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27/03/2009 | FRANCE | N°08LY02231

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 27 mars 2009, 08LY02231


Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 6 octobre 2008 et régularisée le 7 octobre 2008, présentée par le PREFET DE LA LOIRE ;

Le PREFET DE LA LOIRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805622 en date du 8 septembre 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 4 septembre 2008, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de Mme X, de nationalité algérienne, et la décision distincte du même jour fixant le pays dont l

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2°) de rejeter l...

Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 6 octobre 2008 et régularisée le 7 octobre 2008, présentée par le PREFET DE LA LOIRE ;

Le PREFET DE LA LOIRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805622 en date du 8 septembre 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 4 septembre 2008, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de Mme X, de nationalité algérienne, et la décision distincte du même jour fixant le pays dont l'intéressée a la nationalité comme destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif ;

3°) d'ordonner le remboursement de la somme versée par l'Etat à Mme X au titre des frais irrépétibles de première instance ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-1647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 février 2009 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant que Mme X fait valoir qu'elle a demandé le divorce qui a été prononcé en raison des mauvais traitements que lui infligeait son époux, qu'elle a obtenu la garde de leur fille, tandis que son époux obtenait celle de leur fils, que son père est récemment décédé, que, alors qu'elle craignait d'être agressée par sa belle-famille, elle s'est enfuie d'Algérie rejoindre sa mère en France en situation régulière ainsi que ses soeurs mineures ; que toutefois, elle n'établit ni les mauvais traitements allégués, ni les risques d'agression par sa belle famille ; que, dans ces conditions, et alors qu'elle n'est arrivé en France qu'en juillet 2008 et que son fils, âgé de cinq ans demeure en Algérie, l'arrêté de reconduite à la frontière n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, c'est à tort, que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, pour erreur manifeste d'appréciation, l'arrêté de reconduite à la frontière pris par le PREFET DE LA LOIRE le 4 septembre 2008 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme X ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière

Considérant, en premier lieu, que M. Y, qui a signé l'arrêté de reconduite à la frontière a bénéficié d'une délégation de signature régulièrement publiée au Recueil des actes administratifs de la PRÉFECTURE DE LA LOIRE ; que, dès lors, Mme X, n'est pas fondée à soutenir que l'acte aurait été signé par une autorité incompétente ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision comporte les éléments de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir qu'elle est insuffisamment motivée ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme X qui n'avait pas déposé de demande d'asile à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre, n'a déposé sa demande que postérieurement à celui-ci ; que, par suite, elle ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles L. 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X n'est entrée en France qu'en juillet 2008 et que son fils, âgé de cinq ans, réside toujours en Algérie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré des risques personnels auxquels Mme X serait exposée en cas de retour en Algérie ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière qui n'indique pas vers quel pays l'intéressée devra être reconduite ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de renvoi :

Considérant, en premier lieu, que M. Y, qui a signé la décision distincte fixant le pays de renvoi a bénéficié d'une délégation de signature régulièrement publiée au Recueil des actes administratifs de la préfecture de la Loire ; que, dès lors, Mme X, n'est pas fondée à soutenir que l'acte aurait été signé par une autorité incompétente ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision comporte les éléments de fait et de droit sur lesquelles elle a été prise ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir qu'elle est insuffisamment motivée ;

Considérant, en troisième lieu, que compte tenu de ce qui vient d'être dit, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que pour les motifs sus énoncés, la décision distincte fixant le pays de renvoi n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les seules craintes exposées par l'intéressée sont de nature familiale ; que, par suite, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA LOIRE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté de reconduite à la frontière du 4 septembre 2008 ;

Sur la légalité de la décision de placement en rétention administrative :

Considérant que dans sa demande devant le tribunal administratif Mme X n'a pas contesté la décision de placement en rétention administrative ; que, dès lors, ces conclusions nouvelles en appel sont irrecevables ;

Sur les conclusions incidentes aux fins d'injonction de Mme X :

Considérant que le présent jugement n'implique pas la délivrance d'un titre à Mme X, que par suite, les conclusions incidentes aux fins d'injonction qu'elle a présentées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant, en premier lieu, que le préfet qui a le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet d'obtenir le remboursement des sommes mises en première instance à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, n'est pas recevable à demander à la Cour la restitution des sommes ainsi versées ;

Considérant, en second lieu, que Mme X, pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de Mme Gravis n'a pas demandé, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la mise à la charge de l'Etat de la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait pas bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon en date du 8 septembre 2008 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le premier juge est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N° 08LY02231


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08LY02231
Date de la décision : 27/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : LAWSON- BODY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-03-27;08ly02231 ?
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