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08/04/2009 | FRANCE | N°08LY00984

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 08 avril 2009, 08LY00984


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 28 avril 2008, présenté par le PREFET DE L'ISERE ;

LE PREFET DE L'ISERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800694, en date du 8 avril 2008, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé pour excès de pouvoir ses décisions en date du 16 janvier 2008 par lesquelles il a refusé à M. X la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé ;

2°) de rejeter la

demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la c...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 28 avril 2008, présenté par le PREFET DE L'ISERE ;

LE PREFET DE L'ISERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800694, en date du 8 avril 2008, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé pour excès de pouvoir ses décisions en date du 16 janvier 2008 par lesquelles il a refusé à M. X la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. X la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 2009 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant que si M. X, dont l'état de santé est fragile, est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminé dans le restauration depuis le 23 novembre 2005, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que l'intéressé, qui serait entré en France le 29 avril 2002, à l'âge de 22 ans, serait dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à son entrée en France en 2002, et ce, nonobstant le fait que ses parents seraient disparus depuis l'année 1997, ni qu'il entretiendrait une relation suffisamment stable et ancienne avec une ressortissante française, ni qu'il ne pourrait pas bénéficier du traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ; que, dès lors, c'est à tort que, pour annuler la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, les premiers juges se sont fondés sur ce que le PREFET DE L'ISERE a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa vie privée et familiale et sur son état de santé ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X devant le Tribunal administratif de Grenoble et devant la Cour administrative d'appel de Lyon ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que cette décision, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit (...) 7°/ A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) 11°/ A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat.

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment dans le cadre de l'examen du bien-fondé du motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Grenoble la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° et du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français est au nombre de celles pour lesquelles M. Barsacq, secrétaire général de la préfecture de l'Isère a reçu délégation de signature du préfet par arrêté n° 2008-00284 du 14 janvier 2008 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée de l'incompétence de son signataire ;

Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de titre , le moyen tiré, par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour sur laquelle elle se fonde, doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° et du 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; (...) ;

Considérant que, pour les motifs ci-avant indiqués et compte tenu du fait qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des avis du médecin inspecteur de la santé publique en date du 3 décembre 2007 et du 10 janvier 2008 que si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier du traitement approprié dans son pays d'origine, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants , est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, le moyen tiré, par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision fixant le pays de destination serait illégale, en conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sur lesquelles elle se fonde, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour, la décision fixant le pays de destination n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que M. X, dont la demande de réexamen de sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 11 juin 2004, confirmée par une décision de la commission des recours des réfugiés du 29 juin 2005, fait valoir qu'il encourt des risques en cas de retour en République Démocratique du Congo en raison de son militantisme étudiant en opposition au régime en place ; que toutefois, les pièces qu'il produit ne présentent pas de garanties d'authenticité suffisantes et de caractère suffisamment probant pour établir la réalité des faits allégués et des menaces auxquelles il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, en désignant la République Démocratique du Congo comme pays de destination, le PREFET DE L'ISERE, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE L'ISERE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 8 avril 2008, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 16 janvier 2008 refusant de délivrer un titre de séjour à M. X, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays vers lequel il serait reconduit ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE L'ISERE de délivrer à M. X un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de faire droit aux conclusions du préfet tendant à la mise à la charge du défendeur, au profit de l'Etat, d'une somme de 1 000 euros ; que ces même dispositions interdisent par ailleurs que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente affaire la partie perdante, quelque somme que ce soit au titre des frais engagés par M. X à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0800030 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif et les conclusions présentées devant la Cour administrative d'appel sur le fondement des articles L. 761-1 et L.911-2 et L.911-3 du code de justice administrative, sont rejetées.

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N° 08LY00984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00984
Date de la décision : 08/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : BRESSY-RÄNSCH DESCHAMPS VILLEMAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-04-08;08ly00984 ?
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