Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 29 août 2006, présenté par le PREFET DU PUY-DE-DÔME ;
Le PREFET DU PUY-DE-DÔME demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604778 en date du 8 août 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 4 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Abdellatif X ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Abdellatif X devant le Tribunal administratif de Lyon ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2007 :
- le rapport de M. Chabanol, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions du recours du PREFET DU PUY-DE-DÔME :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 3 mars 2004, de la décision du PREFET DU PUY-DE-DÔME du 1er mars 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 4 août 2006, il entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (…) » ; que l'article 371-2 du code civil dispose que : « Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, qui est né en 1973, est le père d'un enfant français né le 24 mai 2003 ; que bien qu'il soit divorcé de la mère de cet enfant, il s'est vu confier l'autorité parentale partielle sur son fils par jugement du Tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand en date du 21 juillet 2005, et a produit la copie de mandats postaux et de bordereaux de virements bancaires qu'il a adressés régulièrement à son ex-épouse pour l'entretien et l'éducation de son fils depuis le mois de mars 2004 ; que le PREFET DU PUY-DE-DÔME n'établit ni même n'allègue que le montant de ces versements ne serait pas en proportion des faibles ressources de M. X au sens de l'article 371-2 du code civil ; que la circonstance que par un jugement en date du 7 juillet 2005, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de renouvellement de son titre de séjour du 1er mars 2004 en qualité de conjoint de ressortissant français au motif qu'il n'établissait pas alors participer à l'éducation et à l'entretien de son enfant ne saurait faire obstacle à l'application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, M. X doit être regardé comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils depuis au moins deux ans à la date de la décision attaquée ; qu'ainsi, il remplissait les conditions posées à l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne pouvait faire l'objet d'une reconduite à la frontière ; que par suite, le PREFET DU PUY-DE-DÔME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 4 août 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;
Sur les conclusions incidentes aux fins d'injonction présentées par M. X :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. » ;
Considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au PREFET DU PUY-DE-DÔME de délivrer, sans délai, à M. X une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :
Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Borie et Associés, avocat de M. X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au profit de la SCP Borie et Associés, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du PREFET DU PUY-DE-DÔME est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint au PREFET DU PUY-DE-DÔME de délivrer, sans délai, à M. X une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la SCP Borie et Associés une somme de 900 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sous réserve que la SCP Borie et Associés renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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N° 06LY01840