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22/12/2009 | FRANCE | N°07LY02018

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 22 décembre 2009, 07LY02018


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2007, présentée pour M. Michel A, domicilié ... et pour Mme Mireille B, domiciliée ...;

Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505440 en date du 21 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Rhône-Alpes du 5 septembre 2005 approuvant la révision n° 1 de la zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP) de la commune d'Yvoire;

2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;<

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3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la commune d'Yvoire, le versement ...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2007, présentée pour M. Michel A, domicilié ... et pour Mme Mireille B, domiciliée ...;

Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505440 en date du 21 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Rhône-Alpes du 5 septembre 2005 approuvant la révision n° 1 de la zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP) de la commune d'Yvoire;

2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la commune d'Yvoire, le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les requérants soutiennent que l'arrêté litigieux est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ; que le projet soumis à l'enquête publique a été modifié avant d'être transmis à la commission régionale du patrimoine et des sites ; que la procédure de révision a été conduite par un groupe de travail qui a siégé dans des conditions irrégulières ; que le rapport de présentation ne répond pas aux prescriptions de l'article 3 du décret du 25 avril 1984 ; que l'institution d'une zone non aedificandi aux lieux-dit Aux Terroz et Chez Girard est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'une ZPPAUP ne peut légalement créer une servitude d'inconstructibilité, qu'en tout état de cause, cette servitude n'est pas justifiée par un objectif de protection ; que la délimitation de la zone non aedificandi est entachée de détournement de pouvoir ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en intervention, enregistré le 28 mars 2008, présenté pour la commune d'Yvoire qui demande à la Cour :

- de rejeter la requête de M. A et de Mme B ;

- d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 741-2 du code de justice administrative la suppression du titre IV de la requête qui présente un caractère injurieux et diffamatoire ;

- de mettre à la charge des requérants le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que le projet n'a pas été modifié après l'enquête publique ; que les requérants n'indiquent pas en quoi le groupe de travail aurait fonctionné de manière irrégulière ; que le rapport de présentation est suffisant s'agissant d'une révision et non d'une élaboration initiale ; que le règlement d'une ZPPAUP peut légalement édicter une interdiction de construire ; que la servitude d'inconstructibilité est justifié par la nécessité de mettre en valeur les alentours des remparts ; qu'aucune preuve n'est apportée de l'existence d'un détournement de pouvoir ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2009, présenté par le ministre de la culture et de la communication qui conclut au rejet de la requête en se référant aux observations présentées par le préfet de région devant le tribunal administratif ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 novembre 2009, présenté pour M. A et Mme B qui confirment leurs précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 84-304 du 25 avril 1984 ;

Vu le code du patrimoine ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2009 :

- le rapport de M. Fontbonne, président-assesseur ;

- les observations de Me Fiat, avocat des requérants, et celles de Me Pianta, avocat de la commune d'Yvoire ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présente ;

Sur l'intervention de la commune d'Yvoire :

Considérant que la commune a intérêt au maintien d'une réglementation concernant son territoire ; que son intervention doit être admise ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la région Rhône-Alpes du 5 septembre 2005 :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 25 avril 1984 Lorsque la mise à l'étude d'un projet de zone est décidée par les conseils municipaux, l'étude est conduite sous l'autorité des maires ou, si les communes le demandent, du président d'un établissement public de coopération communale avec, dans ces deux cas, l'assistance de l'architecte des bâtiments de France (...) ; (...) Lorsque la mise à l'étude du projet est prescrite par arrêté du préfet de région, elle est conduite dans les conditions fixées à l'alinéa précédent si la commune le demande et, dans le cas contraire, par le préfet de département, assisté de l'architecte des bâtiments de France et en liaison avec les maires des communes. ;

Considérant, d'une part, qu'aucune disposition réglementaire n'a ainsi fixé de manière générale la composition que doit revêtir le groupe de travail ou comité d'experts chargé de conduire l'étude d'un projet de zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) ; qu'il n'est pas allégué que cette composition aurait été fixée pour le projet en cause par un arrêté municipal ou préfectoral ; que le moyen tiré de ce que le quorum n'était pas atteint au cours de plusieurs des 13 réunions qui ont été tenues, et qui n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions précitées du décret du 25 avril 1984 que l'architecte des bâtiments de France doit apporter son assistance au groupe de travail ; que l'étude d'une réglementation devant être édictée par l'Etat donnait au préfet et au sous-préfet, vocation à participer aux réunions dudit groupe de travail ; qu'ainsi le moyen tiré de la participation aux réunions d'étude de personnes étrangères ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4 du décret du 25 avril 1984 : Le projet est transmis aux conseils municipaux des communes intéressées, qui disposent de quatre mois pour donner leur avis. Celui-ci, passé ce délai, est réputé favorable. Le projet est ensuite transmis au préfet du département, qui le soumet à une enquête publique, puis l'adresse, avec son avis ainsi que les conclusions du commissaire enquêteur, au préfet de région. Celui-ci, après avoir le cas échéant modifié au vu de l'avis du préfet de département, des conclusions du commissaire enquêteur, des observations des conseils municipaux concernés et de l'avis de la commission régionale du patrimoine et des sites, le transmet pour accord aux conseils municipaux. Après avoir recueilli cet accord, le préfet de région crée la zone. ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de sa délibération du 8 mars 2005 que le conseil municipal d'Yvoire, a entendu, au vu des observations recueillies au cours de l'enquête, rendre un simple avis se bornant à faire la proposition de modifications limitées ne portant pas atteinte à l'économie générale du projet ; que le moyen tiré de ce que le projet a été modifié avant d'être soumis à la commission régionale du patrimoine et des sites, et que l'importance des modifications nécessitait une nouvelle enquête publique doit être écartée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 du décret du 25 avril 1984 : Le dossier du projet de zone comprend : 1°) Un rapport de présentation exposant les particularités historiques, géographiques, architecturales et urbaines de la zone ainsi que les raisons de sa création ; 2°) L'énoncé des règles générales et particulières qui lui sont applicables dans sa totalité ou dans certaines de ses parties en ce qui concerne la protection des paysages, l'architecture et l'urbanisme ; 3°) Un document graphique faisant apparaître les limites de la zone et, le cas échéant, des parties de zone soumises à des règles spécifiques ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de la lecture du rapport de présentation que s'il n'expose pas de manière exhaustive les particularités historiques, géographiques, architecturales et urbaines de la zone, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué s'agissant d'une révision n'opérant pas une refonte du projet mais tendant essentiellement à une extension du secteur inconstructible délimité lors de la création de la zone ; que, par suite, ledit rapport de présentation qui expose, par ailleurs, précisément les motifs de la révision ne peut être regardé comme insuffisant ;

