Vu la requête, enregistrée le 31 août 2007, présentée pour M. Gilles A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0602097 du 12 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de quatre décisions de retrait de points du ministre de l'intérieur consécutives à des infractions au code de la route respectivement verbalisées les 4 mars 2004, 22 septembre 2004, 5 janvier 2005 et 6 juin 2005 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
Il soutient que :
1/- il avait demandé au Tribunal l'annulation de ces décisions par le moyen que les quatre amendes forfaitaires correspondantes étaient impayées et que par voie de conséquence la réalité des infractions n'était pas établie au sens des dispositions limitatives de l'article L. 223-1 du code de la route ; que l'administration ne conteste pas que les quatre amendes forfaitaires n'ont pas été payées ; qu'aucun titre exécutoire n'a été émis ni notifié ; que la motivation du Tribunal, aux termes de laquelle faute de produire les réclamations qu'il a dû envoyer à l'officier du ministère public, la réalité des infractions est établie, méconnaît l'article L. 223-1 ; que faute de notification de titres exécutoires il n'était de toutes façons pas recevable à présenter une réclamation ; la seule constatation d'un fait matériel pouvant être qualifié d'infraction par un agent verbalisateur ne vaut pas établissement de la réalité d'une infraction pénale ; s'il a reconnu la matérialité des faits, il conteste en revanche la réalité des infractions pénales ;
- aucune sanction ne peut être infligée à une personne présumée innocente d'une infraction commise, quand bien même celle-ci aurait reconnu les faits, tant qu'une décision de droit ou un mécanisme juridique emportant la même conséquence n'est pas intervenu et a renversé la présomption d'innocence ;
- le Tribunal a fait produire des effets juridiques à la simple verbalisation, et ainsi méconnu l'article L. 223-1 ;
- faute pour l'administration de rapporter la preuve des éléments énoncés à l'article L. 223-1 la réalité des infractions et leur imputabilité ne sont pas établies, et aucun retrait de points ne peut donc être infligé à un individu présumé ne pas en être l'auteur ;
2/ l'information due au conducteur ne lui a pas été délivrée :
- s'agissant de l'infraction commise le 4 mars 2004, le procès-verbal d'infraction ne comporte aucune mention concernant l'identité du conducteur, et la signature qu'il comporte n'est pas la sienne ; ce document n'apporte donc pas la preuve de la remise effective de l'information réglementaire ; il affirme n'avoir rien reçu ;
- s'agissant des autres infractions, les procès-verbaux les constatant produits par l'administration sous forme de souches ne mentionnent que la perte de points ; il n'a donc pas été informé de l'existence d'un traitement automatisé des points, de la possibilité d'avoir accès aux informations le concernant ni de ce que le paiement de l'amende forfaitaire vaut reconnaissance de la réalité de l'infraction et entraîne la perte de points correspondante ; que si l'administration affirme que ces procès-verbaux auraient été rédigés sur un imprimé de type 11317*01 qui lui aurait été remis, elle ne le prouve pas ; qu'il existe bien d'autres imprimés CERFA qui sont utilisés pour rédiger les procès-verbaux et que rien ne permet de dire que ce CERFA aurait été utilisé plutôt qu'un autre ; qu'il conteste absolument avoir reçu une notice de ce type ; qu'au demeurant la mention préimprimée selon laquelle le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement de l'avis de contravention n'indique pas qu'il a nécessairement reçu un écrit relatif au permis à points ; que les deux seuls documents à lui remis, carte de paiement et avis de contravention, et qu'il n'a pas conservés, n'avaient pour vocation que l'exposé des modalités de paiement de l'amende forfaitaire ou de la contestation des faits ; qu'il ne peut lui être reproché de ne pas les avoir conservés ; qu'en revanche c'est à l'administration qui s'en prévaut d'apporter la preuve du document qu'elle a remis, en en produisant la copie, et non pas un document-type qui ne correspond nullement à celui qui a été remis ; que l'administration inverse la charge de la preuve, exige de lui la production d'une preuve impossible et porte atteinte au principe du procès équitable ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2008, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- s'agissant de l'information du conducteur, depuis la loi du 12 juin 2003 il suffit que le contrevenant soit informé de ce qu'il encourt un retrait de points, sans qu'il soit besoin d'en préciser le nombre ; que les informations exigées par les textes ont été portées à la connaissance du requérant comme l'attestent les documents en production ;
- s'agissant du moyen tiré du défaut de notification des retraits de points, les décisions ont été portées à la connaissance du requérant par envoi d'une lettre simple, référence 48, à l'adresse relevée lors de l'établissement du procès-verbal ;
- s'agissant du moyen tiré de l'absence de la réalité des infractions, le défaut de paiement de l'amende forfaitaire ne saurait faire obstacle au retrait de points ; passé le délai de trente jours suivant leur notification faite au moment de la commission de l'infraction elles deviennent exigibles ; durant ce délai l'intéressé peut contester la réalité de l'infraction devant le juge pénal ; passé ce délai la réalité de l'infraction est acquise ; il ne ressort pas du dossier que le requérant ait formulé dans le délai requis, une réclamation devant le ministère public compétent ; de plus il a signé les quatre procès-verbaux lors de la commission des infractions ; le moyen doit donc être écarté ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 20 juin 2008, présenté pour M. A ; M. A conclut au bénéfice de sa requête par les mêmes moyens, et en réponse au ministre fait valoir que :
