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27/05/2008 | FRANCE | N°07LY01094

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 27 mai 2008, 07LY01094


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2007, présentée pour M. Patrick X, domicilié ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0404683 du 30 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2004 par laquelle le gouverneur de la Banque de France a prononcé sa mutation disciplinaire à la succursale de Grenoble, à compter du 19 juillet 2004 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) de lui accorde

r la somme de 5 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrativ...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2007, présentée pour M. Patrick X, domicilié ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0404683 du 30 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2004 par laquelle le gouverneur de la Banque de France a prononcé sa mutation disciplinaire à la succursale de Grenoble, à compter du 19 juillet 2004 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) de lui accorder la somme de 5 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2008 :

- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Aebischer, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la Banque de France à la demande de première instance de M. X ;

Considérant que M. X, secrétaire comptable de 2ème classe affecté depuis 1991 à la succursale d'Annecy de la Banque de France, par laquelle il a été recruté en 1986 au titre des emplois réservés aux travailleurs handicapés, a fait l'objet d'une décision du 7 juillet 2004 par laquelle le gouverneur de la Banque de France l'a muté, pour motifs disciplinaires, à la succursale de Grenoble, à compter du 19 juillet 2004 ; que cette décision, intervenue après une enquête spéciale dont M. X avait été informé, le 17 mars 2004, par une lettre du directeur des ressources humaines de la Banque de France l'avisant également de la suspension de ses fonctions à compter du même jour, et au terme d'une procédure disciplinaire, est motivée par une attitude permanente (...) à l'origine d'un climat de crainte et d'exaspération que son comportement violent fait peser sur l'ensemble du comptoir ainsi que d'une dégradation profonde de l'ambiance de travail, et mentionne, à ce titre, un comportement se caractérisant par des injures et des menaces répétées vis-à-vis de l'encadrement et de ses collègues, une initiative contraire à la déontologie professionnelle à l'égard d'un chef d'entreprise (7 juillet 2003) et une injure envers un représentant d'un établissement de crédit (incident par téléphone du 8 mars 2004), ainsi qu'une attitude irrespectueuse envers le directeur de la succursale et une agression physique inacceptable à l'encontre de son supérieur hiérarchique ( 17 mars 2004) ; que M. X fait appel du jugement du 30 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2004 ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier du rapport d'enquête spéciale rédigé le 19 avril 2004 par l'inspection générale de la Banque de France, ainsi que des nombreux rapports et témoignages des supérieurs hiérarchiques et collègues de travail de M. X, que le comportement de cet agent, qui s'était engagé en septembre 2002 à en changer après avoir été déjà averti des risques d'engagement d'une procédure disciplinaire, s'est caractérisé, durant les mois qui ont précédé la suspension de ses fonctions, à la fois par des exigences excessives quant à l'attitude envers lui-même des membres de son entourage professionnel et par une agressivité envers ces derniers se traduisant par une attitude discourtoise, des invectives mais aussi par des propos irrespectueux ou menaçants ; qu'en particulier, les témoignages produits par la Banque de France établissent que l'incident l'ayant opposé à son supérieur hiérarchique direct, le 17 mars 2004, à propos duquel M. X a au demeurant présenté, initialement, dans une lettre du même jour, une version des faits qu'il a ensuite modifiée quant au sens de son déplacement dans l'escalier où il a rencontré ledit supérieur, constitue une agression physique de ce dernier, dont les témoins ont attesté de l'état de choc dans lequel il se trouvait dans les instants ayant suivi ladite agression ; que l'attitude de M. X envers des personnes extérieures à la Banque de France, mentionnée à l'occasion de deux incidents relevés dans la décision en litige, est également démontrée par le dossier ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient M. X, qui ne peut, en l'absence de doute, se prévaloir des dispositions de l'article L. 122-43 du code du travail, la matérialité de l'ensemble des faits qui lui sont reprochés est établie ;

Considérant, en deuxième lieu, que la Banque de France constitue une personne publique chargée par la loi de missions de service public qui, ayant principalement pour objet la mise en oeuvre de la politique monétaire, le bon fonctionnement des systèmes de compensation et de paiement et la stabilité du système bancaire, sont pour l'essentiel de nature administrative ; qu'elle n'a pas le caractère d'un établissement public mais revêt une nature particulière et présente des caractéristiques propres ; qu'au nombre de ces caractéristiques propres figure l'application au personnel de la Banque de France des dispositions du code du travail qui ne sont incompatibles ni avec son statut, ni avec les missions de service public dont elle est chargée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-44 du code du travail : Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales (...) ; qu'il n'est pas démontré que ces dispositions seraient incompatibles avec le statut de la Banque de France ou avec les missions de service public dont elle est chargée ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la Banque de France, ces dispositions sont applicables à son personnel ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier, qu'avant même que la Banque de France ait eu une pleine connaissance de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits commis par M. X, à la date de dépôt, le 19 avril 2004, du rapport spécial prévu par l'article 233 du statut du personnel, le requérant avait été informé, par une lettre du 17 mars 2004, date de l'agression commise par cet agent sur son supérieur hiérarchique, de ce qu'il faisait l'objet d'une suspension de ses fonctions dans l'attente de l'enquête spéciale ; qu'elle doit être ainsi regardée comme ayant procédé, dès cette date, à l'engagement de poursuites disciplinaires ; que, dès lors, nonobstant la circonstance que M. X n'ait été convoqué pour un entretien que par une lettre du 1er juin 2004, l'engagement de poursuites disciplinaires est intervenu avant l'expiration du délai de deux mois fixé par les dispositions précitées de l'article L. 122-44 du code du travail ; que ces dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que la Banque de France prennent en considération des faits commis par M. X antérieurement à la date de l'agression dont il s'était rendu coupable le 17 mars 2004, alors même qu'ils n'avaient pas entraîné de sanction disciplinaire, dès lors que ces agissements procédaient d'un comportement identique, caractérisé, ainsi qu'il était mentionné dans la décision en litige, par une attitude permanente à l'origine d'un climat de crainte et d'exaspération que son comportement violent fait peser sur l'ensemble du comptoir ;

Considérant, en dernier lieu, qu'eu égard à la nature et à la gravité des faits reprochés à M. X, la sanction de mutation prononcée à son encontre, qui ne peut être regardée comme constituant une mesure d'exclusion définitive ou un licenciement de cet agent, n'est pas manifestement disproportionnée, nonobstant son état de santé, dont il n'est pas allégué qu'il ferait obstacle à ce qu'une sanction disciplinaire pût légalement être prise contre lui ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être également rejetées les conclusions de sa requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions de la Banque de France tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X une somme au titre des frais exposés par la Banque de France et non compris dans les dépens ;




DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Banque de France tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 07LY01094


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY01094
Date de la décision : 27/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. AEBISCHER
Avocat(s) : BILLET JORAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-05-27;07ly01094 ?
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