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04/05/2010 | FRANCE | N°08LY00644

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 04 mai 2010, 08LY00644


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 21 mars 2008 et régularisée par courrier le 25 mars 2008, présentée pour la société anonyme HAFRIAL, dont le siège social est situé 48 chemin des Bouts à Saint Ismier (38330) ;

La SA HAFRIAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0401597 du 11 décembre 2007 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt, auxq

uelles elle a été assujettie, au titre des exercices clos les 31 août 1999, 2000 et 200...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 21 mars 2008 et régularisée par courrier le 25 mars 2008, présentée pour la société anonyme HAFRIAL, dont le siège social est situé 48 chemin des Bouts à Saint Ismier (38330) ;

La SA HAFRIAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0401597 du 11 décembre 2007 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt, auxquelles elle a été assujettie, au titre des exercices clos les 31 août 1999, 2000 et 2001, à raison de la remise en cause du caractère fiscalement déductible d'une perte de 2 447 027 francs inscrite dans les comptes de l'exercice clos le 31 août 1999 ;

2°) de prononcer la décharge des droits et pénalités procédant de ce chef de redressement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dont 800 euros au titre des frais exposés en première instance ;

Elle soutient que l'administration s'est implicitement mais nécessairement placée sur le terrain de la répression d'un abus de droit sans respecter la procédure prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que l'écart constaté lors de l'annulation de ses propres actions ne procède pas d'un acte anormal de gestion ; que les modalités de traitement d'un mali de fusion lorsqu'une société mère absorbe l'une de ses filiale ne peuvent pas être transposées au cas où une filiale absorbe sa société mère, ainsi que l'a indiqué le comité d'urgence du conseil national de la comptabilité dans son avis n° 2005 C du 4 mai 2005 ; que l'écart d'annulation des titres a un impact sur l'actif net de la filiale et qu'il ne saurait être regardé comme un prélèvement effectué par l'exploitant ou les associés pour l'application des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts ; que dans une note d'information de 1992, la Compagnie nationale des commissaires aux comptes avait préconisé de comptabiliser en charges l'écart d'annulation de titres, ainsi que cela a été fait en l'espèce ; qu'elle a été d'une totale bonne foi lors de la souscription de sa déclaration en y insérant une mention expresse, l'administration fiscale, qui supporte la charge de la preuve, ne pouvant lui opposer la réponse apportée ultérieurement, le 22 décembre 2000, à sa demande de renseignements du 29 novembre 1999 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 décembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que l'administration, qui ne conteste ni l'existence, ni la régularité juridique de l'opération de fusion-absorption et ne soutient pas que cette opération aurait été exclusivement réalisée en vue d'éluder l'impôt, n'avait pas à mettre en oeuvre la procédure de répression des abus de droit ; qu'elle se borne à soutenir que l'écart de 2 447 027 francs constaté n'est pas fiscalement déductible dès lors qu'il ne présente pas le caractère d'une perte sur le plan économique et qu'il résulte d'un acte anormal de gestion ; que l'écart purement technique ne résulte que de l'annulation par l'absorbante de ses propres titres ; que l'avis du conseil national de la comptabilité n'indique pas que cet écart pourrait être comptabilisé dans un compte de charges mais qu'il devrait l'être dans le compte report à nouveau débiteur ; que la Cour administrative d'appel de Bordeaux a jugé que le rachat de ses propres actions par une société, à un prix supérieur à leur valeur nominale, ne saurait faire apparaître une perte venant en déduction de l'actif net ; qu'une perte procédant d'un acte anormal de gestion ne pourrait en tout état de cause être admise en déduction ; que la bonne foi de la requérante ne peut être retenue dès lors qu'elle n'ignorait pas qu'elle prenait en charge une importante dette, sans la moindre contrepartie, alors que son commissaire aux comptes avait refusé de certifier ses comptes ;

Vu l'ordonnance en date du 20 avril 2009 fixant la clôture d'instruction au 15 mai 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2010 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;

