La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2007 | FRANCE | N°06LY01545

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 22 mars 2007, 06LY01545


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 19 juillet 2006, présentée pour M. Ahmed X, domicilié ..., par Me Rodrigues, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604179 du 7 juillet 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2006 du préfet de la Drôme ordonnant sa reconduite à la frontière et prescrivant son maintien en rétention administrative et la dé

cision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°)...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 19 juillet 2006, présentée pour M. Ahmed X, domicilié ..., par Me Rodrigues, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604179 du 7 juillet 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2006 du préfet de la Drôme ordonnant sa reconduite à la frontière et prescrivant son maintien en rétention administrative et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de procéder à un réexamen de sa situation ;

4°) de condamner l'Etat à verser la somme de 900 euros à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2007 :

- le rapport de Mme Lorant, présidente ;

- les observations de Me Rodrigues, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;


Sur la légalité de la mesure de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité tunisienne, entré en France le 1er août 2005 s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la validité de son visa sans être titulaire d'un titre de séjour ni même en avoir sollicité ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet pouvait décider sa reconduite à la frontière ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant que dans le cadre de l'enquête diligentée par le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Valence pour vérifier la sincérité du projet de mariage de M. X avec une ressortissante française, l'intéressé et sa compagne se sont rendus le 5 juillet 2006 au commissariat de police de Nyons ; que M. X a alors été placé en rétention administrative et s'est vu notifier, le même jour, un arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de reconduire M. X à la frontière a été prise au moment même où les services préfectoraux ont été informés du projet de mariage de M. X ; qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, notamment à la précipitation avec laquelle l'administration a agi, alors même que l'intéressé disposait d'un titre de retour à la fin du mois de juillet vers la Tunisie, l'arrêté attaqué doit être regardé comme ayant eu pour motif déterminant de prévenir le mariage de ce dernier ; que par suite l'arrêté du 5 juillet 2006 du préfet de la Drôme ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et prescrivant son maintien en rétention administrative et par voie de conséquence la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite sont entachés d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions susmentionnées ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé. » et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. » ;
Considérant, qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Drôme de délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour à M. X, et de se prononcer, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sur la situation de celui-ci ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. X est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ; que ses conclusions tendant au versement d'une somme au bénéfice de son avocat, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle, doivent être regardées comme présentées par son avocat au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, l'Etat étant dans la présente instance la partie perdante, il y a lieu de faire droit à cette demande, sous réserve que Me Rodrigues, avocat de M. X, renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon, en date du 7 juillet 2006, ainsi que l'arrêté du 5 juillet 2006 du préfet de la Drôme ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et prescrivant son maintien en rétention administrative et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Drôme de délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour à M. X, et de se prononcer, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sur la situation de celui-ci.
Article 3 : L'état versera la somme de 900 euros à Me Rodrigues, avocat de M. X, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Rodrigues renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
1

2
N°06LY01545


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01545
Date de la décision : 22/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: M. D'HERVE
Avocat(s) : SANDRINE RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-03-22;06ly01545 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award