- la réalité d'une infraction constatée selon la procédure de l'amende forfaitaire est établie si un titre exécutoire a été émis et que ce titre est devenu définitif ; l'administration ne produit ni même n'allègue que des titres exécutoires aient été émis ou qu'il en aurait eu connaissance ;
- l'administration confond la procédure de la réclamation avec celle de l'exonération, qu'il ne conteste pas ne pas avoir utilisée ;
- il est inopérant de lui opposer l'absence de réclamation puisqu'il n'est pas recevable à présenter une telle réclamation faute d'émission et/ou de notification du titre exécutoire ;
- en prétendant qu'il n'établit pas avoir formulé une réclamation l'administration inverse la charge de la preuve ; il appartient à l'administration de rapporter la preuve que les conditions de l'article L. 223-1 du code de la route sont remplies, ce qu'elle ne fait pas en l'espèce puisqu'elle reconnaît que les quatre amendes sont impayées et n'allègue pas qu'un titre exécutoire ait été émis ;
Vu le second mémoire en réplique, enregistré le 26 septembre 2008, présenté pour M. A ; M. A conclut au bénéfice de sa requête par les mêmes moyens et en réponse au ministre fait valoir que la reconnaissance de l'infraction au moment des faits, aveu aléatoire et pouvant être rétracté à tout moment par l'intéressé dans le cadre de son droit à ne pas s'accuser, n'a aucune incidence sur le mécanisme juridique de l'article L. 223-3 du code de la route ;
Vu l'ordonnance en date du 17 septembre 2009 fixant la clôture d'instruction au 9 octobre 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les lettres du 24 septembre 2009 adressées aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative et selon lesquelles le moyen de légalité interne, tiré du défaut d'établissement de la réalité de l'infraction, a été soulevé tardivement devant le juge de 1ère instance ;
Vu, enregistrées le 6 octobre 2009, et communiquées, les observations présentées par le ministre en réponse au moyen invoqué par les lettres du 24 septembre 2009 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2009 :
- le rapport de Mme Chalhoub, président-assesseur,
- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;
Sur la légalité externe :
En ce qui concerne les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 22 septembre 2004, 5 janvier 2005 et 6 juin 2005 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route dans sa version applicable au litige : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9 ( ...). ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 dudit code dans sa version applicable au litige : I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9 (... ) ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ;
Considérant que les procès-verbaux, établis les 22 septembre 2004, 5 janvier 2005 et 6 juin 2005, et signés de M. A, mentionnent que les infractions relevées à chacune de ces dates sont susceptibles d'entraîner des pertes de points ; que M. A a, en outre, reconnu, en signant le volet réservé à cet effet, avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention dont l'exemplaire vierge de type CERFA 11317*01 produit par le ministre de l'intérieur comporte toutes les informations exigées par les dispositions précitées du code de la route ; que si M. A allègue que la carte de paiement et l'avis de contravention qui lui ont été remis n'étaient pas du type CERFA 11317*01 et ne comportaient pas non plus toutes les informations exigées par les dispositions précitées du code de la route, leur finalité n'étant que d'exposer les modalités de paiement de l'amende forfaitaire ou de la contestation des faits, il ne le démontre pas, faute pour lui de produire lesdits documents dont il reconnaît avoir été destinataire ; que, par suite, eu égard aux mentions dont étaient revêtus les avis de contravention en cause il est établi que l'administration s'est acquittée envers le requérant de son obligation de lui délivrer, préalablement au paiement de l'amende, les informations requises en vertu des dispositions précitées du code de la route ;
En ce qui concerne la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 4 mars 2004 :
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. A, la signature figurant sur le procès-verbal constatant l'infraction commise le 4 mars 2004 est identique à celles figurant sur ceux des 22 septembre 2004 et 6 juin 2005 ; que le moyen soulevé, tiré de ce que, en raison de la dissemblance de signature, les mentions du procès-verbal dressé le 4 mars 2004, selon lesquelles le signataire reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention, ne seraient pas probantes, manque en fait ;
Sur la légalité interne :
Considérant que le moyen de légalité interne tiré du défaut d'établissement de la réalité des infractions n'a été soulevé en première instance que dans un mémoire complémentaire produit plus de deux mois après l'introduction de la requête devant le Tribunal ; que ce moyen, soulevé tardivement, ne peut qu'être écarté comme irrecevable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gilles A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2009 à laquelle siégeaient :
M. du Besset, président de chambre,
Mme Chalhoub, président-assesseur,
Mme Vinet, conseiller.
Lu en audience publique, le 31 décembre 2009.
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N° 07LY01972
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