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26/11/2009 | FRANCE | N°08LY00077

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 26 novembre 2009, 08LY00077


Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2008, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL, représentée par son maire ;

La COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400024 du 18 octobre 2007 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de la société Asten, venant aux droits de la société SPAPA, et de la société Socotec à lui verser la somme de 92 523,13 euros en réparation des désordres affectant la crèche communale et, d'autre part, à la condamna

tion de la société Vent service à lui payer la somme de 19 602 euros à raison des...

Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2008, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL, représentée par son maire ;

La COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400024 du 18 octobre 2007 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de la société Asten, venant aux droits de la société SPAPA, et de la société Socotec à lui verser la somme de 92 523,13 euros en réparation des désordres affectant la crèche communale et, d'autre part, à la condamnation de la société Vent service à lui payer la somme de 19 602 euros à raison des désordres qu'elle a causés à l'ouvrage litigieux du fait de son intervention ;

2°) de condamner solidairement la société Asten et la société Socotec à lui verser la somme de 92 523,13 euros TTC et de condamner la société Vent service à lui verser la somme de 19 602 euros TTC ; d'assortir ces sommes des intérêts de droit et de la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de société Asten la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le jugement attaqué est entaché d'une dénaturation de ses conclusions et d'une omission à statuer dans la mesure où elle recherchait bien subsidiairement la responsabilité extracontractuelle des constructeurs ;

- que le marché passé pour la construction de la crèche communale n'est pas nul, une délibération autorisant la signature du marché ayant bien été adoptée ;

- que, subsidiairement, elle est fondée à obtenir réparation de son préjudice sur le fondement de l'enrichissement sans cause et sur le terrain quasi délictuel ; que, sur le premier fondement, les dépenses exposées par la collectivité pour la construction de la crèche ne lui ont pas été utiles dans leur totalité compte tenu des désordres affectant l'ouvrage ; que, sur le second terrain, l'entreprise SPAPA, aux droits de laquelle vient la société Asten, n'a pas respecté les règles de l'art et a donc commis une faute qui engage sa responsabilité ;

- que son action à l'encontre de M. A et à l'encontre de la société Socotec n'était pas prescrite, les constructeurs ayant, à plusieurs reprises, reconnu leur responsabilité en acceptant d'intervenir sur l'ouvrage ; que, subsidiairement, en cas de nullité du marché, la responsabilité de ces constructeurs peut être recherchée sur le terrain extracontractuel ;

- qu'elle est fondée à rechercher la responsabilité décennale de la société Vent service, dont l'intervention a fragilisé l'ouvrage litigieux ;

- qu'elle doit être indemnisée de son préjudice lié aux frais de réparation mais aussi de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2008, présenté pour M. A qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à la condamnation de la COMMUNE DE SAINT-GENIS- LAVAL à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; subsidiairement, il conclut à la condamnation de la société Asten, de la société Socotec et de la société Vent service à le relever et garantir de toute condamnation, à hauteur de 90 pour-cent au minimum, et à ce que la somme demandée ne soit pas accordée en totalité pour tenir compte de la nécessité de refaire l'étanchéité tous les dix ans ;

Il soutient :

- que la prescription décennale est acquise en ce qui le concerne, dans la mesure où il n'a effectué aucune intervention depuis la réception sans réserves des travaux jusqu'à sa mise en cause par la commune, douze ans plus tard ; que la responsabilité contractuelle ne peut plus être recherchée du fait de la réception sans réserves ;

- que la requérante ne prouve pas la nullité du marché litigieux ; qu'en tout état de cause, le fondement de l'enrichissement sans cause est nouveau en appel et les prestations qu'il a effectuées ont été utiles à la commune ;

