Vu la requête enregistrée le 30 mars 2006, présentée pour M. Hammou X et Mme Aïcha X domiciliés ... ;
M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0500624-0500918 du 9 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant, premièrement à l'annulation, d'une part, de la décision du 28 février 2005 par laquelle le préfet de la Côte-d'Or a rejeté la demande de regroupement familial déposée par M. X au bénéfice de son épouse, d'autre part, les décisions du même jour et du 25 mars 2005 par lesquelles le préfet a refusé de délivrer à Mme X un titre de séjour, deuxièmement, à ce qu'il soit enjoint, sous l'astreinte journalière de 150 euros, au préfet de la Côte-d'Or d'admettre Mme X au bénéfice du regroupement familial, dans le délai d'un mois ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre, sous l'astreinte journalière de 150 euros, au préfet de la Côte-d'Or d'admettre Mme X au bénéfice du regroupement familial, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 d'aide mutuelle judiciaire et d'exequatur des jugements ;
Vu la convention franco-marocaine du 18 août 1981 relative à l'état des personnes et de la famille et de la coopération judiciaire ;
Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
Vu le code civil ;
Vu le nouveau code de procédure civile, notamment ses articles 502 et 509 ;
Vu le code de l'organisation judiciaire ;
Vu l'ordonnance n° 45-1248 du 2 novembre 1945 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2009 :
- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 30 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors en vigueur : « Lorsqu'un étranger polygame réside sur le territoire français avec un autre conjoint, le bénéfice du regroupement familial ne peut être accordé à un autre conjoint (...) » ;
Considérant que M. X, ressortissant marocain séjournant régulièrement en France, a obtenu, le 27 septembre 1983, du Tribunal de première instance de Kasba-Tadla (Royaume du Maroc) un jugement d'homologation de l'acte de répudiation de sa première épouse, Mme Rqia Khejna, qui séjourne régulièrement en France à la date des décisions litigieuses, sous couvert d'une carte de résident ; qu'après avoir épousé, le 17 juillet 2004 à Daix (commune de la Côte-d'Or), Mme Aïcha Wakrim, M. X a présenté, le 13 septembre 2004, une demande d'admission de Mme X au bénéfice du regroupement familial ; que pour rejeter cette demande, le préfet de la Côte-d'Or a regardé l'homologation judiciaire prononcée le 27 septembre 1983 comme privée d'effet en droit français, en raison de l'absence de représentation de l'épouse répudiée au cours de la procédure ; qu'il a déduit de la persistance du premier mariage, l'état de polygamie de M. X, la présence de la première épouse sur le territoire faisant obstacle à l'admission au séjour de la seconde ; qu'après avoir relevé que l'absence de représentation de Mme Rqia Khejna dans l'instance de répudiation méconnaissait le principe d'égalité de droits entre les époux proclamé par l'article 5 du protocole additionnel n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le tribunal administratif a estimé, par le jugement attaqué, que la décision juridictionnelle du tribunal marocain était contraire à l'ordre public français et ne pouvait avoir acquis de caractère exécutoire en France, en vertu de l'application combinée de l'article 16 de la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 et de l'article 13 de la convention franco-marocaine du 18 août 1981 ; qu'ainsi le premier mariage de M. X n'ayant pas été dissout, le second mariage avait créé une situation de polygamie ;
Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions précitées, il appartient au préfet, saisi d'une demande d'admission au séjour au titre du regroupement familial, de s'assurer, sous le contrôle du juge administratif, que le demandeur n'est pas en situation de polygamie ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet aurait excédé sa compétence doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que l'appréciation de la représentation de Mme Rqia Khejna dans l'instance de répudiation engagée en 1983 par M. X devant le Tribunal de première instance de Kasba-Tadla (Royaume du Maroc) et les conséquences à tirer d'une éventuelle méconnaissance du respect du principe d'égalité entre époux institué par l'article 5 du protocole additionnel n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur la situation matrimoniale de M. X découlant du mariage qu'il a contracté en France posent à juger une difficulté sérieuse ; qu'il y a lieu, pour la Cour, de surseoir à statuer sur la requête de M. et de Mme X jusqu'à ce que la juridiction compétente se soit prononcée sur cette question ;
DECIDE :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M. et Mme X, jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si l'instance d'homologation de répudiation engagée en 1983 par M. X devant le Tribunal de première instance de Kasba-Tadla (Royaume du Maroc) a permis à Mme Rqia Khejna de faire valoir ses droits dans des conditions compatibles avec l'article 5 du protocole additionnel n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de telle sorte que M. X puisse être regardé comme n'étant pas polygame depuis le mariage qu'il a contracté le 17 juillet 2004, à Daix, avec Mme Aïcha Wakrim.
Article 2 : M. et Mme X justifieront de leur diligence à saisir de cette question la juridiction judiciaire compétente, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
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N° 06LY00664