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28/02/2008 | FRANCE | N°04LY00558

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 5, 28 février 2008, 04LY00558


Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2004 sous le n° 04LY00558, présentée pour M. Jean X, expert près la cour d'appel de Lyon, domicilié ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304617 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 29 janvier 2004 en ce que, réformant l'ordonnance du 25 septembre 2003 par laquelle le président du Tribunal avait fixé à 93 988,82 euros TTC le montant des frais et honoraires dus au titre de l'expertise qu'il a réalisée sur les travaux d'aménagement de la traversée du centre de la commune de Montriond, a

réduit de 20 000 euros le montant de cette rémunération et l'a fixée à 73 98...

Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2004 sous le n° 04LY00558, présentée pour M. Jean X, expert près la cour d'appel de Lyon, domicilié ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304617 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 29 janvier 2004 en ce que, réformant l'ordonnance du 25 septembre 2003 par laquelle le président du Tribunal avait fixé à 93 988,82 euros TTC le montant des frais et honoraires dus au titre de l'expertise qu'il a réalisée sur les travaux d'aménagement de la traversée du centre de la commune de Montriond, a réduit de 20 000 euros le montant de cette rémunération et l'a fixée à 73 988,82 euros TTC ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le Tribunal par la Sarl Willem Den Hengst et contestant l'ordonnance du 25 septembre 2003 par laquelle le président du Tribunal a fixé à 93 988,82 euros TTC le montant des frais et honoraires mis à la charge, par tiers, de la commune de Montriond, de la Sarl Willem Den Hengst et de la société Jardin des Pierres Dorées ;

3°) de condamner la Sarl Willem Den Hengst à lui verser la somme de 1 524 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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II - Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2004, sous le n° 04LY00913, présentée pour la société ARCADIS ESG dont le siège est 10 avenue Newton au Plessis-Robinson (92350) ;

La société ARCADIS ESG demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0402045 du 22 avril 2004 par laquelle le président de la 4ème chambre du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande, présentée par la voie de la tierce opposition, tendant, d'une part, à ce que le Tribunal rétracte son jugement n° 0304617 du 29 janvier 2004 en ce que, réformant l'ordonnance de taxation du 25 septembre 2003, il a réduit de 20 000 euros le montant des frais et honoraires dus à M. X et l'a fixé à 73 988,82 euros TTC, d'autre part, au rejet de la contestation de l'ordonnance de taxation du 25 septembre 2003 présentée par la Sarl Willem Den Hengst ;

2°) de rétracter le jugement n° 0304617 du 29 janvier 2004 en ce qu'il réforme l'ordonnance de taxation du 25 septembre 2003 et rejeter la contestation de l'ordonnance de taxation du 25 septembre 2003 présentée par la Sarl Willem Den Hengst ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2008 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- les observations de Me Zair, avocat de M. X et de Me Aries substituant Me Bessy, avocat de la société ARCADIS ESG ;

- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;



Considérant que les requêtes n° 04LY00558 de M. X et n° 04LY00913 de la société ARCADIS ESG présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;









Sur l'appel de M. X :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles R. 621-13 et R. 761-5 du code de justice administrative que toute partie à l'instance de référé est recevable à contester l'ordonnance de taxation des frais et honoraires de l'expert ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que la Sarl Willem Den Hengst, partie à l'instance de référé expertise organisée pour l'examen des désordres affectant les voiries rénovées du centre de Montriond, aurait été dépourvue d'intérêt à contester l'ordonnance présidentielle du 25 septembre 2003 ayant mis à sa charge un tiers des frais et honoraires d'expertise liquidés à la somme de 93 988,82 euros tant qu'un jugement statuant sur le fond du litige ne l'aurait pas condamnée à supporter les dépens ;

En ce qui concerne le fond du litige :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 621-2 du code de justice administrative : « (...) Lorsqu'il apparaît à un expert qu'il est nécessaire de faire appel au concours d'un ou de plusieurs sapiteurs pour l'éclairer sur un point particulier, il doit préalablement solliciter l'autorisation du président du tribunal administratif (...)» ; qu'aux termes de l'article R. 621-11 du même code : « Les experts et sapiteurs mentionnés à l'article R. 621-2 ont droit à des honoraires, sans préjudice du remboursement de leurs débours. (...) Dans les honoraires sont comprises toutes sommes allouées pour étude du dossier, frais de mise au net du rapport, dépôt du rapport et, d'une manière générale, tout travail personnellement fourni par l'expert ou le sapiteur et toute démarche faite par lui en vue de l'accomplissement de sa mission. Le président de la juridiction (...) fixe par ordonnance (...) les honoraires en tenant compte des difficultés des opérations, de l'importance, de l'utilité et de la nature du travail fourni par l'expert ou le sapiteur. (...) » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 621-2 du code de justice administrative que l'autorisation donnée par le président de la juridiction à l'expert de s'adjoindre le concours d'un sapiteur ne porte que sur la reconnaissance de l'utilité de la mission ainsi confiée à ce spécialiste ; que, par suite, M. X ne saurait utilement soutenir que l'ordonnance du 10 mars 2003 l'autorisant à s'adjoindre le concours de la société EEG SIMESCOL pour déterminer et évaluer les travaux de réfection de la voirie, aurait consacré un droit acquis à rémunérer cette mission à hauteur du montant du devis porté à la connaissance de l'auteur de l'ordonnance, soit 40 500 euros HT ;