- subsidiairement, que les sommes demandées par la requérante ne correspondent pas au préjudice subi du fait des désordres litigieux ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 juillet 2008, présenté pour la société Socotec qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête, subsidiairement, à ce que la somme demandée par la commune requérante soit réduite en tenant compte d'un coefficient de vétusté et, très subsidiairement, à la condamnation de M. A, de la société Asten et de la société Vent service à la relever et garantir de toute condamnation ; elle conclut en tout état de cause à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL ou de toute partie perdante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le maire n'a pas qualité pour agir au nom de la commune ;

- que la prescription décennale est acquise en ce qui le concerne, dans la mesure où elle n'a effectué aucune intervention depuis la réception sans réserves des travaux jusqu'à sa mise en cause par la commune dans le cadre des opérations d'expertise, plus de dix ans plus tard ;

- subsidiairement, que les désordres litigieux étaient apparents au jour de la réception ; que lesdits désordres ne sont pas imputables à son action ; qu'elle n'a commis aucun manquement à sa mission de contrôle technique ; que les sommes demandées par la requérante doivent, en tout état de cause, être réduites par application d'un coefficient de vétusté ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 septembre 2009, présenté pour la société Asten, qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la condamnation de M. A, de la société Socotec, de la société Vent service et de la société Forbeton, à la relever et garantir de toute condamnation et, en tout état de cause, à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le marché de travaux publics litigieux est nul ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à invoquer la garantie décennale ; qu'en tout état de cause, les vices étaient apparents ;

- que ne s'étant pas appauvrie la commune requérante n'est pas fondée à invoquer l'enrichissement sans cause des constructeurs ;

- qu'elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ; les seuls manquements invoqués étant la non-conformité à des obligations contractuelles, ils ne sont pas de nature à engager sa responsabilité quasi délictuelle ;

- qu'en tout état de cause, il y a lieu d'appliquer un coefficient de vétusté aux indemnités réclamées par la commune ; qu'une partie de la somme demandée correspond en réalité aux dépens de l'instance qui ne peuvent être compris dans l'appréciation du préjudice ;

- subsidiairement qu'elle doit être relevée et garantie de toute condamnation par M. A et la société Socotec, ainsi que par la société Vent service et son sous-traitant, M. B;

Vu le mémoire, enregistré le 9 octobre 2009, présenté pour la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL, par lequel elle conclut aux mêmes fins que dans sa requête susvisée par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 octobre 2009, présenté pour M. A, par lequel il conclut aux mêmes fins que dans son mémoire susvisé par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2009 :

- le rapport de Mme Vinet, conseiller,

- les observations de Me Lacoste pour la COMMUNE DE SAINT-GENIS LAVAL, de Me Vacheron pour la société Asten, de Me Prudon pour M. A et de Me Bovier pour la société Socotec,

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public,

la parole ayant été à nouveau donnée aux avocats présents ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée à la requête :

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, dans le jugement attaqué, le tribunal administratif a considéré que la commune invoquait son appauvrissement sans cause résultant du paiement des travaux ; qu'il a indiqué que la seule circonstance qu'elle a payé les travaux n'a pas créé d'obligations contractuelles et n'autorisait pas l'engagement de la responsabilité décennale ; que le tribunal administratif a, par ailleurs, estimé qu'elle n'invoquait ni l'enrichissement sans cause, ni la répétition de l'indu ; que, ce faisant, il a répondu aux conclusions de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL telles qu'elles étaient présentées, notamment sans son dernier mémoire produit devant lui, et n'a commis ni omission à statuer ni dénaturation des pièces du dossier ;

Sur le fond :

S'agissant des conclusions dirigées contre la société Asten, venant aux droits de la société SPAPA :

