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26/06/2008 | FRANCE | N°05LY01096

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 5, 26 juin 2008, 05LY01096


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2005, présentée pour M. et Mme Jean-Marie X, domiciliés ... ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0202100 et 0202102 en date du 11 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 17 avril 2002 du directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry résiliant le contrat de gérance de débit de tabac dont Mme X était titulaire et à la condamnation de l'Etat français à la somme de 1 500 euros

au titre des frais non compris dans les dépens et, d'autre part, à la condamn...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2005, présentée pour M. et Mme Jean-Marie X, domiciliés ... ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0202100 et 0202102 en date du 11 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 17 avril 2002 du directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry résiliant le contrat de gérance de débit de tabac dont Mme X était titulaire et à la condamnation de l'Etat français à la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à leur payer une somme de 150 000 euros, sauf à parfaire après désignation d'un expert ;

2°) d'annuler ladite décision et de prononcer ladite condamnation ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des débits de boissons ;

Vu la loi n° 76-448 du 24 mai 1976 portant aménagement du monopole des tabacs manufacturés ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu l'arrêté ministériel du 31 décembre 1982 modifié relatif au régime des sanctions disciplinaires applicables aux débitants de tabac ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2008 :

- le rapport de M. Bourrachot, président-assesseur ;

- les observations de Me Balestas, pour M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme et M. X, respectivement gérante et suppléant de l'exploitation du débit de tabac n° 38-645 situé à Nivolas Vermelle (Isère) aux termes d'un traité conclu avec le directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry pour la période du 16 mai 1993 au 15 mai 2002, ont été condamnés par jugement du 11 mars 1999 du Tribunal correctionnel de Bourgoin-Jallieu, l'un pour avoir commis, l'autre pour s'être abstenu d'empêcher une agression sexuelle en réunion contre une personne vulnérable, dont les faits se sont déroulés dans leur débit de boissons, contigu au débit de tabac ; que par décision du 21 avril 1999, précédée d'un échange de courrier avec les intéressés, l'administration leur a notifié la suspension du traité de gérance précité et la fermeture provisoire du débit de tabac jusqu'au règlement définitif de la procédure judiciaire ; que la Cour d'appel de Grenoble, saisie par les époux X, a confirmé par arrêt du 7 juillet 2000 la condamnation prononcée contre eux et la Cour de cassation rejeté leur pourvoi par un arrêt du 23 mai 2001 dont l'administration dit avoir eu connaissance le 2 avril 2002 ; que par décision du 17 avril 2002 le directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry a résilié le traité de gérance en application de son article 5 ; que M. et Mme Y font appel du jugement en date du 11 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 17 avril 2002 du directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry résiliant le contrat de gérance de débit de tabac dont Mme X était titulaire et à la condamnation de l'Etat à la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à leur payer une somme de 150 000 euros, en réparation de leur préjudice ;

Sur les conclusions en annulation de la décision de résiliation du 17 avril 2002 :

Considérant qu'il ressort des mentions de la décision attaquée qu'en tout état de cause le moyen tiré de la violation des dispositions du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 manque en fait ;

Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 5 A du traité de gérance signé entre l'Etat et Mme X pour la période du 16 mai 1993 au 15 mai 2002 : « La résiliation du présent traité aura lieu de plein droit et l'administration se réservera la possibilité de la prononcer et d'évincer le gérant, si au cours de la période pour laquelle la gérance du débit de tabac a été concédée, le gérant : - venait à exercer une activité ou fonction incompatible avec la gestion normale du débit de tabac. Il en serait de même si une faute grave entachait son honneur ou sa probité » ;

Considérant que l'administration tient des seules stipulations précitées le pouvoir de résilier un traité de gérance et n'est dès lors pas tenue de mettre en oeuvre la procédure prévue par l'arrêté susvisé du 31 décembre 1982 relatif au régime des peines applicables aux gérants de débits de tabac ; que, toutefois, il lui appartient de suivre une procédure appropriée, respectant le principe des droits de la défense ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, qu'après avoir provoqué les observations de Mme X par une lettre en date du 7 avril 1999 et pris en considération sa demande tendant à ce que l'examen de sa situation administrative soit différé jusqu'au terme de la procédure pénale, l'administration des douanes et des droits indirects lui a notifié une décision de fermeture provisoire du débit de tabac qu'elle exploite par lettre du 21 avril 1999 ; que si l'administration des douanes a attendu près de trois ans pour décider la résiliation du même contrat sans que cette seconde décision du 17 avril 2002 ne soit précédée d'une nouvelle lettre informant l'intéressée de la mesure à intervenir et provoquant ses observations, une telle circonstance n'a pas eu pour effet d'entacher la résiliation d'irrégularité dès lors que, dès le 7 avril 1999, l'administration avait indiqué à Mme X qu'elle estimait que les faits qui lui étaient reprochés étaient de nature à justifier une résiliation, que ses observations avaient déjà été recueillies puis retenues et que n'était intervenu aucun élément nouveau autre que le terme de la procédure pénale ;

