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16/03/2010 | FRANCE | N°08LY00460

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 16 mars 2010, 08LY00460


Vu la requête, enregistrée le 25 février 2008, présentée pour Mme Nicole A, domiciliée ...;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507003 du 27 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Tarare à lui payer une indemnité de 30 000 euros, en réparation des préjudices subis du fait de la décision du 28 juillet 2003 par laquelle le directeur dudit centre a prononcé sa révocation ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Tarare à lui verser la somme de

30 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre intérêts de droit à compter de la réc...

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2008, présentée pour Mme Nicole A, domiciliée ...;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507003 du 27 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Tarare à lui payer une indemnité de 30 000 euros, en réparation des préjudices subis du fait de la décision du 28 juillet 2003 par laquelle le directeur dudit centre a prononcé sa révocation ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Tarare à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre intérêts de droit à compter de la réception de la demande préalable en date du 23 septembre 2005 ;

3°) de condamner de centre hospitalier de Tarare à lui verser la somme de 1 200 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la décision de sanction du 28 juillet 2003 est illégale pour non-respect de la procédure

et notamment de l'article 9 du décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 ;

- la voix du président du conseil de discipline n'a pas pu être considérée comme prépondérante ;

- le Tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'information, par le centre hospitalier de Tarare, de la possibilité de saisine du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière ;

- ce défaut d'information n'a a pas été fortuit et visait clairement à empêcher un nouvel examen de sa situation par une formation disciplinaire supérieure ;

- le Tribunal n'a pas tiré la conséquence, au plan indemnitaire, de son constat de l'illégalité de la décision de révocation ;

- le préjudice présente un lien de causalité direct avec cette irrégularité et doit, pour ce motif, être indemnisé ;

- l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- des faits de vol ont été imputés à Mme A sans preuve ;

- Mme A a subi une perte de chance d'obtenir du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière un avis défavorable à la sanction disciplinaire, l'administration se trouvant liée par cet avis ;

- l'illégalité de la décision engage la responsabilité de l'établissement ;

- Mme A a subi un préjudice moral compte-tenu du contexte de la rupture et de propos calomnieux ;

- elle a également subi un préjudice matériel car elle perçoit dans son nouvel emploi une rémunération inférieure de près de 283 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 2 novembre 2009 par laquelle le président de la 3ème chambre a informé les parties de ce que l'instruction serait close le 20 novembre 2009, à 16 h 30 ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 novembre 2009, présenté pour le centre hospitalier de Tarare qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de Mme A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'ensemble des membres présents s'étant exprimés et prononcés à l'unanimité sur le principe d'une sanction, le président du conseil de discipline n'avait pas à proposer qu'aucune sanction ne soit prononcée ;

- la circonstance, postérieure à l'acte attaqué, que le directeur du centre hospitalier de Tarare n'a pas informé le conseil de discipline des motifs qui l'ont conduit à prononcer la sanction alors qu'aucune des propositions soumises au conseil de discipline n'a obtenu la majorité des membres présents, est sans influence sur la légalité de la décision ;

- la circonstance que Mme A n'ait pas été avisée des possibilités de recours devant le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière est également sans influence sur la légalité de la sanction de révocation ;

- cette circonstance n'interdisait pas à Mme A de saisir, si elle s'y estimait fondée, le Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière puisqu'en pareille hypothèse aucune forclusion n'aurait pu lui être opposée ;

- la sanction n'était pas disproportionnée par rapport aux faits reprochés ;

- aucune faute n'étant imputable au centre hospitalier de Tarare, Mme A ne peut se prévaloir d'aucun préjudice ;

- la décision étant sur le fond parfaitement justifiée ne fait pas naître un droit à indemnisation ;

- le préjudice n'est justifié ni dans son principe, ni dans son montant, Mme A ayant retrouvé un emploi équivalent dont le salaire, en effet inférieur au poste qu'elle occupait, est justifié par un temps partiel ;

- le préjudice moral trouve son unique origine dans le comportement délictueux de Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2010 :

- le rapport de M. Givord, président-assesseur ;

- les observations de Me Giry, représentant Mme A, de Me Hammerer, représentant le centre hospitalier de Tarare ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

La parole ayant été, de nouveau, donnée aux parties présentes ;

