Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 10 juillet 2009, présentée pour le PREFET DU RHONE ;
Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0903595 en date du 19 juin 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 16 juin 2009 portant reconduite à la frontière de M. Chouaïbou A et les décisions du même jour fixant le pays de destination et le plaçant en rétention administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;
Il soutient que la décision ordonnant la reconduite à la frontière de M. A n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise, dès lors que M. A n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine et ne justifie pas d'une intégration professionnelle et sociale en France ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2010 :
- le rapport de M. du Besset, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an ; (...) ;
Considérant que M. A, de nationalité camerounaise, a fait l'objet d'une décision du préfet de police de Paris, en date du 26 mai 2008, lui faisant obligation de quitter le territoire français ; que cette décision doit être regardée comme lui ayant été régulièrement notifiée le 28 mai 2008 ; qu'à la date de l'arrêté en litige, le 16 juin 2009, il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de celles qui ont été produites en appel par le PREFET DU RHONE que si M. A indique être entré en France le 18 novembre 1997, à l'âge de seize ans, pour rejoindre son père, qui était à l'époque agent administratif auprès de l'ambassade du Cameroun en France, et si ses deux soeurs, dont l'une est Française, vivent régulièrement sur le territoire français, il n'a produit aucun justificatif susceptible d'établir sa résidence habituelle en France depuis 1997 ; qu'il a d'ailleurs déclaré, lors de son audition par les services de police, le 16 juin 2009, avoir effectué son service militaire au Cameroun ; qu'il a également indiqué, lors de cette audition, être hébergé chez un ami ; qu'il ne fait pas état d'une insertion sociale ou professionnelle particulière sur le territoire français ; qu'enfin, célibataire et sans enfant, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Cameroun, où résident notamment, à la date de la décision en litige, sa mère, ainsi que son père, qui, selon une attestation du ministre des affaires étrangères en date du 19 août 2005, a cessé ses fonctions à l'ambassade du Cameroun en France le 29 juin 2005 ; que, dans ces conditions, l'arrêté du 16 juin 2009 portant reconduite à la frontière de M. A n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis ; que, dès lors, le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé comme pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'arrêté de reconduite à la frontière du 16 juin 2009, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour portant fixation du pays de destination et placement en rétention administrative ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A devant le Tribunal administratif ;
Sur les moyens relatifs à l'incompétence du signataire des décisions en litige :
Considérant que M. René B, secrétaire général de la préfecture du Rhône, signataire des décisions en litige, bénéficiait à cet effet d'une délégation de signature du PREFET DU RHONE qui lui avait été donnée par un arrêté n° 2008-2949 en date du 9 juin 2008, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; qu'ainsi les moyens susanalysés doivent être écartés ;
Sur les autres moyens relatifs à la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant que l'arrêté en litige, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la mesure de reconduite à la frontière, est suffisamment motivé ;
Considérant qu'ainsi que dit plus haut il ressort des pièces du dossier que M. A dispose d'attaches familiales au Cameroun, où résident notamment ses parents ; que, par suite, contrairement à ses allégations, l'arrêté de reconduite à la frontière, qui mentionne qu'il ne démontre pas être démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine, n'est pas entaché d'erreur de fait sur ce point ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit :/ (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la république ;
Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière au regard des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cet arrêté ne méconnaît pas les dispositions précités du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur l'autre moyen relatif à la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'il ne serait pas motivé doit être écarté ;
Sur les autres moyens relatifs à la légalité de la décision plaçant M. A en rétention administrative :
Considérant que la décision en litige vise le 3° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'arrêté de reconduite à la frontière, mentionne notamment l'absence de moyen de transport susceptible de permettre son départ immédiat du territoire français et le fait que M. A ne justifie pas de circonstances exceptionnelles ni de garanties de représentation effectives ; que, comportant ainsi l'énoncé les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, elle est, dès lors, régulièrement motivé ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : (...) 3º Soit, faisant l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 et édicté moins d'un an auparavant, ( ...) ne peut quitter immédiatement le territoire français ; (...) ;
Considérant que si M. A possède un passeport en cours de validité, l'attestation d'hébergement établie par sa soeur est contredite par ses propres déclarations lors de son audition du 16 juin 2009, au cours de laquelle il a affirmé être hébergé par un ami ; que, par suite, et alors que M. A n'avait pas obtempéré à une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre, le PREFET DU RHONE a pu estimer à juste titre qu'il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et décider, sans commettre ni erreur de droit ni erreur de fait, de le placer en rétention administrative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 16 juin 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ainsi que les décisions du même jour fixant le pays de destination et le plaçant en rétention administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0903595, en date du 19 juin 2009, du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : La demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à M. Chouaïbou A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Lu en audience publique, le 17 mars 2010.
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N° 09LY01590