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31/12/2007 | FRANCE | N°07LY00031

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 5ème chambre, 31 décembre 2007, 07LY00031


Vu, I, sous le numéro 07LY00031, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 janvier 2007, présenté par le PREFET DE L'AIN ;

Le PREFET DE L'AIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0608016 en date du 28 décembre 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 8 décembre 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Gennady X ainsi que sa décision distincte du même jour désignant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Gennedy X devant le Tribunal administr...

Vu, I, sous le numéro 07LY00031, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 janvier 2007, présenté par le PREFET DE L'AIN ;

Le PREFET DE L'AIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0608016 en date du 28 décembre 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 8 décembre 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Gennady X ainsi que sa décision distincte du même jour désignant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Gennedy X devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2007 :

- le rapport de M. Bernault, président ;

- les observations de Me Guerault, pour M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les deux recours du PREFET DE L'AIN présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X, se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 2 novembre 2006, de la décision du PREFET DE L'AIN du 31 octobre 2006 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 8 décembre 2006, ils étaient dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que pour annuler les arrêtés en date du 8 décembre 2006 par lesquels le PREFET DE L'AIN a ordonné la reconduite à la frontière de M. et Mme X ainsi que les décisions distinctes du même jour fixant le pays de renvoi, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur ce que ces arrêtés et décisions étaient entachés d'une erreur de fait tenant à la nationalité des intéressés ; qu'il ressort toutefois des pièces des dossiers et notamment des passeports délivrés aux intéressés par les autorités de la Fédération de Russie, en 2002 et 2005, que M. et Mme X ont la nationalité russe ; que, dès lors, en mentionnant cette nationalité sur les arrêtés de reconduite à la frontière et les décisions fixant le pays de renvoi, le PREFET DE L'AIN n'a commis aucune erreur de fait ; que, par suite, le PREFET DE L'AIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, pour ce motif, les mesures d'éloignement ainsi que les décisions fixant la Russie comme destination des reconduites ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X devant le Tribunal Administratif de Lyon ;



Sur la légalité des arrêtés de reconduite à la frontière :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que le PREFET DE L'AIN n'aurait pas procédé à un examen préalable de la situation personnelle des intéressés avant de prendre à leur encontre les arrêtés de reconduite à la frontière en litige, ni que ces décisions, qui énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent, seraient insuffisamment motivées ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales « « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme X sont entrés en France le 12 décembre 2005, accompagnés de leurs deux enfants mineurs ; qu'ils n'allèguent pas être dépourvus d'attaches familiales en Russie, où la cellule familiale a été créée et pourra se reconstituer et les enfants entamer ou poursuivre leur scolarité ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour des intéressés en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, les arrêtés contestés n'ont pas porté au droit de M. et Mme X au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ils n'ont ainsi méconnu, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité des décisions distinctes fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que le PREFET DE L'AIN n'aurait pas procédé à un examen préalable de la situation personnelle des intéressés avant de prendre à leur encontre les décisions désignant le pays de destination des reconduites à la frontière en litige, ni que ces décisions, qui énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent, seraient insuffisamment motivées ;




Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » et que ce dernier texte énonce que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que le PREFET DE L'AIN pouvait légalement décider de reconduire M. et Mme X à destination de la Russie, pays dont les intéressés ont la nationalité et où il ne ressort pas des pièces des dossiers, eu égard notamment aux contradictions qu'elles comportent entre le récit des circonstances de violences et persécutions alléguées et les copies de passeports produites, que leur vie ou leur liberté serait menacée ou qu'ils risqueraient d'être personnellement exposés à des traitements inhumains ou dégradants ; que, par suite, le moyen tiré de la violation, par les décisions désignant la Russie comme pays de destination des reconduites, des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'AIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé ses arrêtés du 8 décembre 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme X ainsi que ses décisions distinctes du même jour désignant la Russie comme pays de destination des reconduites ;



DECIDE :


Article 1er : Les jugements n° 0608016 et n° 0608017 du 28 décembre 2006 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon sont annulés.
Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Lyon sont rejetées.
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Nos 07LY00031…


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 07LY00031
Date de la décision : 31/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François BERNAULT
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : GUERAULT SEBASTIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-12-31;07ly00031 ?
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