La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2009 | FRANCE | N°07LY01219

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 31 décembre 2009, 07LY01219


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 11 juin et 14 août 2007, présentés pour M. Salah A, domicilié à la Maison des associations, 6 rue Berthe de Boissieux à Grenoble (38000) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0405863, 0405867, 0503383 en date du 17 avril 2007, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses trois demandes tendant respectivement à l'annulation de la décision du 3 juillet 2003, par laquelle le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

a rejeté sa demande d'asile territorial, de l'arrêté du 29 juillet 2003, par l...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 11 juin et 14 août 2007, présentés pour M. Salah A, domicilié à la Maison des associations, 6 rue Berthe de Boissieux à Grenoble (38000) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0405863, 0405867, 0503383 en date du 17 avril 2007, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses trois demandes tendant respectivement à l'annulation de la décision du 3 juillet 2003, par laquelle le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a rejeté sa demande d'asile territorial, de l'arrêté du 29 juillet 2003, par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et de l'arrêté du 22 novembre 2004, par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer le certificat de résident algérien qu'il avait sollicité à raison de son état de santé ;

2°) d'annuler cette décision et ces arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que la décision de rejet de sa demande d'asile a été prise au terme d'une procédure irrégulière au double motif qu'il n'a pas été informé de la possibilité de se faire assister par un interprète et que le ministre des affaires étrangères n'a pas été préalablement consulté ; que la décision attaquée n'est pas motivée ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 ; que la motivation du jugement du tribunal administratif manque en fait dès lors qu'elle est notamment fondée sur le fait que l'intéressé n'aurait pas fondé de liens personnels et familiaux en France alors que son père vit en France ; que l'arrêté du 29 juillet 2003 a été pris au terme d'une procédure irrégulière au motif que le préfet aurait dû préalablement consulter la commission du titre de séjour ; qu'il n'est pas motivé ; que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée vis-à-vis de la décision ministérielle de rejet de la demande d'asile territorial ; que l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu des risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine et de son état de santé ; que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en exigeant qu'il établisse les faits alors qu'invoquant un faisceau d'indices il en démontre la vraisemblance ; que l'arrêté du 22 novembre 2004 est illégal en raison de son absence de motivation ; que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien dès lors qu'il aurait dû lui délivrer de plein droit ce certificat de résidence en raison de son état de santé qui nécessite un traitement dont il ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine ; que l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur l'impossibilité d'une prise en charge thérapeutique adaptée dans son pays d'origine alors que les médicaments qui lui sont prescrits n'y sont pas commercialisés et que des médicaments génériques seraient inefficaces ; que la décision fixant le pays de retour viole l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 1er octobre 2009, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que M. A ne justifie pas l'erreur de droit qu'il allègue à l'encontre du jugement du tribunal administratif de Grenoble daté du 17 avril 2007 ; qu'il n'apporte aucun élément nouveau en appel à l'appui de sa demande d'annulation de la décision du 3 juillet 2003 ;

Vu l'ordonnance du 11 septembre 2009 portant clôture de l'instruction au 6 octobre 2009 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle de Lyon, en date du 12 février 2008, admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2009 :

- le rapport de M. du Besset, président,

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité algérienne, est entré en France le 9 juillet 2002, sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'il a déposé une demande d'asile territorial qui a été rejetée par décision du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en date du 3 juillet 2003 ; que, par arrêté du 29 juillet suivant, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; que, M. A ayant demandé en septembre 2004, un certificat de résidence algérien pour motif de santé, le préfet de l'Isère a refusé de le lui délivrer par arrêté du 22 novembre 2004 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de M. A tendant à l'annulation de cette décision ministérielle et de ces arrêtés préfectoraux ;

Sur la légalité de la décision ministérielle du 3 juillet 2003 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter l'ensemble des moyens présentés par M. A dont la requête en appel ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation qu'il avait développée devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 29 juillet 2003 :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur : (...) la carte de séjour temporaire prévue à l'article 12 bis est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu l'asile territorial (...) ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 1er du décret du 23 juin 1998 pris pour l'application de la loi du 25 juillet 1952, la demande d'asile territorial vaut demande de titre de séjour ; qu'il résulte de ces dispositions que, sauf si le ressortissant étranger se prévaut lors du dépôt de sa demande d'asile territorial, d'une situation lui donnant vocation à entrer dans d'autres catégories ouvrant droit à la délivrance d'un titre de séjour, le préfet peut limiter l'examen de la demande de carte de séjour temporaire au droit de séjourner sur le territoire au titre de la protection de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 ;

Considérant que la demande de titre de séjour de M. A reposait uniquement sur la nécessité de se soustraire aux risques encourus dans son pays d'origine ; qu'en conséquence, le préfet de l'Isère n'était tenu de l'examiner qu'en fonction de la réalité de ces risques ; que les moyens tirés de la méconnaissance du 5° et du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que de l'absence de consultation de la commission de titre de séjour sont, par suite, inopérants ;

Considérant, il est vrai, que l'arrêté en litige emporte, subsidiairement, refus de délivrance d'un titre de séjour de régularisation ; que selon ses propres déclarations, les parents, deux frères et deux soeurs de M. A vivent en Algérie ; que si son père vit en réalité en France depuis plusieurs années, il n'établit pas avoir des liens d'une particulière intensité avec lui ; que l'intéressé n'invoquait, à la date de ladite décision, aucune circonstance particulière tirée de sa situation personnelle ; que, par suite, le préfet de l'Isère n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 22 novembre 2004 :

Considérant en premier lieu, que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de rejet de la demande d'asile prise par le ministre le 3 juillet 2003 à l'encontre du requérant est sans effet sur la légalité de la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien prise sur le fondement des stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : (...) Le certificat de résidence portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (... ) 7°) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens en l'absence de stipulations particulières de l'accord franco-algérien relatives à l'instruction de la demande : (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de la santé publique (...) émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; (...) / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi (...) ;

Considérant qu'il résulte des stipulations et dispositions précitées qu'il appartient à l'administration saisie d'une demande de délivrance de certificat de résidence reposant sur un motif sanitaire de s'assurer, avec l'assistance du médecin inspecteur de la santé publique qui, seul, peut avoir accès aux informations couvertes par le secret médical, des conséquences qu'un refus d'admission au séjour emporterait sur l'état de santé de l'intéressé et, le cas échéant, de démontrer qu'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays d'origine ;

Considérant qu'il est constant que la pathologie dont souffre M. A l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité si le traitement dont il bénéficie en France était interrompu ; qu'il soutient que les médicaments qui lui sont prescrits ne sont pas disponibles en Algérie ; que le préfet de l'Isère n'a produit de mémoire ni en première instance ni en appel ; qu'il y a lieu, en conséquence, de prescrire avant-dire-droit un supplément d'instruction afin qu'il produise des éléments relatifs à l'offre en Algérie des médicaments prescrits au requérant ou de molécules équivalentes ;

DECIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 22 novembre 2004, procédé à un supplément d'instruction afin que le préfet de l'Isère précise, dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt, si les médicaments prescrits en France à M. A ou des molécules équivalentes sont disponibles en Algérie.

Article 2 : Les conclusions relatives à la décision du 3 juillet 2003 portant refus d'asile territorial et à l'arrêté du 29 juillet 2003 portant refus de titre de séjour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Salah A, au préfet de l'Isère et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2009, où siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Chalhoub, président-assesseur,

Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2009.

''

''

''

''

5

N° 07LY01219

nv


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY01219
Date de la décision : 31/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : BOUMAZA

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-31;07ly01219 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award