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04/10/2007 | FRANCE | N°06LY02122

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 04 octobre 2007, 06LY02122


Vu, I, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 octobre 2006, sous le n° 06LY02122, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604560 en date du 6 octobre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble, d'une part, a annulé son arrêté du 15 septembre 2006 par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de Mme X ainsi que sa décision distincte du même jour fixant le pays dont l'intéressée a la n

ationalité comme destination de la reconduite et, d'autre part, lui a enjoint de...

Vu, I, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 octobre 2006, sous le n° 06LY02122, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604560 en date du 6 octobre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble, d'une part, a annulé son arrêté du 15 septembre 2006 par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de Mme X ainsi que sa décision distincte du même jour fixant le pays dont l'intéressée a la nationalité comme destination de la reconduite et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme X et de se prononcer de nouveau sur sa situation dans le délai de deux mois ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le premier juge ;

3°) d'ordonner le remboursement de la somme de 400 euros versée par l'Etat à Mme X au titre des frais irrépétibles de première instance ;


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Vu, II, le recours enregistré le 20 octobre 2006 au greffe de la Cour sous le n° 06LY02125, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;
Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 0604560 en date du 6 octobre 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté en date du 15 septembre 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X ainsi que sa décision distincte du même jour désignant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à Mme X une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat la somme de 400 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2007 :

- le rapport de M. Chabanol, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;


Considérant que les recours susvisés du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE sont relatifs au même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que Mme X, ressortissante de Bosnie-Herzégovine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 28 juillet 2006, de la décision du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE du 25 juillet 2006 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 15 septembre 2006, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant en premier lieu qu'en recherchant si la décision attaquée ne portait pas, aux conditions d'existence de Mme X, une atteinte manifestement excessive, et ne procédait pas ainsi d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences, le premier juge s'est borné à exercer l'office qui incombe au juge de l'excès de pouvoir appelé à contrôler l'usage que les autorités administratives font de leur pouvoir d'appréciation des situations auxquelles elles répondent ; que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE n'est par suite pas fondé à soutenir qu'en opérant la recherche susmentionnée, le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit ;

Considérant en second lieu qu'il ressort des pièces des dossiers que Mme X est entrée sur le territoire français le 21 avril 2005, accompagnée de ses trois enfants mineurs, respectivement nés en 1992, 1996 et 1998 lesquels sont bien intégrés dans le milieu scolaire ; que le 3 mai 2006, elle a divorcé de son époux dont le comportement violent à son égard est attesté par les pièces versées aux dossiers et qui réside désormais en Bosnie-Herzégovine ; qu'elle souffre de troubles psychologiques qui l'ont conduite à être hospitalisée à plusieurs reprises, notamment les 13 et 14 septembre 2006, et présentait en particulier, à la date de la mesure d'éloignement, un comportement auto-agressif qui, compte-tenu des événements qui ont longtemps affecté la région où elle a vécu, en Bosnie-Herzégovine, et de la présence dans cette région de son ex-époux ne peut que s'exacerber ; que l'aîné de ses enfants souffre lui aussi de troubles psychologiques ; que, dans ces circonstances particulières, en estimant que le préfet avait, en ordonnant sa reconduite à la frontière, fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation de Mme X et de ses enfants, le tribunal administratif n'a pas fait une interprétation erronée des éléments du dossier ; que les conclusions tendant à l'annulation du jugement du 6 octobre 2006 ne peuvent par suite être accueillies ;

Sur les conclusions de Mme X tendant au prononcé d'une injonction :

Considérant que dans son article 2, le jugement attaqué a enjoint au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE de délivrer à Mme X une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative dans le délai de deux mois suivant la notification dudit jugement ; qu'ainsi, les conclusions de Mme X, présentées par la voie de l'appel incident, tendant à ce qu'une telle injonction soit prononcée sont dépourvues d'objet et, par suite, irrecevables ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; que l'Etat étant partie perdante en première instance, et alors qu'aucune considération d'équité n'y faisait obstacle, le premier juge n'a pas fait une inexacte application de cette disposition, qui n'a pas pour objet de sanctionner le comportement de la partie perdante, en mettant à sa charge une somme au titre des frais exposés par la requérante ;
Considérant que Mme X a obtenu en appel le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Lerein, avocate de Mme X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au profit de Me Lerein, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Sur le recours du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE tendant au sursis à exécution du jugement en date du 6 octobre 2006 :
Considérant que la Cour statuant au fond par le présent arrêt sur le recours n° 06LY02122, les conclusions du recours enregistré sous le n° 06LY02125 deviennent sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;

DECIDE :


Article 1er : Le recours du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE enregistré sous le n° 06LY02122 est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à Me Lerein, avocate de Mme X, la somme de 900 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel de Mme X est rejeté.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le recours n° 06LY02125 du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE.
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Nos 06LY02122, ...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY02122
Date de la décision : 04/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Daniel CHABANOL
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : CLEMENTINE FRANCES ET AUDREY LEREIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-10-04;06ly02122 ?
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