Considérant qu'alors même qu'ils se sont déroulés non dans les locaux du débit de tabac mais dans ceux du débit de boissons exploité par M. X, les faits établis à l'encontre de Mme X et de M. X, qui participe également à l'exploitation du débit de tabac, constituent une faute grave entachant leur honneur et étaient ainsi de nature à justifier la mesure de résiliation du traité de gérance en application des stipulations précitées de son article 5 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'administration se serait estimée liée par la peine prononcée par le juge pénal ; qu'eu égard à la gravité des faits susrappelés, l'administration n'a commis aucune erreur d'appréciation en prononçant cette résiliation ; que si le préfet a également procédé à une mesure de fermeture du débit de boissons, cette mesure a été prise sur le fondement de ses pouvoirs de police spéciale ; qu'ainsi, la résiliation ne constitue pas une seconde sanction pour les mêmes faits ; que les requérants ne peuvent invoquer utilement la circonstance qu'ils ont été relevés de toute déchéance d'exploiter le débit de boissons par arrêt de la Cour d'appel de Grenoble du 25 juin 2004 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne la mesure de suspension du 21 avril 1999 :

Considérant que l'article 566 du code général des impôts dispose que : « La vente au détail des tabacs manufacturés est réservée à l'Etat » et qu'aux termes de l'article 568 du même code : « Le monopole de vente au détail (des tabacs manufacturés) est confié à l'administration qui l'exerce par l'intermédiaire de débitants désignés comme ses préposés et tenus à redevance » ; que l'activité de débitant de tabac constitue un emploi public de préposé de l'administration ; qu'il appartient à celle-ci, lorsqu'elle estime que l'intérêt du service l'exige, et ce même sans texte et sans qu'il soit porté atteinte au principe de présomption d'innocence, d'écarter provisoirement de ses fonctions un tel agent, dès lors qu'il fait l'objet de présomptions de fautes graves susceptibles de poursuites pénales ;

Considérant, en premier lieu, que la décision du 21 avril 1999 par laquelle le directeur régional des douanes de Chambéry a suspendu jusqu'à l'issue de la procédure judiciaire mise en oeuvre contre M. et Mme X, l'exécution du contrat de gérance de débitant de tabac n'a pas eu pour objet de lui infliger l'une des sanctions prévues par l'arrêté susvisé du 31 décembre 1982 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'une mesure de suspension à titre conservatoire n'est pas au nombre des mesures pour lesquelles le préposé concerné doit être mis à même de consulter son dossier et de faire valoir ses observations en application de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et du principe général de respect des droits de la défense ;

Considérant, en troisième lieu, qu'eu égard aux obligations de préposé de l'administration pesant sur les débitants de tabac, le directeur interrégional des douanes n'a commis ni erreur de droit, ni erreur manifeste d'appréciation en estimant que les agissements imputés à M. et Mme Z faisaient obstacle à la poursuite de l'exécution du contrat de gérance ;

Considérant que la durée d'application de la mesure litigieuse jusqu'à l'aboutissement de la procédure pénale n'a pas eu pour effet de lui faire perdre son caractère purement conservatoire et n'est à l'origine d'aucun préjudice dès lors que les faits reprochés à M. et Mme X étaient de nature à justifier la résiliation immédiate de leur contrat ;

En ce qui concerne la décision de résiliation du 17 avril 2002 :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, en prononçant la résiliation du contrat de Mme X, l'administration des douanes n'a commis aucune illégalité de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'indemnité ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

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N° 05LY01096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 05LY01096
Date de la décision : 26/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. BESLE
Avocat(s) : BALESTAS et DETROYAT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-06-26;05ly01096 ?
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