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22/10/2009 | FRANCE | N°08LY01476

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 22 octobre 2009, 08LY01476


Vu la requête enregistrée le 27 juin 2008, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800968 du 13 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, premièrement, a annulé la décision en date du 18 octobre 2007 par laquelle il a refusé de délivrer à Mlle Mercy A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale en qualité d'étranger malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a prescrit son éloignement à destination du pays

dont elle a la nationalité, et, deuxièmement, lui a enjoint de délivrer à Mlle ...

Vu la requête enregistrée le 27 juin 2008, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800968 du 13 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, premièrement, a annulé la décision en date du 18 octobre 2007 par laquelle il a refusé de délivrer à Mlle Mercy A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale en qualité d'étranger malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a prescrit son éloignement à destination du pays dont elle a la nationalité, et, deuxièmement, lui a enjoint de délivrer à Mlle A une carte de séjour temporaire vie privée et familiale dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le Tribunal ;

3°) de condamner Mlle A à verser à l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le PREFET DU RHONE soutient que la gravité de l'état de santé, en ce qu'il découlerait des risques de persécutions alléguées en Sierra Leone est démenti par les arrêts de la commission de recours des réfugiés et de la Cour administrative d'appel de Lyon rendus respectivement sur la demande d'admission de Mlle A au statut de réfugié et sur sa reconduite à la frontière ; que pour admettre l'absence d'accès effectifs aux soins adaptés en Sierra Leone, le Tribunal s'est fondé sur des documents officieux, dépourvus de valeur probante ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 1er octobre 2008, présenté pour Mlle Mercy A domiciliée ... ;

Mlle A conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de condamner l'Etat à verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à son conseil, sous réserve qu'il renonce à percevoir l'aide juridictionnelle ;

Mlle A soutient que la décision attaquée est entachée de vice de procédure dès lors que, contrairement à l'arrêté ministériel du 8 juillet 1999, l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ne se prononce pas sur la durée prévisible du traitement ; qu'il appartient à l'autorité qui oppose le refus d'admission au séjour d'établir l'accessibilité effective aux soins qui, en l'espèce, ne ressort pas de l'apposition d'une simple croix sur l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que la gravité de sa pathologie et l'absence de soins adaptés en Sierra Leone ressort des certificats qu'elle a produits dont l'un a été établi par un médecin agréé, ainsi que par les renseignements communiqués par les ONG, non démentis par l'administration ; que les risques qu'elle encourt en Sierra Leone rendent impossible une poursuite d'une vie privée et familiale normale dans ce pays ; que l'illégalité du refus de titre prive de base légale l'obligation de quitter le territoire et la désignation du pays de destination ;

Vu le mémoire enregistré le 3 novembre 2008 par lequel le PREFET DU RHONE conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 25 septembre 2009 par lequel Mlle A conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ; elle demande, en outre, à la Cour d'enjoindre au PREFET DU RHONE de délivrer à Mlle A une carte de séjour temporaire vie privée et familiale dans le délai de quinze jours suivant le présent arrêt et sous l'astreinte journalière de 50 euros ;

Vu la décision du 23 octobre 2008 par laquelle la section administrative d'appel du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Lyon a admis Mlle A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2009 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier-conseiller ;

- les observations de Me Vernet, avocat de Mme A ;

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Vernet ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) La carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de la santé publique (...) émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale ; -si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine (...) ;

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées, il appartient au préfet saisi d'une demande de carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade de s'assurer, par tous moyens et dans le respect du secret médical, que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique dont il entend s'approprier les motifs afin de fonder une décision de refus, repose sur des faits matériellement établis ; que lorsqu'est reconnue l'exceptionnelle gravité des conséquences d'une absence de soins sur l'état de santé du demandeur, l'accès effectif à des soins adaptés dans le pays d'origine, qui seul peut fonder un refus de titre, doit ressortir des données objectives sur l'équipement sanitaire du pays recueillies au cours de l'instruction de la demande ou, en cas de recours, au cours de l'instance contentieuse dès lors qu'elles décrivent la situation en vigueur à la date de la décision attaquée ;

Considérant que pour opposer à Mlle A, qui souffre d'une affection psychique dont l'absence de soins l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un accès effectif à des soins adaptés en Sierra Leone, le PREFET DU RHONE s'est borné à s'approprier la réponse exprimée sur le sujet par le médecin inspecteur de santé publique sous la forme d'une croix cochée dans le formulaire normalisé de l'avis ; qu'ainsi que l'a relevé le tribunal administratif, il ressort des attestations produites par Mlle A, que la Sierra Leone est démunie de tout équipement sanitaire et ne dispose pas de praticien spécialisé dans le traitement de l'affection dont souffre l'intéressée ; qu'en se bornant à suspecter l'objectivité des organismes qui ont délivré ces informations, le préfet n'établit pas qu'elles ne refléteraient pas la réalité de la situation sanitaire de l'Etat dont Mlle A est la ressortissante ;

Considérant qu'il suit de là que le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal a, d'une part, annulé sa décision du 18 octobre 2007 refusant de délivrer à Mlle A une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et prescrivant son éloignement à destination du pays dont elle a la nationalité et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mlle A une carte de séjour temporaire vie privée et familiale dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mlle A :

Considérant que le présent arrêt n'implique, de la part du PREFET DU RHONE, aucune mesure d'exécution qui n'ait déjà été prescrite par Tribunal ; que, par suite, les conclusions susmentionnées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions du PREFET DU RHONE doivent être rejetées ; que, d'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser une somme de 1 000 euros au conseil de Mlle A, sous réserve qu'il renonce à percevoir l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU RHONE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à Me Robin sous réserve qu'elle renonce à percevoir l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mlle A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à Mlle Mercy A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2009 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

M. Arbarétaz, premier-conseiller,

Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2009.

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N° 08LY01476

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01476
Date de la décision : 22/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-10-22;08ly01476 ?
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