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26/11/2009 | FRANCE | N°07LY02213

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 26 novembre 2009, 07LY02213


Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2007 sous le n° 07LY02213, présentée pour le PREFET DU RHONE, PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605003 du 20 août 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, sur requête de Mme Yamina A, annulé les décisions du 28 mars et du 20 juin 2006 refusant à l'intéressée la délivrance d'un certificat de résidence vie privée et familiale et rejetant son recours gracieux, puis ordonné la délivrance dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugemen

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2°) de condamner Mme A à verser à l'Etat...

Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2007 sous le n° 07LY02213, présentée pour le PREFET DU RHONE, PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605003 du 20 août 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, sur requête de Mme Yamina A, annulé les décisions du 28 mars et du 20 juin 2006 refusant à l'intéressée la délivrance d'un certificat de résidence vie privée et familiale et rejetant son recours gracieux, puis ordonné la délivrance dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement d'un certificat de résidence d'un an ;

2°) de condamner Mme A à verser à l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de l'atteinte à la vie privée et familiale de Mme A ; que les juges n'ont pas rappelé les conditions de l'entrée et du séjour de l'intéressée et le but poursuivi par elle, alors qu'elle est entrée en France au bénéfice du regroupement familial demandé par son époux dont elle est séparée ; qu'elle est arrivée sur le territoire français en 2003 après être restée séparée de ses parents pendant de nombreuses années et deux ans après que l'état de santé de son père se fut dégradé ; que c'est sans preuve à l'appui que le jugement considère que l'intéressée s'occupe effectivement de ses parents ; que les juges n'ont pas apprécié le caractère indispensable de la présence de Mme A auprès de ses parents qu'il incombait à l'intéressée de démontrer ; que les juges ont méconnu la jurisprudence constante du Conseil d'Etat qui considère que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être utilement invoqué lorsque l'intéressée dispose encore de liens familiaux dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 5 juin 2008, le mémoire en défense présenté pour Mme A, domiciliée ..., qui demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du PREFET DU RHONE et de confirmer le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 20 août 2007, annulant les décisions du préfet du 28 mars et du 20 juin 2006 ;

2°) de constater qu'elle est actuellement bénéficiaire d'un certificat de résidence temporaire mention vie privée et familiale délivré en exécution du jugement du 20 août 2007 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A soutient qu'elle a rendu régulièrement visite à ses parents sous couvert de visas, ce qu'elle a fait en particulier courant 2001 afin d'assister son père malade ; qu'en renouvelant ses visites en 2002 et 2003 elle a fait la connaissance de son futur époux, qui a déposé à son bénéfice une demande de regroupement familial ; qu'elle ne s'est jamais maintenue irrégulièrement sur le territoire français ; que revenue régulièrement en France le 14 novembre 2003, elle a sollicité la prolongation de son visa au regard des circonstances humaines et particulières de ses deux parents ; qu'elle a établi la nécessité et le caractère indispensable de sa présence auprès de ses parents ; qu'elle a abandonné l'emploi qu'elle occupait en Algérie depuis 1980 pour s'occuper de ses parents ; qu'elle a démontré que son frère, qui réside à Roubaix où il est installé avec son épouse et ses quatre enfants ne peut prendre en charge ni soutenir leurs parents ; que ces derniers ont tenté de s'établir en Algérie où ils ne peuvent néanmoins accéder aux traitements appropriés ; qu'en opposant à sa demande de prolongation de visa l'absence de visa de long séjour le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation, a méconnu les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; que le préfet dans sa requête devant la Cour ne conteste pas que l'état de santé de ses parents nécessite l'aide d'une tierce personne ou d'une infirmière ;

Vu, enregistré le 18 septembre 2008, le nouveau mémoire présenté pour le PREFET DU RHONE, PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 23 octobre 2009, le mémoire complémentaire présenté pour Mme A, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2009 :

- le rapport de Mme Schmerber, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DU RHONE relève appel du jugement du 20 août 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions des 28 mars et 20 juin 2006 refusant à Mme Yamina A, de nationalité algérienne, la délivrance d'un certificat de résidence vie privée et familiale et rejetant le recours gracieux de l'intéressée, puis ordonné la délivrance dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement d'un certificat de résidence d'un an ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit (...) 5°) Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles ouvrant droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux avec la France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant que Mme A, en instance de divorce après une union de courte durée et sans enfant, n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie, où vivent six de ses frères et soeurs et où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de quarante-six ans, même s'il est constant qu'elle a effectué plusieurs séjours en France ; qu'elle est entrée sur le territoire français le 14 novembre 2003 et s'y est maintenue irrégulièrement après l'expiration du délai de validité de son visa le 6 décembre 2003 ;

Considérant que, pour annuler les décisions du PREFET DU RHONE en date du 28 mars et du 20 juin 2006, le Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur l'utilité de la présence de Mme A auprès de ses parents âgés et malades ; qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que tant le père - décédé en cours d'instance - que la mère de Mme A, tous deux en situation régulière, étaient affectés de pathologies suffisamment graves pour nécessiter une assistance ; que, toutefois, Mme A ne démontre pas que sa présence en France aux côtés de ses parents s'avérerait indispensable et notamment qu'elle serait le seul membre de la famille à pouvoir les aider ; qu'il ressort en particulier des pièces du dossier que réside également en France un frère de la requérante, dont il n'est pas établi par la seule production d'une attestation sur l'honneur qu'il serait dans l'impossibilité, eu égard à sa situation professionnelle et familiale, de se rapprocher de ses parents et de leur apporter l'assistance qui leur est indispensable ;

Considérant que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des conditions et de la durée du séjour de Mme A en France, le PREFET DU RHONE, en refusant à l'intéressée la délivrance du certificat de résidence sollicité, n'a pas fait, malgré la situation difficile de ses parents, une inexacte application des stipulations de l'article 6-5° précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que le PREFET DU RHONE est en conséquence fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a retenu un tel moyen pour annuler ses décisions des 28 mars et 20 juin 2006 ;

Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A tant en première instance qu'en appel ;

Considérant, en premier lieu, que si Mme A fait valoir devant les premiers juges que la décision du 28 mars 2006 serait entachée d'une erreur de droit, il ressort des termes mêmes de cette décision que le PREFET DU RHONE ne s'est pas fondé sur le motif tiré de l'absence de visa de long séjour pour refuser de faire droit à la demande de délivrance d'un certificat de résidence mention vie privée et familiale sur le fondement des stipulations précitées de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien ; que si la décision mentionne l'absence de justification d'un tel visa, ce n'est que pour écarter l'admission au séjour de l'intéressée sur le fondement d'autres stipulations dudit accord, qu'elle n'avait pas invoquées et au regard desquelles le PREFET DU RHONE a examiné à titre subsidiaire la situation de Mme A ;

Considérant, en second lieu, que si Mme A invoque la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le PREFET DU RHONE, pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ses décisions ont été prises ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions des 28 mars et 20 juin 2006, et lui a enjoint de délivrer à Mme A un certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du PREFET DU RHONE tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 20 août 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A et par le PREFET DU RHONE tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à Mme Yamina A. Copie en sera adressée au PREFET DU RHONE, PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Chalhoub, président-assesseur,

Mme Schmerber, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2009.

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N° 07LY02213

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY02213
Date de la décision : 26/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Cathy SCHMERBER
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-11-26;07ly02213 ?
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