Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 15 septembre 2006 et 29 janvier 2007, présentés pour M. Nejib X, domicilié ... ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0501667 en date du 29 juin 2006, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 15 juin 2005 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a prononcé son expulsion du territoire français ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à payer à son conseil une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2008 :
- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Gimenez, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 15 juin 2005 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a prononcé son expulsion du territoire français au motif que son comportement constituait une menace grave à l'ordre public ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. » ; qu'aux termes de l'article L. 521-3 dudit code dans sa rédaction alors applicable : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes : (...) 2° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans (...) ; 5° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. X, ressortissant tunisien né en 1956 qui déclare être entré en France en 1977, n'a bénéficié de titres de séjour qu'à compter du 23 juin 1982, point de départ du délai de vingt ans de résidence régulière prévu au 2° de l'article L. 521-3 précité ; que, d'autre part, le requérant a été incarcéré à compter du 31 août 1996 pour des faits de viol avec usage ou menace d'une arme commis le 27 juillet 1996 sur la personne d'une jeune femme de dix-huit ans pour lesquels il a fait l'objet d'une condamnation par la Cour d'assises de la Drôme le 22 juin 1998 à quinze années de réclusion criminelle ainsi qu'à une interdiction définitive du territoire ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'il soutient, à la date de son incarcération, il n'était pas en situation de séjour régulier depuis plus de 20 ans ; que dès lors que les années passées en détention ne peuvent être prises en compte pour le calcul des vingt ans de résidence mentionnés par les dispositions du 2° de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, à la date de l'arrêté attaqué, le requérant avait donc moins de vingt années de résidence régulière en France au sens de ces dispositions ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir qu'en raison de la durée de son séjour en France ces dispositions faisaient obstacles à ce qu'il puisse être expulsé ;
Considérant, par ailleurs, que si les éléments produits par M. X, notamment à caractère médical, justifient que l'intéressé fait l'objet d'un suivi médical et bénéficie d'un traitement à la suite notamment d'un accident ischémique cérébral dont il a été victime le 9 mars 2006, ils ne font cependant pas état de la nécessité de poursuivre ce traitement en France et de l'absence d'une possibilité de prise en charge de son état de santé dans son pays d'origine, ni de ce que le défaut de cette prise en charge médicale aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'ils ne suffisent pas ainsi à regarder le requérant comme relevant du 5° de l'article L. 521-3 précité ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir, qu'en raison de son état de santé, le préfet ne pouvait légalement prononcer son expulsion au regard de ces dispositions ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; que si M. X fait valoir qu'il réside en France depuis 1977 et de manière régulière depuis 1982, qu'un de ses enfants est né sur le territoire français, qu'il parle couramment le français, il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le préfet a ordonné son expulsion du territoire français, l'épouse et les trois enfants du requérant résidaient en Tunisie et que, comme il a été dit précédemment, il a commis un viol avec usage ou menace d'une arme pour lequel il a été condamné à 15 ans de réclusion criminelle ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la mesure prise à son encontre n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 06LY01953