Considérant, en second lieu, que la liquidation des honoraires dus à l'expert et à ses sapiteurs doit reposer sur des pièces permettant à l'auteur de l'ordonnance d'apprécier concrètement la quantité et la qualité des prestations ainsi que l'adéquation entre les moyens mis en oeuvre et le niveau de difficulté de la mission ; que la facture du 29 juillet 2003, d'un montant de 48 438 euros TTC, se réfère au devis établi le 10 mars 2003 qui ne mentionne que la somme globale HT et ne permet pas de connaître le mode de détermination de la proposition de prix ; que le document produit par la société ARCADIS ESG dans le cadre de l'instance n° 04LY00913, s'il décompose les postes de dépenses du sapiteur, ne contient aucune justification du nombre d'heures de travail et du niveau de qualification des personnels affectés à la mission ; que, par suite, le Tribunal a pu, à bon droit, réduire de 20 000 euros le montant des honoraires dus à l'expert et à ses sapiteurs au motif que l'ordonnance de taxation reposait sur des éléments insuffisamment précis pour la rémunération de la mission de la société ARCADIS ESG ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal a réformé l'ordonnance de taxation en date du 25 septembre 2003 ; que, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la Sarl Willem Den Hengst, les conclusions susmentionnées doivent être rejetées ;


Sur l'appel incident de la Sarl Willem Den Hengst :

En ce qui concerne la liquidation et la taxation des frais et honoraires :

Considérant, en premier lieu, que, d'une part, l'expert se prononçant à la page 142 de son rapport sur l'absence de réception des travaux affectés de désordres, il a répondu au point n° 3 de sa mission tel que défini par l'ordonnance de référé du 22 mai 2001 ; que, d'autre part, il ne lui appartenait pas d'examiner le droit de la commune de Montriond à obtenir réparation de désordres affectant des travaux exécutés sur les emprises d'une route départementale ; que, par suite, la Sarl Willem Den Hengst n'est pas fondée à demander une réduction du montant des honoraires dus à M. X au motif que son rapport ne correspondrait pas à l'étendue de sa mission ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'ordonnance de référé du 22 mai 2001 a confié à M. X la mission de rechercher toutes les causes des désordres généralisés affectant les aménagements de voirie réalisés dans la traversée du chef-lieu de Montriond ; que l'ordonnance du 16 octobre 2001, par laquelle le juge des référés a étendu la mission de M. X « aux désordres qui affectent la conception même des routes départementales (n° 228 et 229) à l'aplomb de la maison Burnier », ne peut être comprise comme ayant entendu interdire à l'expert de rechercher sous les voiries extérieures au périmètre de la maison Burnier mais comprises dans les sections réaménagées du chef-lieu, les causes de désordres affectant notamment la planéité des caniveaux en pavés et révélant une malfaçon des chaussées qui supportaient ces éléments ; que, par suite, la Sarl Willem Den Hengst n'est pas fondée à soutenir que les dépenses exposées de ce chef devraient être déduites des honoraires de l'expert ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer que l'expertise, homologuant les propositions de la société EEG SIMESCOL sur l'évaluation des travaux de reprise des désordres, justifie insuffisamment les écarts de coût entre ses préconisations et celles du maître d'oeuvre et de la commune, il ne résulte pas de l'instruction que la réfaction de 20 000 euros prononcée par les premiers juges sur le poste correspondant aux prestations du sapiteur serait insuffisante pour couvrir également cette lacune du rapport ;

Considérant, en quatrième lieu, que le mode de rémunération de l'expert, dont la mission ne saurait être assimilée à une mission de maîtrise d'oeuvre accomplie au profit d'une collectivité publique, dépend exclusivement des articles R. 621-2 et R. 621-11 précités du code de justice administrative ; que, par suite, la Sarl Willem Den Hengst ne saurait utilement se prévaloir du code des marchés publics, sans identifier d'ailleurs la disposition dont elle demande l'application, pour soutenir que les honoraires d'expertise devraient être limités à 7,40 pour-cent du montant HT des travaux préconisés pour la reprise des désordres ;

En ce qui concerne la désignation des parties devant supporter les frais et honoraires :