Considérant, d'autre part, que le moyen tiré de ce que le rapport de présentation de la création initiale de la zone aurait été lui-même insuffisant est inopérant, l'arrêté préfectoral ayant institué la zone le 15 septembre 1987 étant devenu définitif ;

Considérant qu'il résulte de ce qu'il précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que l'inconstructibilité de certains secteurs est au nombre des prescriptions qui peuvent légalement être édictées dans une ZPPAUP sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 642-2 du code du patrimoine ; que cette inconstructibilité peut légalement s'appliquer à des secteurs ne présentant pas en eux-mêmes un intérêt particulier dans le but de préserver et mettre en valeur des vues sur le patrimoine protégé ; que les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que l'interdiction de construire édictée par l'arrêté attaqué est entachée d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, que s'il est vrai qu'en certains points du secteur concerné par l'extension de l'interdiction de construire, notamment à proximité de la RD 25, les perspectives visuelles sur les remparts du centre historique sont restreintes, la nouvelle zone inconstructible qui s'étend aussi jusqu'au pied des remparts et forme un ensemble homogène, doit permettre de bien distinguer, à partir de vues lointaines, le bourg médiéval de l'urbanisation alentour ; que sa délimitation n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, que les requérants font valoir que le plan d'occupation des sols (POS), approuvé en 1996, délimite sur le même secteur une zone UB ; que, d'une part, les prescriptions de la ZPPAUP qui constituent des servitudes d'utilité publique s'appliquent indépendamment des règles édictées par le POS, la disposition la plus sévère des deux réglementations étant opposable ; que, par suite, la seule circonstance que les prescriptions de la ZPPAUP édictant, en l'espèce, une interdiction de construire, ne sont pas en concordance avec les dispositions du POS en vigueur, est en elle-même sans influence sur sa légalité et ne procède pas d'une erreur de droit ; que, d'autre part, si l'édiction respective des deux réglementations ne doit pas toutefois reposer sur des faits matériellement inexacts et être entachée d'erreur d'appréciation, il ressort des pièces du dossier que les prescriptions de la ZPPAUP révisée ont été établies en 2001 dans un souci de protection du patrimoine auquel, tant la ZPPAUP initiale approuvée en 1987 que le POS approuvé en 1996, ne répondaient que partiellement ; que le POS édicté en 1996 a ainsi vocation à être modifié ou révisé ; que, par suite, s'agissant de deux réglementations à la finalité différente, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la prescription d'interdiction de construire en cause procède, au regard des dispositions du POS en vigueur, d'une erreur d'appréciation ;

Considérant, en quatrième lieu, que, pour soutenir que la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir, les requérants soutiennent qu'un secteur proche des remparts et du lac Léman, qui avait vocation à être placé en zone inconstructible ne l'a pas été, en relevant que plusieurs parcelles appartiennent à des membres du conseil municipal ou à leurs proches ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce secteur a constitué une zone inconstructible, dès la création de la ZPPAUP en 1987 et le demeure ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir lequel s'appuie sur des éléments manquant en fait, ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :

Considérant que les développements des requérants tendant à démontrer l'existence d'un détournement de pouvoir en analysant la localisation de terrains appartenant aux membres du conseil municipal ou à leurs proches, par rapport à la zone inconstructible, ne sont pas étrangers aux faits de la cause et n'excèdent pas le droit à la libre discussion ; qu'ils ne présentent pas un caractère injurieux ou diffamatoire ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu d'en ordonner la suppression par application des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative renvoyant à celles de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant que les conclusions de M. A et de Mme B tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'ils sont partie perdante ; que les conclusions de la commune d'Yvoire, qui n'est pas partie à l'instance, présentées sur le fondement des mêmes dispositions, doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la commune d'Yvoire est admise.

Article 2 : La requête de M. A et de Mme B est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A et de Mme B, et de la commune d'Yvoire tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel A, à Mme Mireille B, à la commune d'Yvoire et au ministre de la culture et de la communication.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Fontbonne, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.

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N° 07LY02018

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY02018
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Gérard FONTBONNE
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : CAILLAT DAY DREYFUS MEDINA FIAT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-22;07ly02018 ?
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