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25/05/2010 | FRANCE | N°09LY00634

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 25 mai 2010, 09LY00634


Vu le recours, enregistré par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 17 mars 2009 et régularisé le 9 avril 2009, présenté par le PREFET DE L'ISERE ;

Le PREFET DE L'ISERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901240 du 5 mars 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 27 janvier 2009 faisant obligation à M. Karim A de quitter le territoire français ainsi que sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et sa dé

cision du 3 mars 2009 ordonnant le placement en rétention administrative de l'in...

Vu le recours, enregistré par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 17 mars 2009 et régularisé le 9 avril 2009, présenté par le PREFET DE L'ISERE ;

Le PREFET DE L'ISERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901240 du 5 mars 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 27 janvier 2009 faisant obligation à M. Karim A de quitter le territoire français ainsi que sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et sa décision du 3 mars 2009 ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé, lui a enjoint de délivrer à M. Karim A une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement et l'a condamné à verser la somme de 800 euros à l'intéressé en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'ordonner la restitution des sommes versées à M. Karim A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en première instance ;

Il soutient que ses décisions n'ont pas porté au droit de M. Karim A au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises dès lors que l'intéressé n'a qu'un an de présence régulière en France et que sa volonté d'intégration repose sur un usage de faux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 mai 2009, présenté pour M. Karim A, domicilié ... ;

M. Karim A demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du PREFET de L'ISERE ;

2°) d'enjoindre au PREFET DE L'ISERE de lui délivrer un titre de séjour ou, le cas échéant, de procéder au réexamen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il a droit à un titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2010 :

- le rapport de Mme Serre, présidente ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant que par la requête susvisée, le PREFET DE L'ISERE fait appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 27 janvier 2009 faisant obligation à M. Karim A de quitter le territoire français ainsi que sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et sa décision du 3 mars 2009 ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé au motif que la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaissait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité algérienne, est entré en France en juin 1999 ; qu'il est divorcé de son épouse française, sans enfant et que si vivent en France un de ses frères, un oncle, une tante et des cousins, il a vécu en Algérie jusqu'à l'âge de 27 ans où il n'est pas dépourvu d'attaches familiales ; que s'il met en avant la durée de son séjour en France et sa mobilité professionnelle ascendante depuis 2004, il a vécu la plus grande partie de ce temps en situation irrégulière et il reconnaît, dans le procès-verbal établi par les services de police judiciaire le 3 mars 2009, avoir fait fabriquer et utilisé une fausse carte de séjour à son nom en vue de travailler pour une agence d'intérim à compter de septembre 2007 ; que, dans ces conditions, la décision du PREFET DE L'ISERE n'a pas porté, eu égard aux buts poursuivis, une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale ; que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 27 janvier 2009 faisant obligation à M. Karim A de quitter le territoire français au motif qu'elle était contraire aux stipulations de l'article 8 précité et, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et sa décision du 3 mars 2009 ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A, devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour en date du 27 janvier 2009 :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 27 janvier 2009 en cause a été signé par M. François B, secrétaire général de la préfecture de l'Isère, qui avait régulièrement reçu, par arrêté du 5 janvier 2009, publié le jour même au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Isère, délégation de signature du PREFET DE L'ISERE pour signer tous actes, arrêtés, décisions et correspondances administratives diverses, à l'exception de certains documents parmi lesquels ne figurent pas les mesures de police des étrangers ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d' autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la mesure d'éloignement au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, méconnu ni les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé, ni celles de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur les autres moyens :

Considérant, en premier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité externe de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la mesure d'éloignement en litige doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la mesure d'éloignement au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la même décision n'a pas méconnu les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions attaquées ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions du PREFET DE L'ISERE tendant à la restitution des sommes versées à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en première instance :

Considérant que le PREFET DE L'ISERE, qui a le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet d'obtenir le remboursement des sommes mises en première instance à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, n'est pas recevable à demander à la Cour d'ordonner la restitution des sommes versées à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en première instance ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0901240 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon en date du 5 mars 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. Karim A devant le Tribunal administratif de Lyon et le surplus des conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Karim A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au PREFET DE L'ISERE.

Lu en audience publique, le 25 mai 2010.

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N° 09LY00634

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 09LY00634
Date de la décision : 25/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Claire SERRE
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : KOSZCZANSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-05-25;09ly00634 ?
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