Considérant que Mme A, aide-soignante, a été révoquée par une décision en date du 28 juillet 2003 du directeur du centre hospitalier de Tarare ; qu'elle a demandé, au Tribunal administratif de Lyon, d'une part, la réparation des préjudices résultant de sa révocation sur le fondement de l'illégalité de la décision du 28 juillet 2003 et, d'autre part, la réparation de la perte de chance de ne pas être révoquée sur le fondement de la faute commise par le directeur du centre hospitalier qui ne l'a pas informée de la possibilité de saisir le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière ; que par la présente requête, elle demande à la Cour d'annuler le jugement du 27 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande, et la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 30 000 euros ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le Tribunal administratif de Lyon a omis de statuer sur les conclusions de la demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Tarare et fondées sur l'absence d'information de la possibilité de saisir le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière ; que Mme A est fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer dans cette même mesure et de statuer sur ces conclusions présentées par Mme A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Sur les conclusions fondées sur l'illégalité de la décision du 28 juillet 2003 :

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif, de constater l'illégalité de la décision du 28 juillet 2003 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Tarare a prononcé à l'encontre de Mme A la sanction de révocation à compter du 1er août 2003, pour avoir été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Considérant qu'il résulte d'un jugement définitif, en date du 9 décembre 2003, du Tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône, statuant en matière correctionnelle, dont la constatation des faits s'impose au juge administratif que Mme A a été condamnée pour le vol de denrées alimentaires au préjudice du centre hospitalier de Tarare ; que contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort d'un procès-verbal de police que la soustraction frauduleuse ne concernait pas que des denrées périmées destinées à être jetées ; que selon ses propres déclarations, les faits reprochés se sont poursuivis pendant plusieurs années ; que dans ces conditions, alors même que Mme A aurait exercé convenablement ses fonctions, compte tenu de la gravité de la faute reprochée, la décision par laquelle le directeur du centre hospitalier a prononcé sa révocation n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'ainsi, les préjudices dont Mme A demande la réparation ne résultent pas de la faute commise par le centre hospitalier en licenciant l'intéressée en méconnaissance de la procédure disciplinaire, mais du comportement de l'agent ; que par suite, les conclusions de la requérante tendant à la condamnation du centre hospitalier de Tarare à réparer les préjudices susvisés doivent être rejetées ;

Sur les conclusions fondées sur la perte de chance :

Considérant qu'aux termes de l'article 84 de la loi susvisée du 9 janvier 1986 : Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière lorsque l'autorité investie du pouvoir disciplinaire a prononcé une sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline. / L'autorité investie du pouvoir de nomination ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière. , et qu'aux termes de l'article 12 du décret susvisé du 9 novembre 1989 : L'autorité investie du pouvoir disciplinaire doit indiquer au fonctionnaire les conditions et les délais dans lesquels il peut exercer, dans le cas où il lui est ouvert, son droit de recours auprès du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière. ; qu'ainsi, Mme A qui avait fait l'objet d'une révocation, sanction du quatrième groupe, pouvait introduire un recours auprès du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière dès lors que le conseil de discipline n'avait pas émis un avis favorable à sa révocation ; que par suite, en omettant de l'informer de cette possibilité, le centre hospitalier de Tarare a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que, comme le fait valoir le centre hospitalier, à la date d'introduction de sa demande devant le Tribunal administratif de Lyon, Mme A était toujours recevable à introduire un recours devant le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière ; que de plus, la seule circonstance que l'avis du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière lie l'autorité administrative ne suffit pas à établir que la requérante, à qui incombe la charge de la preuve, a perdu une chance sérieuse de ne pas être révoquée ; que par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la faute commise par le centre hospitalier en ne l'informant pas de la possibilité d'un recours devant le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière lui aurait fait perdre une chance sérieuse de ne pas être révoquée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Tarare à lui verser la somme de 30 000 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Tarare, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A une somme de 800 euros au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Tarare et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 27 décembre 2007 du Tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier de Tarare à raison de la faute commise par son directeur en omettant d'informer Mme A de la possibilité de saisir le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière.

Article 2 : La requête de Mme A est rejetée.

Article 3 : Mme A versera au centre hospitalier de Tarare la somme de 800 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nicole A et au centre hospitalier de Tarare.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2010, à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Givord , président-assesseur,

M. Reynoird, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mars 2010.

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N° 08LY00460


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00460
Date de la décision : 16/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Pierre Yves GIVORD
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : SCP MASANOVIC PICOT DUMOULIN THIEBAULT CHABANOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-03-16;08ly00460 ?
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