Vu la requête, enregistrée le 21 février 2006, présentée pour Mme Charlotte X, domiciliée ..., M. Jonahtan X domicilié ..., M. et Mme Michaël X domiciliés ..., M. Frédéric Y domicilié ..., Mme Claire Y domiciliée ...), M. et Mme Roger Y domiciliés ..., par Me Guillini, avocat au barreau de Paris ;
Les requérants demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 03-5610 du 9 novembre 2005 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 2 août 2004 par le maire de Sainte-Foy-Tarentaise (Savoie) à la SARL Dunchester ;
2°) d'annuler le permis litigieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune et de la SARL Dunchester, le versement d'une somme de 500 euros à chacun des requérants ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2007 :
- le rapport de M. Fontbonne, président-assesseur ;
- les observations de Me Diot, avocat des requérants et de Me Fessler, avocat de la commune de Sainte-Foy-Tarentaise ;
- et les conclusions de M. Besson, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la société Dunchester :
Considérant que les requérants ont justifié être propriétaires de terrains contigüs au terrain d'assiette du projet ; qu'ils ont ainsi intérêt à agir ; que la fin de non-recevoir opposée par la société Dunchester doit être écartée ;
Sur la légalité du permis de construire litigieux :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : « Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. (…) » ;
Considérant que par la décision attaquée en date du 2 août 2004, le maire de Sainte-Foy-Tarentaise a accordé à la société Dunchester un permis de construire un ensemble immobilier comportant trois chalets sur la parcelle cadastrée 1959 située dans la ZAC de Bonconseil ; que cette parcelle présente en partie arrière un talus de très forte pente (60°) ; qu'au sommet de ce talus, en limite de propriété, sont déjà édifiées deux maisons d'habitation ; que le projet prévoit l'encastrement des chalets dans le talus sur une hauteur de 11 mètres impliquant de réaliser préalablement à la construction le déblai correspondant ;
Considérant que la société Sigsol spécialisée dans les études géotechniques mandatée par la société Dunchester, et les deux cabinets également spécialisés intervenus à la demande des requérants s'accordent pour estimer que la phase délicate se situe en cours de chantier lors de l'exécution de l'excavation et jusqu'à la mise en place de la construction nouvelle ; qu'ils s'accordent également pour estimer indispensable l'exécution sur la pente de travaux confortatifs lourds de type « paroi berlinoise » ; que les experts divergent sur l'efficacité de ces travaux confortatifs, la société Sigsol estimant qu'ils sont suffisants pour garantir la sécurité, la société Sage mandatée par les requérants n'excluant pas la survenance d'un effondrement brutal ;
Considérant que les requérants ont versé au dossier le rapport établi par un expert judiciaire désigné par le Tribunal de grande instance d'Albertville le 1er mars 2005 ; que cet expert estimant insuffisantes les appréciations tirées d'observations visuelles effectuées jusqu'ici, a fait procéder à des sondages mettant en évidence la présence de schistes fracturés alternant avec des couches argileuses confirmant l'intensité du risque de déstabilisation de la masse rocheuse ; que l'expert judiciaire, s'il conclut à la pertinence de la réalisation préalable d'une « paroi berlinoise », observe que le forage des pieux nécessite l'aménagement sur la pente d'une piste d'accès et d'une plate-forme et qualifie de préoccupante cette phase de terrassement préalable ; qu'il conclut sa mission en estimant que les dispositions envisagées ne garantissent pas la sécurité des habitations placées en amont ; que l'étude complémentaire effectuée en mai 2006 par la société Sigsol et versée au dossier le 24 avril 2007 par la société Dunchester ne répond pas aux craintes de l'expert judiciaire sur les modalités d'exécution de la « paroi berlinoise » ;
Considérant que le permis litigieux a été accordé au vu de l'étude de la société Sigsol du 7 avril 2004 et sous la condition que les prescriptions de cette étude soient strictement respectées ajoutant que les travaux de terrassement devraient être entrepris méthodiquement et avec une extrême prudence ; que l'autorité administrative peut régulièrement délivrer un permis de construire au vu d'une étude réalisée par le pétitionnaire dès lors qu'elle permet d'évaluer les risques liés à la réalisation du projet et qu'elle indique les conditions dans lesquelles ces risques pourront être maîtrisés ; qu'il ressort toutefois en l'espèce des éléments techniques de l'expertise judiciaire exposés ci-dessus que les risques liés à l'instabilité du terrain, s'ils étaient correctement évalués n'étaient pas entièrement maîtrisés ; que ces éléments, bien que réunis postérieurement, révèlent une situation existante à la date de délivrance du permis ; que les requérants sont par suite fondés à soutenir qu'en délivrant ledit permis le maire de Sainte-Foy-Tarentaise a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
Considérant, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun autre moyen n'apparaît en l'état de l'instruction sérieux et de nature à justifier également l'annulation du permis litigieux ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté leur demande ; qu'il y a lieu d'annuler l'article 2 du jugement attaqué et le permis de construire délivré le 2 avril 2004 par le maire à la société Dunchester ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les conclusions de la commune de Sainte-Foy-Tarentaise et de la société Dunchester ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'elles sont partie perdante ; qu'il y a lieu de mettre à la charge d'une part de la commune, d'autre part de la société Dunchester, le versement aux requérants d'une somme globale de 1 200 euros ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 2 du Tribunal administratif de Grenoble du 9 novembre 2005 est annulé.
Article 2 : Le permis de construire délivré le 2 août 2004 par le maire de Sainte-Foy-Tarentaise à la société Dunchester est annulé.
Article 3 : Sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la commune de Sainte-Foy-Tarentaise versera une somme globale de 1 200 euros aux requérants. La société Dunchester versera également une somme globale de 1 200 euros aux requérants.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Sainte-Foy-Tarentaise et de la société Dunchester tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 06LY00397