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22/12/2009 | FRANCE | N°09LY01000

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 22 décembre 2009, 09LY01000


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 mai 2009, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901995 en date du 7 avril 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 2 avril 2009 par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. Kamel A ainsi que, par voie de conséquence, ses décisions distinctes du même jour fixant le pays à destination duquel cette mesure de police serait exécut

e et décidant du placement en rétention administrative de l'intéressé ;

2°) de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 mai 2009, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901995 en date du 7 avril 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 2 avril 2009 par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. Kamel A ainsi que, par voie de conséquence, ses décisions distinctes du même jour fixant le pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée et décidant du placement en rétention administrative de l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 1 000 euros à verser à l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement attaqué a méconnu la portée et les effets des dispositions du 2° du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le premier juge a commis une erreur manifeste d'appréciation des incidences des décisions litigieuses sur la situation personnelle de M. A, dès lors que ce dernier ne pouvait justifier d'une vie privée et familiale réelle et continue sur le territoire national ; qu'ainsi, son arrêté de reconduite à la frontière n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 novembre 2009, présenté pour M. Kamel A, domicilié chez Mlle Akima A et M. B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) de rejeter le recours du PREFET DU RHONE ;

2°) d'enjoindre au PREFET DU RHONE de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 15 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, à titre principal, que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 2 avril 2009 méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; à titre subsidiaire, que cette mesure d'éloignement est entachée d'un défaut de base légale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2009 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- les observations de Me Matari, avocat de M. A ;

- les conclusions de M. Reynoird , rapporteur public ;

- la parole ayant été donnée à nouveau à la partie présente :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que, si M. A, arrivé sur le territoire national à l'âge d'un an, a été scolarisé et a vécu jusqu'en 1997 sur le territoire français, où résident régulièrement ses parents ainsi que ses frères et soeurs, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a séjourné en Algérie de 1997 à 2006, date à laquelle il est revenu en France ; qu'âgé de 38 ans à la date de la décision contestée, il est célibataire et sans enfant ; qu'il ne démontre pas avoir engagé des démarches pour revenir sur le territoire français avant 2006, ni même s'être particulièrement inséré dans la société française depuis son retour ; qu'il n'établit pas ne pas disposer d'une autonomie suffisante pour lui permettre de mener une vie normale en Algérie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour de M. A en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, pour ce motif, l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. A ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A devant le Tribunal administratif et la Cour ;

Considérant qu'aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...). et qu'aux termes de l'article L. 311-4 du même code : La détention d'un récépissé d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, d'un récépissé d'une demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité algérienne, est entré régulièrement en France pour la dernière fois, le 3 juin 2006, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour valable trente jours ; qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour au cours de la période de validité de son visa d'entrée sur le territoire français et s'est vu délivrer par le préfet de l'Ardèche, le 3 juillet 2006, un récépissé de dépôt de demande de titre de séjour l'autorisant à séjourner provisoirement sur le territoire français, en application des dispositions précitées de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, M. A ne saurait être regardé comme s'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire national au-delà de la durée de validité de son visa ; que, par suite, il n'était pas au nombre des étrangers mentionnés au 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour lesquels le préfet peut décider la reconduite à la frontière ; qu'en conséquence, le PREFET DU RHONE ne pouvait pas légalement se fonder sur ces dispositions pour prendre l'arrêté de reconduite à la frontière du 2 avril 2009 litigieux ; que cette mesure d'éloignement est, en conséquence, entachée d'un défaut de base légale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé ledit arrêté ainsi que, par voie de conséquence, ses décisions distinctes du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et décidant du placement en rétention administrative de l'intéressé ;

Sur les conclusions du PREFET DU RHONE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit du PREFET DU RHONE, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions de M. A aux fins d'injonction :

Considérant que dans son article 2, le jugement attaqué du Tribunal administratif de Lyon a enjoint au PREFET DU RHONE de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois suivant la notification dudit jugement ; qu'ainsi, les conclusions de M. A, présentées par la voie de l'appel incident, tendant à ce qu'une telle injonction soit prononcée sont dépourvues d'objet et, par suite, irrecevables ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat quelque somme que ce soit au profit du conseil de M. A, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU RHONE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A aux fins d'injonction et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à M. Kamel A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09LY01000
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-22;09ly01000 ?
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