti d'une prescription ainsi libellée : NB Important : La présente autorisation concerne un bâtiment de stockage de fourrage et de matériel. Tout changement d'affectation de ce bâtiment (hébergement de bétail par exemple) devra faire l'objet d'une nouvelle demande de permis de construire. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le bâtiment agricole faisant l'objet du permis de construire délivré le 26 juillet 2006 par le préfet de l'Ain, se situe dans la zone de protection éloignée des sources d'Egieu et de Nivollet, faisant l'objet d'une réglementation particulière par arrêté n° 97/009 du préfet de l'Ain en date du 10 janvier 1997 ; qu'aux termes dudit arrêté, le rejet dans le sol d'huiles, lubrifiants et détergents est interdit, le stockage d'hydrocarbures, s'il ne peut être évité, est soumis à des aménagements de sécurité renforcés et tout aménagement risquant de porter atteinte à la qualité des eaux superficielles ou souterraines doit être précédé d'une étude hydrogéologique précise et détaillée ; qu'en outre, le traçage réalisé dans le cadre du zonage d'assainissement de la commune de Rossillon, met en évidence une relation souterraine directe du secteur d'implantation du projet avec la source du Nivollet qui alimente en permanence le hameau de Nivollet et celui d'Egieu en période d'étiage de sa source ;

Considérant, d'une part, que la délivrance du permis litigieux n'a été précédée d'aucune étude hydrogéologique qui aurait permis, conformément aux recommandations de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, d'évaluer précisément les risques d'atteinte à la ressource en eau liée à la réalisation de la construction, notamment lors de l'exécution des terrassements et fondations ; que, malgré la sensibilité connue du secteur, le permis litigieux n'est assorti d'aucune prescription de nature à conjurer ce risque ; que, d'autre part, alors que le stockage de matériel agricole s'accompagne de l'entreposage d'huiles, lubrifiants, carburants ainsi que d'engrais et de produits phytosanitaires, le permis litigieux n'est assorti d'aucune prescription tendant, conformément également aux recommandations de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, à la réalisation d'aires étanches évitant des écoulements accidentels dans le sol ; que, c'est par suite, à bon droit, que le tribunal administratif a estimé que le préfet de l'Ain avait commis une erreur manifeste d'appréciation en délivrant le permis de construire attaqué ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a annulé le permis de construire qui lui a été délivré le 26 juillet 2006 par le préfet de l'Ain ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant que les conclusions de M. B tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'il est partie perdante ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement des mêmes dispositions par Mlle C qui bénéficie de l'aide juridictionnelle totale ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de Mme D est admise.

Article 2 : La requête de M. B est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de Mlle C tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian B, à Mlle Caroline C, à Mme Anne-Marie Chantal D et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2010 à laquelle siégeaient :

M.Bézard, président,

M.Fontbonne, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 juin 2010.

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N° 08LY01030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01030
Date de la décision : 08/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Gérard FONTBONNE
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SEIGLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-08;08ly01030 ?
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