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17/03/2010 | FRANCE | N°09LY01096

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 17 mars 2010, 09LY01096


Vu la requête, enregistrée au greffe par télécopie le 20 mai 2009 et régularisée le 4 août 2009, présentée pour le PREFET DU PUY-DE-DOME ;

Le PREFET DU PUY-DE-DOME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902309 en date du 22 avril 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 17 avril 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A ainsi que ses décisions du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et prononçant le placement en rétention administrative de l'in

téressée ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal admini...

Vu la requête, enregistrée au greffe par télécopie le 20 mai 2009 et régularisée le 4 août 2009, présentée pour le PREFET DU PUY-DE-DOME ;

Le PREFET DU PUY-DE-DOME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902309 en date du 22 avril 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 17 avril 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A ainsi que ses décisions du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et prononçant le placement en rétention administrative de l'intéressée ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Il soutient que les décisions attaquées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 août 2009, présenté pour Mme Madeleine A qui conclut au rejet de la requête et demande à la cour d'enjoindre au PREFET DU PUY-DE-DOME de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de condamner l'Etat à verser somme de 1 500 € à son conseil sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que la décision ordonnant sa reconduite à la frontière méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2010 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité camerounaise, s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté du 17 avril 2009, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, âgée de soixante-deux ans, est divorcée et non remariée, qu'elle a vécu pendant neuf ans sur le territoire national d'abord auprès de sa soeur puis auprès d'un ressortissant français et qu'elle entretient des relations avec ses quatre enfants, dont trois résident régulièrement en France, et avec ses petits-enfants ; qu'ainsi, alors même qu'elle a passé la majeure partie de sa vie au Cameroun où réside notamment son frère, le centre de sa vie privée et familiale doit être regardé comme situé en France ; que, dans ces conditions, l'arrêté du 17 avril 2009 ordonnant sa reconduite à la frontière a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU PUY DE DOME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 17 avril 2009 et, par voie de conséquence, ses décisions du même jour fixant le pays de destination et portant maintien en rétention ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour à Mme A ; que dès lors les conclusions susanalysées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Penin, avocat de Mme A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 € au profit de Me Penin, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU PUY DE DOME est rejetée.

Article 2 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 € à Me Penin, avocat de Mme A, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à Mme Madeleine A. Copie en sera adressée au PREFET DU PUY-DE-DOME et à Me Penin.

Lu en audience publique, le 17 mars 2010.

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N° 09LY01096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09LY01096
Date de la décision : 17/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : PENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-03-17;09ly01096 ?
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