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15/05/2008 | FRANCE | N°07LY01345

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 mai 2008, 07LY01345


Vu le recours, enregistré le 27 juin 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501390, en date du 6 mars 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre des années 1998 et 1999, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de rétablir les impositions en litige, avec intérêts de retard ;
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Vu le recours, enregistré le 27 juin 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501390, en date du 6 mars 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre des années 1998 et 1999, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de rétablir les impositions en litige, avec intérêts de retard ;
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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 avril 2008 :

- le rapport de Mme Jourdan, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pourny, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X est associé de la société civile immobilière Trénel, laquelle a donné en sous-location, à compter du 9 mai 1995, et ce pour une durée de 15 ans, à la SA Jeanne d'Arc, une clinique au sein de laquelle l'intéressé exerce son activité de médecin anesthésiste ; que l'administration a remis en cause la déduction faite de sa part des bénéfices non commerciaux tirés de l'exercice de sa profession en 1998 et 1999, des déficits générés par l'activité de cette SCI ; que, par un jugement en date du 6 mars 2007 dont le ministre fait appel, le Tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu résultant de cette remise en cause ;

Considérant qu'aux termes de l'article 238 bis K du code général des impôts : « I. Lorsque des droits dans une société [dont les membres sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits ...] sont inscrits à l'actif (...) d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou agricole imposable à l'impôt sur le revenu de plein droit selon un régime de bénéfice réel, la part de bénéfice correspondant à ces droits est déterminée selon les règles applicables au bénéfice réalisé par la personne ou l'entreprise qui détient ces droits. (...) II. Dans tous les autres cas, la part de bénéfice [... est] déterminé[e] et imposé[e] en tenant compte de la nature de l'activité et du montant des recettes de la société ou du groupement » ; qu'aux termes du 1. de l'article 92 du même code, qui définit la catégorie des bénéfices non commerciaux : « Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus » ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 238 bis K du code général des impôts que la part de bénéfice correspondant aux droits détenus dans une société est déterminée et imposée selon les règles applicables au bénéfice réalisé par la personne qui détient ces droits, uniquement dans les cas, précisés par ces dispositions, où les parts sont inscrites à l'actif d'une entreprise industrielle, commerciale et artisanale, ou d'une entreprise agricole ; que tel n'est pas le cas de M. X dont les parts sont inscrites à l'actif d'une entreprise non commerciale ; que le régime d'imposition relève, dès lors, du II de l'article 238 bis K précité et est déterminé en tenant compte de la nature de l'activité de la société ; qu'en l'espèce, les résultats correspondant aux droits détenus par M. X auprès de la SCI Trenel doivent ainsi être imposés, non pas par rattachement aux revenus non commerciaux issus de l'activité médicale de M. X, mais uniquement en tenant compte de la nature de l'activité de la SCI Trenel ; qu'il est constant que les revenus de la SCI Trénel, issus de la sous-location en 1998 et 1999 des locaux de la clinique Jeanne d'Arc, constituent des revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux au sens du 1. de l'article 92 du code général des impôts précité ; que, dans ces conditions, les résultats correspondant aux droits détenus par M. X auprès de la SCI Trenel doivent être imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux issus de l'activité de cette SCI ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 156 du même code, l'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal, « sous déduction : I. Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) 2° des déficits provenant d'activités non commerciales au sens de l'article 92, autres que ceux qui proviennent de l'exercice d'une profession libérale ou des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants ; ces déficits peuvent cependant être imputés sur les bénéfices tirés d'activités semblables durant la même année ou les cinq années suivantes (...) » ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de l'article 9 de la loi n° 73-11 du 27 décembre 1973 dont elles sont issues, que le législateur a entendu déroger, en ce qui concerne la catégorie des bénéfices non commerciaux définie par l'article 92 du code général des impôts, à la règle, établie par le 3 de l'article 13 et par le premier alinéa du I de l'article 156 du même code, selon laquelle le montant imputable sur le revenu global du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus est déterminé par l'excédent des résultats négatifs sur les résultats positifs de l'ensemble des entreprises, exploitations ou professions ressortissant de cette catégorie, en distinguant les déficits provenant notamment des professions libérales, seuls déductibles en totalité du revenu global, des déficits provenant d'une ou plusieurs des autres occupations, activités lucratives et sources de profits visées à l'article 92, telles, par exemple, que la sous-location d'immeubles, qui sont exclusivement imputables sur les revenus, assimilés à des bénéfices non commerciaux, qui ont pu être en même temps tirés de pareilles occupations, activités ou sources de profits ;

Considérant que l'activité de la SCI Trénel consistant à sous-louer les locaux à la SA Clinique Jeanne d'Arc relève, alors même que cette sous-location concerne la clinique au sein de laquelle M. X exerce son activité professionnelle, de la gestion du patrimoine de celle-ci, et ne présente donc pas pour l'intéressé une nature libérale ; que les dispositions du I-2° de l'article 156 du code général des impôts font dès lors obstacle à ce que M. X impute sur ses bénéfices non commerciaux qu'il a tirés en 1998 et 1999 de l'exercice de sa profession libérale de médecin-anesthésiste, les déficits qu'il a subis en tant qu'associé de la société civile immobilière Trenel ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort, que pour accorder à M. X la décharge des impositions en litige, le Tribunal s'est fondé sur les articles 93 et 99 du code général des impôts, et a estimé que, dès lors que les parts détenues par M. X étaient inscrites au registre de ses immobilisations et étaient par ailleurs utiles à l'exercice de son activité, elles devaient être regardées comme affectées à son patrimoine professionnel ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X tant devant le tribunal administratif que devant la Cour ;

Considérant, qu'ainsi que cela vient d'être dit, pour l'application des dispositions combinées des articles précités, relatives aux possibilités d'imputation des déficits catégoriels sur le revenu global, doivent être regardés comme provenant d'une activité libérale les revenus tirés de la mise en oeuvre par leur détenteur, à titre indépendant et personnel, d'un art, d'une science ou d'une compétence particulière ; qu'une activité d'acquisition en crédit-bail à fin de sous-location de locaux nus, dès lors qu'elle se borne à tirer des revenus immobiliers des biens ainsi acquis, n'est pas au nombre de celles susceptibles d'être qualifiées de libérales ; que, par suite, l'activité consistant à sous-louer des locaux dont la disposition avait été acquise au moyen d'un crédit-bail relevait d'une gestion patrimoniale et ne présente pas une nature libérale ; que les contribuables ne peuvent, dès lors, utilement se prévaloir de ce que les parts des sociétés civiles sont affectées à l'exercice de la profession de M. X ;

Considérant que les contribuables ne peuvent davantage se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales d'une réponse ministérielle Moyne-Bressand, qui concerne la question, distincte, des plus-values latentes, ni d'une réponse ministérielle Houillon, qui concerne la seule taxe professionnelle, ni, de la documentation administrative 5-G-4822, qui concerne le cas, également distinct, des sociétés civiles de moyens, ni enfin, de l'instruction 5 G 3-98 du 17 juin 1998 relative à l'inscription au registre des immobilisations des parts de sociétés civiles immobilières ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 6 mars 2007 et le rétablissement, par suite, de M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes au titre des années 1998 et 1999 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante au présent litige, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. et Mme X et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 6 mars 2007 est annulé.
Article 2 : M. et Mme X sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 1998 et 1999, à raison des droits et pénalités dont la décharge a été prononcée par les premiers juges.
Article 3 : Les conclusions de M. et Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
N° 07LY01345


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY01345
Date de la décision : 15/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Dominique JOURDAN
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-05-15;07ly01345 ?
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