Considérant qu'en 1992, la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL a décidé la construction d'une crèche ; qu'à cette fin, elle a délégué la maîtrise d'ouvrage à la Société d'équipement du Rhône et de Lyon (SERL) par contrat du 1er juin 1992 ; que par un marché en date du 11 février 1993, la maîtrise d'oeuvre a été confiée par la SERL à M. A, architecte ; que le contrôle technique a été confié à la société Socotec, tandis qu'un marché était passé le 24 mai 1993 entre la SERL et la société SPAPA, aux droits de laquelle vient la société Asten, pour la réalisation des travaux d'étanchéité ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour rejeter les conclusions de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL présentées sur le fondement de la garantie décennale, le tribunal administratif lui a opposé la nullité du contrat passé entre la commune et la société SPAPA, faute pour le maire d'avoir été autorisé à contracter ; qu'il résulte, par ailleurs, de l'instruction, notamment de la délibération en date du 26 mars 1992 produite pour la première fois en appel, que le conseil municipal de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL a autorisé son maire à signer le contrat de délégation de maîtrise d'ouvrage avec la SERL antérieurement à la passation du marché en litige ; qu'ainsi, c'est régulièrement que la SERL a passé ce marché avec la société SPAPA ;

Considérant toutefois que la réception des travaux a été prononcée le 15 avril 1994 avec effet au 20 janvier 1994 ; que, postérieurement à cette réception, des infiltrations ont été constatées dans le bâtiment devant accueillir la crèche, qui ont conduit à des interventions de la société SPAPA pour tenter, en vain, d'y remédier ; que s'il résulte de l'instruction que ces désordres sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination, il résulte notamment du rapport d'expertise, qu'ils étaient apparents au jour de la réception de l'ouvrage, la non-conformité des travaux aux prescriptions du cahier des clauses techniques particulières et aux documents techniques unifiés ayant été apparente et rendant prévisibles lesdits désordres dans toute leur étendue ; que, par suite, les conditions de mise en oeuvre des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ne sont pas réunies ;

S'agissant des conclusions dirigées contre M. A et la société Socotec :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que plus de dix ans se sont écoulés entre la réception des travaux litigieux et la mise en cause de M. A et de la société Socotec au titre des désordres dont la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL demande réparation, sans que ces derniers ne soient jamais intervenus pour tenter de remédier auxdits désordres ; qu'il suit de là que, comme le soutiennent M. A et la société Socotec, la commune n'est pas fondée à demander leur condamnation sur le fondement de la garantie décennale, dont le délai est expiré ;

S'agissant des conclusions dirigées contre la société Vent service :

Considérant que s'il résulte de l'instruction qu'en 1997, la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL a fait appel à la société Vent service pour la création d'aérations supplémentaires dans la terrasse, elle se borne, en appel, à produire une facture qui ne saurait être de nature à établir l'existence d'un marché régulier passé avec la société Vent services et alors que le tribunal administratif a relevé l'absence de production du marché passé entre la commune et cette société ; qu'il suit de là que, pas plus en appel qu'en première instance, la requérante ne produit les éléments permettant au juge de se prononcer sur ses conclusions tendant à la condamnation de la société Vent service sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1790 et 2270 du code civil ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAINT-GENIS- LAVAL n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions aux fins de condamnation des constructeurs ;

Sur les conclusions de M. A tendant à la condamnation de la requérante à lui verser des dommages-intérêts pour procédure abusive :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la demande de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL présenterait un caractère abusif ; qu'ainsi, les conclusions susvisées tendant à la condamnation de la commune à verser des dommages et intérêts à ce titre doivent être, en tout état de cause, rejetées ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL à verser à la société Asten, à M. A et à la société Socotec, la somme de 1 500 euros chacun au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Asten, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. A tendant à la condamnation de la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL à lui verser la somme de 2 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive sont rejetées.

Article 3 : La COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL versera la somme de 1 500 euros à la société Asten, ainsi qu'à M. A et à la société Socotec au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SAINT-GENIS-LAVAL, à la société Asten, venant aux droits de la société SPAPA, à M. Jean A, à la société Socotec, à la société Vent service et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2009, où siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Chalhoub, président assesseur,

Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2009.

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N° 08LY00077

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00077
Date de la décision : 26/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SELARL ADAMAS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-11-26;08ly00077 ?
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