Vu la requête, enregistrée le 29 août 2008, présentée pour M. Jean-Louis A, domicilié 14 route de Bonnac Moulin Grand à Massiac (15500) ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701257 du 1er juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 juin 2005 par lequel le préfet du Cantal l'a mis en demeure de réduire le débit dérivé de la rivière Alagnon à 5 m3/s, compte tenu de son droit fondé en titre ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le jugement est irrégulier faute d'avoir visé le mémoire qu'il avait produit le 22 mai 2008 ; que l'arrêté n'est pas motivé ; que l'arrêté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence d'avis du CODERST ; que le préfet ne peut pas imposer à l'exploitant une prescription nouvelle par une mise en demeure ; que son droit fondé en titre lui permet de dériver 10 m3/s ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu la mise en demeure adressée le 20 janvier 2010 au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 avril 2010, présenté par le ministre de l'écologie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que le jugement est régulier ; que, faisant siennes les explications données par le préfet devant le tribunal, il soutient que la décision est motivée, ne constitue pas une prescription complémentaire d'une autorisation administrative, que le droit fondé en titre ne permet pas une dérivation supérieure à 5 m3/s ; que les ouvrages ont été modifiés ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 avril 2010, présentée pour M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 avril 2010 :
- le rapport de M. Givord, président-assesseur ;
- les observations de Me Larrouy-Castera, représentant M. A ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
La parole ayant été, de nouveau, donnée à la partie présente ;
Considérant que M. A a acquis, en 1981, les installations du Moulin Grand, situé à Massiac, bénéficiaire d'un droit fondé en titre pour la dérivation des eaux de l'Alagnon à raison de sa vente au titre des biens nationaux, le premier brumaire an XIII ; qu'il a modifié, en 1983, l'ouvrage de prise d'eau et a créé une usine de production d'électricité ; que par un arrêté en date du 18 juin 2007, le préfet du Cantal l'a mis en demeure de : dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêté, fermer les deux vannes excédentaires et condamner leurs mécanismes d'ouverture pour ramener le débit dérivé à 5 m3/s, pour respecter la consistance légale du droit fondé sur titre.(...) ; que par la présente requête, M. A demande à la Cour d'annuler le jugement du 1er juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'alinéa 2 de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : [La décision] contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. ; qu'il résulte de la minute du jugement que le Tribunal a visé et analysé le mémoire produit par le requérant, le 18 mai 2008 ; que dès lors, le moyen tiré de ce que le Tribunal aurait entaché son jugement d'irrégularité, en omettant de viser ce mémoire, manque en fait ;
Sur la légalité externe :
Considérant que le préfet du Cantal a motivé son arrêté par la circonstance que M. A avait apporté des modifications substantielles à la prise d'eau qui avaient pour effet de permettre une dérivation des eaux de l'Alagnon pour un débit supérieur à celui fondé en titre, pouvant être estimé à 5 m3/s ; qu'ainsi, il a suffisamment motivé son arrêté alors même qu'il n'a pas annexé à celui-ci les mesures effectuées par la direction régionale de l'environnement d'Auvergne établissant l'existence d'un débit dérivé supérieur à 5 m3/s ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'alinéa 1 de l'article L. 216-1-1 du code de l'environnement : Lorsque des installations ou ouvrages sont exploités ou que des travaux ou activités sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation ou de la déclaration requise par l'article L. 214-3, l'autorité administrative met en demeure l'exploitant ou, à défaut, le propriétaire de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine en déposant, suivant le cas, une demande d'autorisation ou une déclaration. Elle peut, par arrêté motivé, édicter des mesures conservatoires et, après avoir invité l'intéressé à faire connaître ses observations, suspendre l'exploitation des installations ou ouvrages ou la réalisation des travaux ou activités jusqu'au dépôt de la déclaration ou jusqu'à la décision relative à la demande d'autorisation. ; que l'arrêté en litige a été pris sur le fondement de ces dispositions, en raison de l'exploitation, sans autorisation administrative, d'une dérivation excédant le droit fondé en titre ; que dès lors, les moyens tirés de ce que cet arrêté a pris la forme d'une mise en demeure et a été édicté sans l'avis préalable du conseil départemental de l'environnement et des risques naturels et technologiques requis avant l'édiction d'un arrêté complémentaire d'une autorisation administrative accordée pour l'établissement d'ouvrages établis sur un cours d'eau, prévu par les dispositions de l'article L. 215-10 du code de l'environnement ne peuvent être utilement présentés ;
Sur le bien-fondé de l'arrêté :
Considérant qu'un droit fondé en titre conserve la consistance qui était la sienne à l'origine ; que cette consistance résulte des caractéristiques des ouvrages et non d'une décision administrative ; que dans le cas où des modifications de l'ouvrage auquel ce droit est attaché ont pour effet d'accroître la force motrice théoriquement disponible, appréciée au regard de la hauteur de la chute d'eau et du débit du cours d'eau ou du canal d'amenée, ces transformations n'ont pas pour conséquence de faire disparaître le droit fondé en titre, mais seulement de soumettre l'installation au droit commun de l'autorisation ou de la concession pour la partie de la force motrice supérieure à la puissance fondée en titre ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en première instance, que, d'une part, lors de travaux entrepris en 1969, le bief du Moulin Grand a été élargi et creusé ; qu'en 1983, M. A a modifié l'entrée du bief de prise d'eau et a créé deux nouvelles vannes ; que la largeur de la prise d'eau a été ainsi portée de 3,40 m à 10 m ; que d'autre part, la profondeur de la prise d'eau au droit de la seule vanne existante avant les travaux entrepris par M. A a été mesurée à 0,70 m par un garde de la fédération départementale des associations de pêche et de pisciculture du Cantal, commissionné de l'administration ; que la seule différence des cotes NGF de la crête du barrage et du radier du canal n'est pas de nature à remettre en cause cette mesure et à établir que la prise d'eau aurait une profondeur supérieure à 1,50 m ; que dès lors, le préfet du Cantal n'a pas fait une inexacte appréciation des faits en estimant que les travaux entrepris par M. A ont permis une dérivation de l'Alagnon pour un débit excédant le droit fondé en titre ; que par suite, il n'a commis ni erreur de droit ni erreur de fait en faisant injonction à M. A de condamner les vannes installées en 1983 et en évaluant à 5 m3/s, compte tenu des caractéristiques des installations fondées en droit, le débit pouvant, en conséquence, être dérivé sans autorisation administrative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral susvisé ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Louis A et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2010, à laquelle siégeaient :
M. Givord, président-assesseur,
M. Seillet, premier conseiller,
Mme Pelletier, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 mai 2010.
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N° 08LY02019