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22/12/2009 | FRANCE | N°09LY00999

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 22 décembre 2009, 09LY00999


Vu la requête, enregistrée greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 mai 2009, présenté pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902124 en date du 10 avril 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 7 avril 2009 décidant la reconduite à la frontière de M. A, de nationalité angolaise, ensemble les décisions fixant le pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée et prononçant le placement en rétention admin

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2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal admin...

Vu la requête, enregistrée greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 mai 2009, présenté pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902124 en date du 10 avril 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 7 avril 2009 décidant la reconduite à la frontière de M. A, de nationalité angolaise, ensemble les décisions fixant le pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée et prononçant le placement en rétention administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que son recours est recevable ; que le premier juge a commis une erreur de fait et une erreur de droit en relevant le caractère nouveau des pièces produites par M. A ; que le jugement contesté méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne considérant pas la demande de M. A comme abusive ou dilatoire ; que M. A ne peut invoquer le bénéfice d'un droit à se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour Nationale du Droit d'Asile se soit prononcée sur la requête dirigée à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 24 novembre 2008, alors que sa demande de délivrance de titre de séjour est abusive ou dilatoire au sens des dispositions susmentionnées du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré par télécopie le 29 juillet 2009 à la Cour et régularisé le 3 août 2009 et le mémoire récapitulatif enregistré par télécopie le 27 octobre 2009 à la Cour et régularisé le 30 octobre 2009, présentés pour M. Claudio A, qui conclut au rejet du recours et demande la mise à la charge de l'Etat de la somme de 800 euros, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que sa demande de réexamen de sa demande d'asile ne constitue pas un recours abusif ou dilatoire en raison de la production d'éléments nouveaux ; que le préfet du Rhône, par l'arrêté attaqué, a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

Vu la décision en date du 17 novembre 2009 accordant l'aide juridictionnelle totale à M. Claudio A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2009 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne. (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le PREFET DU RHONE a notifié un refus d'admission provisoire au séjour à M. A, de nationalité angolaise et entré en France le 20 décembre 2002, après le rejet de sa demande d'admission au statut de réfugié par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 septembre 2003 et du 9 août 2005, confirmée par deux décisions de la Commission des recours des réfugiés des 6 avril 2004 et 20 février 2006 ; que, pour justifier sa demande de nouveau titre de séjour effectuée en vue de saisir l'OFPRA d'une demande de réexamen de son dossier, M. A, produit un certificat de décès d'une personne qu'il présente comme son épouse, en date du 18 juillet 2007, ainsi qu'un courrier de son frère du 21 octobre 2007, l'informant du décès de sa mère et des risques encourus par l'intéressé en cas de retour en Angola ; que, toutefois, les éléments produits par l'intéressé, compte tenu de leur caractère peu probant et contradictoire, ne permettent pas d'être regardés comme nouveaux ; qu'au surplus, l'OFPRA, par une décision en date du 24 novembre 2008 antérieure à l'arrêté attaqué, a estimé que ces pièces ne permettent pas d'établir la réalité des faits nouveaux invoqués et le bien-fondé des craintes énoncées ; que, dès lors, cette demande relevait des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, contrairement à ce que soutient M. A, il appartenait au PREFET DU RHONE d'apprécier, sous le contrôle du juge, l'authenticité et le caractère probant des documents produits afin de déterminer si la demande de l'intéressé tendant au réexamen de son statut de réfugié avait un caractère abusif ou dilatoire ; que, dans ces conditions, le PREFET DU RHONE a pu, sans méconnaître les dispositions précitées du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, décider la reconduite à la frontière de l'intéressé par une décision du 7 avril 2009 ; que, par suite, le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 7 avril 2009 au motif que celui-ci aurait privé M. A de la possibilité de se maintenir en France jusqu'à la décision de la Commission des recours des réfugiés ; que, le jugement attaqué doit, par suite, être annulé ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au magistrat désigné, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A tant devant la Cour de céans que devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Sur l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 2008-2949 du 9 juin 2008, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Rhône le même jour, M. Jacques B, PREFET DU RHONE, a donné à M. René C, secrétaire général de préfecture, délégation pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs énoncés ci-avant, M. A n'est pas fondé à soutenir que le PREFET DU RHONE a commis une erreur de fait, une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en refusant l'admission provisoire au séjour de l'intéressé en qualité de demandeur d'asile au regard de sa situation personnelle ;

Sur la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que par l'arrêté n° 2008-2949 du 9 juin 2008 susmentionné, M. René C, secrétaire général de préfecture, a reçu délégation pour signer les décisions fixant le pays de destination pour les étrangers en situation irrégulière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité de la décision ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que M. A soutient qu'il a été accusé de transporter du matériel illicite pour le compte du Front de Libération de l'Enclave de Cabinda (FLEC) et qu'il a fait l'objet d'une arrestation arbitraire de la part des autorités angolaises l'obligeant à fuir son pays ; qu'il fait état du décès de sa femme intervenu le 17 juillet 2007 suite à des brutalités commises par les autorités et qui est relaté dans deux courriers des 21 octobre 2007 et 26 août 2009 ; que, toutefois, ces pièces, au demeurant contradictoires et peu circonstanciées, ne permettent pas d'établir le bien-fondé des risques personnellement encourus par l'intéressé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être rejetés ;

Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes motifs énoncés ci-dessus, M. A n'est pas davantage fondé à soutenir que le PREFET DU RHONE a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle ;

Sur la décision distincte de placement en rétention administrative :

Considérant, en premier lieu, que par l'arrêté n° 2008-2949 du 9 juin 2008 susmentionné, M. René C, secrétaire général de préfecture, a reçu délégation pour signer les décisions ordonnant le placement en rétention administrative des étrangers en situation irrégulière ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision ordonnant son placement en rétention administrative, de l'illégalité de la décision ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 avril 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 7 avril 2009 décidant la reconduite à la frontière de M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner M. A à verser à l'Etat une somme quelconque au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que les conclusions de l'intéressé qui succombe dans l'instance, tendant à ce que son conseil puisse bénéficier des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902124 du 10 avril 2009 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 4 : Les conclusions du PREFET DU RHONE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à M. Claudio A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.

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N° 09LY00999

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09LY00999
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-22;09ly00999 ?
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