Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 mars 2007, présentée pour Mme Ghania X, domiciliée ... ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700693 en date du 15 février 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 5 février 2007, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont elle a la nationalité comme destination de la reconduite ;
2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2008 :
- le rapport de M. Chabanol, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Rhône :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : « La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours » ;
Considérant que Mme X a présenté, dans le délai de recours, un mémoire d'appel qui ne constitue pas la reproduction littérale de son mémoire de première instance et énonce, de manière précise, les critiques adressées au jugement attaqué et à la décision dont elle avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'une telle requête répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par le préfet du Rhône et tirée de ce que la requête d'appel serait insuffisamment motivée ne peut être accueillie ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité algérienne, entrée en France le 24 septembre 2001 sous couvert d'un visa de court séjour, s'est maintenue sur le territoire français après l'expiration de son visa ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 5 février 2007, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, entrée régulièrement sur le territoire français au mois de septembre 2001, a épousé, le 18 juin 2004, un compatriote arrivé en France en 1986 et titulaire d'un certificat de résidence algérien valable dix ans ; que deux enfants sont nés en France de cette union, respectivement le 6 mai 2005 et le 5 janvier 2007 ; qu'ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, en prenant à l'encontre de Mme X une mesure d'éloignement, le préfet du Rhône a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise ; que l'arrêté contesté a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, il doit être annulé ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont Mme X a la nationalité comme destination de la reconduite ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. » ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet du Rhône de délivrer à Mme X, dans le délai de 15 jours, une autorisation provisoire de séjour ;
Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 000 euros à verser à Mme X au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit du préfet du Rhône, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0700693 du 15 février 2007 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon, ensemble l'arrêté du préfet du Rhône du 5 février 2007 prononçant la reconduite à la frontière de Mme X et la décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à Mme X une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 15 jours.
Article 3 : L'Etat versera à Mme X une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par le préfet du Rhône sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 07LY00562