Considérant que la SA HAFRIAL, dont 2 694 des 2 700 actions de son capital social étaient détenues par la SARL Colysée Investissements, a absorbé cette dernière par voie de fusion, le 30 avril 1999, avec effet au 1er janvier 1999 ; qu'elle a ainsi recueilli 2 694 de ses propres actions, pour une valeur d'apport de 3 600 507 francs, alors que la valeur nominale de chacune de ces actions était de 100 francs ; qu'à la suite de l'annulation de ces 2 694 actions, la SA HAFRIAL a constaté une charge exceptionnelle de 2 447 027 francs, correspondant au surplus de la différence entre la valeur d'apport desdites actions et leur valeur nominale, après les imputations effectuées sur le compte de réserve spéciale des plus-values à long terme et le compte de report à nouveau ; que la SA HAFRIAL a ainsi fait apparaître un déficit au titre de l'exercice clos le 31 août 1999, lequel a été partiellement reporté sur les résultats des exercices clos en 2000 et 2001 ; qu'après vérification de sa comptabilité, la SA HAFRIAL a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt au titre des exercices clos en 1999, 2000 et 2001 ; qu'elle conteste le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0401597 du 11 décembre 2007 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions procédant de la seule remise en cause de la déductibilité de la charge exceptionnelle de 2 447 027 francs comptabilisée au titre de l'exercice clos en 1999 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention (...) / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque l'administration invoque des faits constitutifs d'un abus de droit pour justifier un redressement, le contribuable, qui n'a pas demandé la saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit doit être regardé comme ayant été privé de la garantie tenant à la faculté de provoquer cette saisine si, avant la mise en recouvrement de l'imposition, l'administration omet de l'aviser expressément que le redressement a pour fondement les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il ressort de la notification de redressements du 22 mai 2002 que le vérificateur a utilisé la procédure de redressement contradictoire prévue aux dispositions des articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales et que, pour remettre en cause la déductibilité de la charge exceptionnelle de 2 447 027 francs comptabilisée par la SA HAFRIAL, il s'est fondé sur trois motifs en indiquant, premièrement, que les dispositions de l'article 210 A du code général des impôts font obstacle à la prise en compte de toute plus-value ou moins-value dégagée sur les éléments d'actifs apportés du fait d'une fusion, deuxièmement, que l'opération de fusion a eu pour effet le rachat de ses propres actions par la SA HAFRIAL, ce qui ne saurait conduire au constat d'une perte déductible et, troisièmement, que l'opération de fusion réalisée relevait d'un acte anormal de gestion ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration fiscale, qui n'a pas contesté la fusion-absorption de la SARL Colysée Investissements par sa filiale ou l'annulation des actions apportées à cette dernière, n'a pas fait valoir, fût-ce implicitement, un abus de droit ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales auraient été méconnues ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; qu'en faisant valoir, sans être contredite, que la SARL Colysée Investissements avait un passif de 3 835 064 francs, résultant des emprunts qu'elle avait contractés pour acquérir 99,78 % du capital de la SA HAFRIAL, alors qu'elle n'avait pratiquement pour seul actif que des actions de cette société, qui devaient faire l'objet d'une annulation suite à la fusion-absorption réalisée, sans que la SA HAFRIAL ne justifie de la moindre contrepartie reçue par elle à raison de cette opération, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve dont elle a la charge de ce que cette opération de fusion-absorption procédait d'un acte anormal de gestion et que la perte de 2 447 027 francs en résultant ne pouvait être admise en déduction des résultats de la requérante ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres règles applicables au traitement fiscal et comptable d'une telle perte, la SA HAFRIAL n'était pas fondée à déduire de ses résultats cette somme de 2 447 027 francs ;

Sur la majoration de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droits au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. (...) et qu'aux termes de l'article 1732 du même code dans sa rédaction applicable au présent litige : Lorsqu'un contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note y annexée, les motifs de droit ou de fait pour lesquels il ne mentionne pas certains éléments d'imposition en totalité ou en partie, ou donne à ces éléments une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou fait état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées, les redressements opérés à ces titres n'entraînent pas l'application de l'intérêt de retard visé à l'article 1727. ;

Considérant que si la SA HAFRIAL, qui ne saurait se prévaloir utilement des dispositions de l'article 1732 du code général des impôts, pour contester la majoration de 40 p. 100 prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du même code, soutient que le traitement comptable d'une telle perte n'avait pas encore été clairement défini et qu'elle n'avait pas davantage été éclairée sur son traitement fiscal en raison du retard mis par l'administration qui a répondu en décembre 2000 à la demande de renseignement qu'elle avait déposée le 29 novembre 1999, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve dont elle a la charge de la mauvaise foi de la requérante en faisant valoir que le commissaire aux comptes de la SA HAFRIAL avait refusé de certifier les comptes de l'exercice clos en 1999 en raison de cette opération de fusion-absorption et que la contribuable ne pouvait ainsi ignorer que cette opération, dont procède la perte comptabilisée, procédait d'un acte anormal de gestion faisant obstacle à la déductibilité d'une telle perte ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SA HAFRIAL n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits et pénalités restant en litige ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA HAFRIAL est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA HAFRIAL et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Monnier et Pourny, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 4 mai 2010.

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N° 08LY00644


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00644
Date de la décision : 04/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : AJEF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-05-04;08ly00644 ?
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