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04/10/2007 | FRANCE | N°06LY02121

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 04 octobre 2007, 06LY02121


Vu, I, sous le numéro 06LY02121, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 octobre 2006, présenté par le PREFET DE LA HAUTE- SAVOIE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604449 en date du 28 septembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 31 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Nizama Y épouse X ainsi que, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fix

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Vu, I, sous le numéro 06LY02121, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 octobre 2006, présenté par le PREFET DE LA HAUTE- SAVOIE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604449 en date du 28 septembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 31 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Nizama Y épouse X ainsi que, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite, lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme Nizama X dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Nizama X devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

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Vu, II, sous le numéro 06LY02126, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 octobre 2006, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 0604449 en date du 28 septembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté en date du 31 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Nazima Y épouse X ainsi que sa décision distincte du même jour fixant le pays de renvoi, lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme Nazima X dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2007 :

- le rapport de M. Chabanol, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les recours n° 06LY02121 et n° 06LY02126 sont relatifs au même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur le recours n° 06LY02121 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3º) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…). » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Nazima Y épouse X, ressortissante de Bosnie-Herzégovine, est entrée irrégulièrement sur le territoire national le 31 mars 2005 avec son époux et ses trois enfants ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision du 2 août 2005 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 11 avril 2006 ; qu'elle s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 29 juillet 2006, de la décision du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE du 25 juillet 2006 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 31 août 2006, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière pris par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE à l'encontre de Mme X, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a jugé que cette mesure méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au motif que, par un jugement en date du 20 septembre 2006, il avait annulé, pour vice de procédure entachant le refus de séjour servant de base légale à l'arrêté de reconduite à la frontière, la décision d'éloignement prise à l'encontre de l'époux de l'intéressée et enjoint au préfet de réexaminer la situation administrative de ce dernier ; qu'en prenant en considération la situation juridique née de cette annulation, laquelle avait une portée rétroactive, pour en déduire que la mesure frappant Mme X méconnaissait, à la date de son édiction, son droit à mener une vie familiale normale avec son mari, dont ledit jugement reconnaissait le droit à demeurer sur le territoire national, au moins à titre provisoire, le tribunal administratif n'a, contrairement à ce que soutient le préfet, commis aucune erreur de droit ; qu'il a d'autre part porté sur les effets de l'arrêté de reconduite contesté, au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une appréciation exempte d'erreur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 31 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X ainsi que, par voie de conséquence, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu de prescrire au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE de délivrer, sans délai, à Mme X une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant, en second lieu, que dans son article 2, le jugement attaqué du Tribunal administratif de Grenoble a enjoint au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE de réexaminer la situation de Mme X dans le délai d'un mois suivant la notification dudit jugement ; qu'ainsi les conclusions de Mme X tendant à ce qu'une telle injonction soit prononcée sont dépourvues d'objet et, par suite, irrecevables ;

Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que l'avocat de Mme X renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au profit de Me Lerein, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Sur le recours n° 06LY02126 :

Considérant que la Cour statuant au fond par le présent arrêt sur le recours n° 06LY02121, les conclusions du recours, enregistré sous le n° 06LY02126, tendant au sursis à exécution du jugement attaqué deviennent sans objet ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE enregistré sous le n° 06LY02121 est rejeté.
Article 2 : Il est enjoint au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE de délivrer, sans délai, à Mme X une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 900 euros à Me Lerein, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.
Article 5 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le recours n° 06LY02126 du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE.
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Nos 06LY02121, ...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY02121
Date de la décision : 04/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Daniel CHABANOL
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : CLEMENTINE FRANCES ET AUDREY LEREIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-10-04;06ly02121 ?
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