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10/07/2008 | FRANCE | N°06LY01086

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2008, 06LY01086


Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2006, présentée pour M. Imed X, domicilié ...;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305588-0305589-0406044, en date du 21 avril 2006, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes, qui tendaient respectivement à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision en date du 13 février 2003 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé le bénéfice de l'asile territorial, de la décision en date du 11 mars 2003 par laquelle le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un

titre de séjour, et de la décision en date du 2 juin 2004 par laquelle le même pr...

Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2006, présentée pour M. Imed X, domicilié ...;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305588-0305589-0406044, en date du 21 avril 2006, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes, qui tendaient respectivement à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision en date du 13 février 2003 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé le bénéfice de l'asile territorial, de la décision en date du 11 mars 2003 par laquelle le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, et de la décision en date du 2 juin 2004 par laquelle le même préfet a rejeté une nouvelle demande de délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'admettre au bénéfice de l'asile territorial, ou à tout le moins de réexaminer sa demande, dans un délai de trente jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence d'un an, ou à tout le moins de réexaminer sa demande, dans un délai de trente jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 820 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, modifiée, relative à l'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 98-503 du 23 juin 1998, pris pour l'application de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, et relatif à l'asile territorial ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2008 :

- le rapport de M. Stillmunkes, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Gimenez, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de M. X, qui tendaient à l'annulation pour excès de pouvoir, respectivement, de la décision en date du 13 février 2003 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé le bénéfice de l'asile territorial, de la décision en date du 11 mars 2003 par laquelle le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, et de la décision en date du 2 juin 2004 par laquelle le même préfet a rejeté une nouvelle demande de délivrance d'un titre de séjour ;

Sur le refus d'asile territorial :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi susvisée du 25 juillet 1952, alors applicable : « Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé par le ministre de l'intérieur, après consultation du ministre des affaires étrangères, à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) » ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite convention : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; qu'enfin, aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 23 juin 1998 : « L'étranger qui demande l'asile territorial est tenu de se présenter à la préfecture de sa résidence (...) Il y dépose son dossier, qui est enregistré. Une convocation lui est remise, afin qu'il soit procédé à son audition (...) » ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : « L'étranger est entendu en préfecture au jour que lui a fixé la convocation. Il peut demander au préalable l'assistance d'un interprète et peut être accompagné d'une personne de son choix (...) » ;

Considérant, en premier lieu, que M. X, qui admet lui-même avoir reçu une convocation « 20 jours ouvrables » avant l'entretien qu'il a eu en préfecture, ne peut sérieusement soutenir que cette convocation ne lui serait pas parvenue dans un délai suffisant pour préparer utilement cet entretien ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Sekutowicz-Le Brigant, signataire de l'avis émis au nom du ministre des affaires étrangères en date du 7 janvier 2003, agissait sur le fondement de la délégation de signature qui lui avait été donnée par l'article 7 du décret du 10 septembre 2002 portant délégation de signature, dans sa rédaction issue du décret du 20 décembre 2002 publié au journal officiel du 22 décembre 2002 ; que le moyen tiré du vice de procédure du fait de l'incompétence de l'auteur de cet avis doit ainsi être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que M. X se borne à évoquer des incidents survenus dans sa région et dont il admet qu'ils ne le visaient pas, avant d'indiquer sommairement qu'il aurait été postérieurement personnellement menacé, sans produire le moindre élément précis et probant de nature à corroborer ses allégations ; que, dans ces circonstances, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées de la loi de 1952 et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste dans l'appréciation des risques encourus, doivent être écartés ;

Considérant enfin que, dès lors que le bénéfice de l'asile territorial ne dépend que de l'appréciation des risques encourus par le demandeur dans son pays d'origine, M. X ne peut utilement se prévaloir de ses attaches privées et familiales en France pour soutenir que le ministre aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur sa situation personnelle ;

Sur le refus de titre de séjour en date du 11 mars 2003 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien : « (...) Le certificat de résidence portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 23 juin 1998, alors applicable : « (...) La demande d'asile territorial vaut demande de titre de séjour » ; qu'enfin, aux termes de l'article 12 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors applicable : « (...) la carte de séjour temporaire prévue à l'article 12 bis est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu l'asile territorial en application de l'article 13 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 (...) » ; qu'il résulte de cette dernière disposition que, dès lors que le ressortissant étranger s'est borné à demander le bénéfice de l'asile territorial, le préfet peut limiter l'examen de la demande de titre de séjour dont il est par là-même saisi, à l'examen du droit de séjourner sur le territoire au titre de la protection de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 ; qu'ainsi, M. X ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, dont le préfet n'a pas examiné l'application, ni, par voie de conséquence, de l'absence de consultation de la commission de titre de séjour réservée aux demandes des algériens relevant effectivement de ces stipulations ;

Considérant, en second lieu, que par la décision attaquée, le préfet de l'Isère a, non seulement refusé à M. X la délivrance du titre prévu par les dispositions précitées de l'article 12 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945, mais également, subsidiairement, lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour de régularisation en examinant son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, né en Algérie en 1975 et de nationalité algérienne, n'est entré en France qu'en mai 2001, sous couvert d'un visa court séjour ; qu'eu égard à la brièveté et aux conditions de son séjour, et alors qu'il ne fait état d'aucune attache privée ou familiale précise en France, le préfet de l'Isère n'a pas, en lui refusant en mars 2003 la délivrance d'un titre de séjour, porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, eu égard aux buts que sa décision poursuivait ; que le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de l'article 8 doit ainsi être écarté ; qu'il en va de même, pour les mêmes raisons, et en l'absence de tout autre élément, du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur sa situation personnelle ;

Sur le refus de titre de séjour en date du 2 juin 2004 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté préfectoral attaqué en date du 2 juin 2004 a été « annulé et remplacé » par un arrêté postérieur en date du 1er décembre 2005, dont le requérant lui-même soutient qu'il ne procède pas à un simple aménagement de forme, et indique qu'il n'entend pas contester la légalité ; que les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 2 juin 2004 étant ainsi devenues sans objet, le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a omis de prononcer un non-lieu à statuer sur ces conclusions ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer lesdites conclusions, et de constater qu'elles sont devenues sans objet ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble n'a pas regardé comme devenues sans objet les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 2 juin 2004 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui, pour partie rejette la requête de M. X, pour partie constate que certaines conclusions de sa demande étaient devenues sans objet, n'appelle pas de mesures d'exécution ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent dès lors être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble en date du 21 avril 2006 est annulé en tant qu'il a omis de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de M. X tendant à l'annulation de la décision en date du 2 juin 2004 par laquelle le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. X tendant à l'annulation de la décision en date du 2 juin 2004 par laquelle le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

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N° 06LY01086


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06LY01086
Date de la décision : 10/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : COUTAZ CLAUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-07-10;06ly01086 ?
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