Considérant qu'en vertu de l'article R. 621-13 du code de justice administrative, l'ordonnance de taxation « désigne la ou les parties qui assumeront la charge de ses frais et honoraires » ; que le président de la juridiction qui a ordonné la mesure d'instruction peut tenir compte, ainsi que l'a relevé le Tribunal, de toutes les circonstances propres à l'espèce justifiant que ces frais soient supportés par plusieurs parties ou ne soient pas mis à la charge de la partie qui a présenté la demande de référé ;

Considérant, en premier lieu, que le montant des frais et honoraires est, en lui-même, sans incidence sur le mode de répartition des frais et honoraires entre les parties désignées pour en assumer le paiement ; que, la Sarl Willem Den Hengst ne saurait, dès lors, utilement se prévaloir de la réduction de 20 000 euros décidée par le Tribunal, pour soutenir qu'un partage par tiers entre la commune, l'entreprise chargée des travaux et elle-même ne se justifierait plus ;

Considérant, en second lieu, que l'imputation des désordres telle qu'elle résulte de l'expertise figure au nombre des circonstances justifiant une prise en charge partielle ou totale du coût de la mesure d'instruction par les défendeurs ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que les malfaçons affectant les éléments de voirie proviennent de l'inadaptation au climat de montagne de la pierre choisie pour les pavés, d'erreurs de composition des mortiers de scellement et d'une insuffisance de structure des chaussées ; que, par suite, le président du Tribunal a pu, sans méconnaître l'article R. 621-13 du code de justice administrative, regarder lesdits désordres comme partiellement imputables au maître d'oeuvre en l'état de l'instruction et mettre à sa charge une part de la rémunération de l'expert ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la fin de non recevoir opposée par M. X, que la Sarl Willem Den Hengst n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a partiellement rejeté sa demande ;


Sur les conclusions de la société ISS Espaces Verts :

Considérant que les conclusions de la société ISS Espaces Verts tendant à la réduction des honoraires de M. X et à la restitution des sommes qu'il aurait indûment perçues sont nouvelles en appel ; qu'ainsi elles sont irrecevables et doivent être rejetées ;


Sur la requête de la société ARCADIS ESG :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative : « Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision » ;

Considérant, en premier lieu, que ni les articles R. 621-2 et R. 621-11 précités du code de justice administrative ni aucune autre disposition de ce code ne confient à l'expert un mandat de représentation des sapiteurs en cas de contestation de l'ordonnance de liquidation et de taxation des frais et honoraires dus au titre de la mission qu'ils ont collectivement accomplie ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que pour rejeter comme entachée d'une irrecevabilité manifeste la tierce-opposition formée contre le jugement du 29 janvier 2004, le président de la 4ème chambre l'a regardée comme ayant été représentée à l'instance n° 0304617 par M. X dont elle était le sapiteur ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte des motifs qui constituent le soutien nécessaire de son dispositif que le jugement n° 0304617 du 29 janvier 2004 réduit de 20 000 euros la part de rémunération qui, dans la masse des frais et honoraires dus au titre de la mission accomplie par M. X, revenait à la société ARCADIS ESG ; que, par suite, ce jugement préjudicie à ses droits au sens des dispositions précitées de l'article R. 832-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il suit de là que la société ARCADIS ESG est fondée à soutenir qu'en rejetant comme manifestement irrecevable sa tierce-opposition, le président de la 4ème chambre a entaché l'ordonnance attaquée d'irrégularité ; qu'il y a lieu d'en prononcer l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la société ARCADIS ESG présentée au Tribunal par la voie de la tierce opposition ;

Considérant qu'ainsi qu'il est dit plus haut, la liquidation des honoraires dus à l'expert et à ses sapiteurs doit reposer sur des pièces permettant à l'auteur de l'ordonnance d'apprécier concrètement la quantité et la qualité des prestations ainsi que l'adéquation entre les moyens mis en oeuvre et le niveau de difficulté de la mission ; qu'en se bornant à soutenir que le montant des frais et honoraires liquidés par l'ordonnance du 25 septembre 2003 correspondait au devis soumis à M. X avant sa désignation en tant que sapiteur, la société ARCADIS ESG n'établit ni avoir accompli les quantités de prestations estimées antérieurement au déroulement de sa mission ni qu'elles n'excéderaient pas ce qui était strictement nécessaire à l'accomplissement de cette mission ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la tierce-opposition présentée par la société ARCADIS ESG doit être rejetée ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de M. X et de la société ISS Espaces Verts doivent être rejetées ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions tendant aux mêmes fins, présentées par la Sarl Willem Den Hengst ;

DECIDE :


Article 1er : L'ordonnance n° 0402045 du président de la 4ème chambre en date du 22 avril 2004 est annulée.
Article 2 : Le surplus des conclusions d'appel des parties et la demande présentée par la société ARCADIS ESG devant le Tribunal administratif de Grenoble sont rejetés.

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N° 04LY00558, N° 04LY00913


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 04LY00558
Date de la décision : 28/02/2008
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: M. BESLE
Avocat(s) : ZAIR

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-02-28;04ly00558 ?
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