La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/12/2009 | FRANCE | N°09LY00824

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 22 décembre 2009, 09LY00824


Vu I, sous le n° 09LY00824, le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 15 avril 2009, présenté pour LE PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901828 en date du 27 mars 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 24 mars 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A, de nationalité marocaine, ainsi que, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite

;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administr...

Vu I, sous le n° 09LY00824, le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 15 avril 2009, présenté pour LE PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901828 en date du 27 mars 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 24 mars 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A, de nationalité marocaine, ainsi que, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à sa charge la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il pouvait valablement prendre son arrêté de reconduite à la frontière sur le fondement du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le premier juge a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des incidences de la mesure d'éloignement sur la vie privée et familiale de Mme A et qu'il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 26 mai 2009, présentée pour Mme A, qui conclut au rejet du recours et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Elle soutient qu'une autorisation provisoire de séjour lui a été délivrée postérieurement au jugement du Tribunal administratif de Lyon le 27 mars 2009 ; que l'appel du PREFET DU RHONE sera déclaré irrecevable ; que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son état de santé nécessite la poursuite de soins en France pour une durée minimale de six mois et que le PREFET DU RHONE a méconnu les dispositions du 10 de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision fixant le pays de destination a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 juillet 2009, présenté par le PREFET DU RHONE, qui maintient les conclusions de son recours, et soutient que l'autorisation provisoire de séjour délivrée à l'intéressée n'a été prise qu'en exécution du jugement attaqué ; que son arrêté litigieux n'a pas méconnu les articles 3 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu II, sous le n° 09LY00825, le recours, enregistré le 15 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon, présenté pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 0901828, en date du 27 mars 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé pour excès de pouvoir son arrêté préfectoral de reconduite à la frontière en date du 24 mars 2009 et sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

Le PREFET DU RHONE reprend les moyens présentés ci-dessus dans son recours en annulation du jugement n° 0901828 en date du 27 mars 2009 ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mai 2009, présentée pour Mme A, qui conclut au rejet du recours et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Mme A reprend les mêmes moyens présentés dans son mémoire en réponse contre le recours en annulation du jugement n° 0901828 en date du 27 mars 2009 ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 juillet 2009, présenté par le PREFET DU RHONE, qui reprend ses observations déjà présentées par mémoire du même jour dans le cadre du recours enregistré sous le n° 09LY00824 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la décision, en date du 20 juillet 2009, accordant l'aide juridictionnelle à Mme A dans l'instance n° 09lY00824, et celle, de la même date, rejetant sa demande faisant doublon avec la précédente affaire dans l'instance n° 09LY00825 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2009 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- les observations de Me Robin, avocat de Mme A ;

- les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à la partie présente ;

Considérant que les recours du PREFET DU RHONE enregistrés sous les n°s 09LY00824 et 09LY00825 sont dirigés contre un même jugement et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur le requête n° 09LY00824 :

Considérant qu'aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière, dans les cas suivants : : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité marocaine, est entrée régulièrement en France et s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 24 mars 2009, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 2° du II de l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; et qu'aux termes de l'article 3 de cette même convention : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que Mme A, ressortissante marocaine, est entrée régulièrement en France le 15 septembre 2006 en sa qualité de conjointe d'un Français, M. B qu'elle a épousé le 16 août 2005 ; qu'elle s'est séparée de celui-ci en octobre 2007 ; qu'elle réside chez son oncle paternel ; que son divorce a été prononcé le 24 mars 2009 ; qu'ainsi il n'existe plus de communauté de vie entre M. B et Mme A ; que, toutefois, si Mme A a conservé des attaches familiales avec son pays d'origine, où résident ses parents et ses frères et soeurs, il résulte de l'instruction, en particulier, du témoignage de la tante de l'intéressée qui a été auditionnée en première instance et qui a convaincu le magistrat désigné par le président du tribunal administratif, témoignage qui est corroboré par l'analyse sociologique du milieu dans lequel Mme A serait nécessairement replongée en cas de retour dans son pays d'origine, tel qu'il est précisément décrit par son conseil devant la Cour, que celle-ci risque de subir un nouveau mariage forcé l'exposant à un risque de viol la privant de son droit de disposer de son propre corps et par suite, à un traitement dégradant, compte tenu de son âge, au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, dans ces circonstances très particulières du dossier, le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a estimé que l'arrêté attaqué portant reconduite à la frontière de Mme A et la décision distincte fixant le pays à destination duquel cette mesure de police serait exécutée étaient entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa vie privée ; que la requête du PREFET DU RHONE, doit, en conséquence, pour ce motif, être rejetée ;

En ce qui concerne les conclusions présentées par les parties au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que le PREFET DU RHONE, qui succombe dans les instances, puisse obtenir le remboursement des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser 800 euros au conseil de Mme C sur le fondement de ces mêmes dispositions, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Sur le requête n° 09LY00825 :

Considérant que, le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement n° 0901828 du Tribunal administratif de Lyon en date du 27 mars 2009, les conclusions principales de la requête n° 09LY00825 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 09LY00824 du PREFET DU RHONE est rejetée.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser 800 euros au conseil de Mme Samira A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l' Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions principales de la requête n° 09LY00825 du PREFET DU RHONE.

Article 4 : Les conclusions présentées par le PREFET DU RHONE, dans les deux instances, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à Mme Samira A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.

''

''

''

''

1

4

N°s 09LY00824...

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09LY00824
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-22;09ly00824 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award