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02/06/2010 | FRANCE | N°09LY01655

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 02 juin 2010, 09LY01655


Vu la requête, enregistrée le 17 juillet 2009 à la Cour, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700077, en date du 12 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 22 août 2006 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à Mlle Hawa A, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée, dans un délai de deux mois, un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale et a mis à sa charge la somme de huit cents euros en application des disposition

s combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'artic...

Vu la requête, enregistrée le 17 juillet 2009 à la Cour, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700077, en date du 12 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 22 août 2006 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à Mlle Hawa A, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée, dans un délai de deux mois, un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale et a mis à sa charge la somme de huit cents euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de Mlle A la somme de mille euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que Mlle A vit en état de polygamie et ne peut donc prétendre à l'obtention d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'atteinte à la vie familiale de Mlle A n'est pas disproportionnée par rapport à la nécessité de faire respecter la monogamie en France ; qu'il était tenu de refuser la demande de titre ; en outre, que sa décision de refus de séjour n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que Mlle A est entrée récemment en France et qu'elle a toujours vécu au Mali, où elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales ; que Mlle A a fait l'objet de poursuites judiciaires en 2008 après avoir utilisé une fausse carte de séjour en vue de travailler ; enfin, que sa décision de refus de séjour n'a pas méconnu les stipulations du 1° de l'article 3 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 mars 2010, présenté pour Mlle A, domiciliée ..., qui conclut au rejet de la requête et demande la mise à la charge de l'Etat de la somme de mille cinq cents euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle ne vit pas en état de polygamie ; que le préfet n'était pas tenu de refuser sa demande de titre ; que la décision de refus de titre a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle vit en France depuis 1999, qu'elle a des attaches familiales dans ce pays, que ses trois enfants les plus âgés y sont scolarisés et qu'elle a fait des efforts d'intégration ; que si elle a fait l'objet de poursuites judiciaires en 2008, ces faits sont postérieurs à la date de la décision attaquée ; que la décision de refus de titre a méconnu les stipulations du 1° de l'article 3 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant dès lors que ses enfants sont nés en France, ont toujours vécu dans ce pays et y sont scolarisés et parfaitement intégrés et que leur père réside en France depuis de nombreuses années, est titulaire d'une carte de résident de dix ans et dispose de l'ensemble de ses attaches privées et familiales dans ce pays ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Robin, avocat de Mlle A,

- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Robin ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que Mlle A, de nationalité malienne, est mère de trois enfants nés entre 2000 et 2005 sur le territoire français où deux d'entre eux, ayant l'âge requis, sont scolarisés à la date de la décision de refus de délivrance de titre en litige ; qu'elle exerce sur ses enfants l'autorité parentale en commun avec leur père, ressortissant malien qui réside régulièrement en France, avec lequel elle vit en France depuis 1999 et qui assume leur charge ; que si le PREFET DU RHONE soutient que Mlle A a fait l'objet de poursuites judiciaires en 2008 après avoir utilisé une fausse carte de séjour en vue de travailler, ces faits sont postérieurs à la date de la décision en litige et n'entraient pas en compte dans l'appréciation de la situation familiale de l'intéressée à la date du 22 août 2006 ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la densité de la vie familiale de Mlle A en France et nonobstant la présence au domicile du père de ses enfants de l'épouse de celui-ci, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise ; qu'elle a, par conséquent, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 22 août 2006 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mlle A et lui a enjoint de délivrer à l'intéressée, dans un délai de deux mois, un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mlle A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de l'Etat, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant que Mlle A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Robin, avocat de Mlle A A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros au profit de Me Robin, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU RHONE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Robin, avocat de Mlle A la somme de mille euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à Mlle Hawa A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Givord, président assesseur,

M. Seillet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juin 2010.

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N° 09LY01655


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01655
Date de la décision : 02/06/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : ROBIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-02;09ly01655 ?
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