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04/06/2010 | FRANCE | N°08LY02893

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 04 juin 2010, 08LY02893


Vu le recours, enregistré le 24 décembre 2008, présenté pour le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE ;

Le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701627 du 23 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté en date du 30 octobre 2006 du recteur de l'académie de Lyon suspendant M. Jean-Marie A de ses fonctions à compter du 6 novembre 2006 ainsi que la décision du 8 janvier 2007 rejetant son recours gracie

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Vu le recours, enregistré le 24 décembre 2008, présenté pour le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE ;

Le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701627 du 23 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté en date du 30 octobre 2006 du recteur de l'académie de Lyon suspendant M. Jean-Marie A de ses fonctions à compter du 6 novembre 2006 ainsi que la décision du 8 janvier 2007 rejetant son recours gracieux et l'a condamné à verser, la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Jean-Marie A devant le Tribunal ;

Le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE soutient que :

- le Tribunal a commis une erreur dans l'appréciation de la gravité des faits, dès lors que l'attitude de M. A a eu des conséquences sur le bon fonctionnement du service et notamment sur l'acquisition des connaissances par les élèves, que son comportement provocateur est de nature à porter atteinte aux devoirs de réserve et de neutralité et qu'il entretient de mauvaises relations avec la communauté éducative ;

- M. A ayant conservé sa rémunération, la demande indemnitaire n'est pas justifiée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2009, présenté pour M. Jean-Marie A qui conclut au rejet du recours et à ce soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que sa manière de servir et son comportement ont été mis en cause sur le fondement d'éléments de faits infondés ou déformés ne pouvant régulièrement être qualifiés de fautes graves au sens de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 ; il justifie de trente années d'expérience scolaire irréprochable ; son préjudice moral est justifié ;

Vu l'ordonnance en date du 15 février 2010 par laquelle la date de clôture d'instruction a été fixée au 12 mars 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2010 :

- le rapport de Mme Pelletier, premier conseiller ;

- les observations de Me Jourda, représentant M. A ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la partie présente ;

Considérant que, par un arrêté du 30 octobre 2006, le recteur de l'académie de Lyon a suspendu de ses fonctions, M. Jean-Marie A, professeur de philosophie au lycée Saint-Exupéry de Lyon, à compter du 6 novembre 2006, pour une durée maximale de quatre mois ; que, par décision du 8 janvier 2007, le recteur de l'académie de Lyon a rejeté le recours gracieux présenté par M. A à l'encontre de cette mesure de suspension et a rejeté la demande présentée par l'intéressé tendant à l'indemnisation du préjudice moral subi, pour un montant de 1 500 euros ; que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE se pourvoit en appel contre le jugement du 23 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions et condamné l'Etat à verser à M. A, la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions (...) ;

Considérant que la mesure provisoire de suspension prévue par ces dispositions législatives ne présente pas, par elle-même, un caractère disciplinaire ; qu'elle est uniquement destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation ; qu'elle peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment, des rapports établis d'une part, par l'inspectrice d'académie, inspectrice pédagogique régionale de philosophie, d'autre part, par l'inspecteur d'académie, inspecteur pédagogique régional, vie scolaire, à la suite de visites d'inspection effectuées les 18 et 20 octobre 2006, que M. A, professeur certifié de philosophie au lycée Saint-Exupéry de Lyon faisait preuve d'une ignorance profonde-et en partie revendiquée-de la réalité des élèves , que des parents ainsi que les délégués d'élèves se sont plaints de l'absence de respect du programme, des fréquentes digressions en cours , sur les collègues, le proviseur, les inspecteurs ainsi que sur sa vie personnelle ainsi que des propos choquants comportant notamment des orientations sexuelles, tenus par l'intéressé ; qu'il est également relevé que M. A opérait volontairement une différence de traitement entre les élèves selon le jugement qu'il leur portait ; qu'en raison de ces difficultés, les élèves se sont orientés vers des cours privés ou se sont mis à copier des cours d'autres professeurs ; qu'il ressort également des pièces du dossier que M. A n'hésitait pas à contester l'autorité du chef d'établissement y compris devant les élèves et qu'il agressait verbalement certains de ses collègues ; que si M. A fait valoir qu'il a fait l'objet de bonnes appréciations antérieurement aux visites d'inspection susmentionnées, il ressort toutefois des pièces du dossiers que M. A avait déjà fait l'objet de critiques similaires et que les difficultés tenant à son comportement et à sa manière d'enseigner se sont accrues dès la rentrée 2006-2007, à partir du moment où les missions de professeur principal en Terminale L ont cessé de lui être confiées ; que, dans ces conditions, les faits reprochés présentaient un caractère de vraisemblance et de gravité de nature à justifier légalement la mesure de suspension attaquée ; que, par suite, le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a estimé que les faits retenus à l'encontre de l'intéressé ne présentaient pas un caractère de gravité suffisant pour justifier la mesure de suspension prise à son encontre ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon et devant elle ;

Considérant que la circonstance que la mesure de suspension attaquée n'aurait été suivie de l'engagement d'aucune procédure disciplinaire ne permet pas à elle seule d'établir le détournement de procédure allégué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a d'une part, annulé l'arrêté en date du 30 octobre 2006 du recteur de l'académie de Lyon suspendant M. Jean-Marie A de ses fonctions à compter du 6 novembre 2006 ainsi que la décision du 8 janvier 2007 rejetant son recours gracieux et l'a condamné, d'autre part à verser à ce dernier, la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0701627 du 23 octobre 2008 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. Jean-Marie A devant le Tribunal administratif de Lyon et les conclusions de sa requête tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE et à M. Jean-Marie A.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2010, à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Seillet, premier conseiller,

Mme Pelletier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juin 2010.

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N° 08LY02893


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY02893
Date de la décision : 04/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: Mme Pascale PELLETIER
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : JOURDA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-04;08ly02893 ?
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