La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2007 | FRANCE | N°06LY01542

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 22 mars 2007, 06LY01542


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 19 juillet 2006, présenté pour le PREFET DU RHONE, par Me Schmitt, avocat au barreau de Lyon ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603925 du 29 juin 2006 en tant que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 14 juin 2006 fixant le pays de destination de la reconduite à la frontière dont M. Mustapha X a fait l'objet par arrêté du même jour ;

2°) de rejeter la demande

présentée devant le Tribunal administratif de Lyon par M. X ;

----------------...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 19 juillet 2006, présenté pour le PREFET DU RHONE, par Me Schmitt, avocat au barreau de Lyon ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603925 du 29 juin 2006 en tant que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 14 juin 2006 fixant le pays de destination de la reconduite à la frontière dont M. Mustapha X a fait l'objet par arrêté du même jour ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le Tribunal administratif de Lyon par M. X ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2007 :

- le rapport de Mme Lorant, présidente ;

- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;


Considérant que le PREFET DU RHONE a, par arrêté du 14 juin 2006, ordonné la reconduite à la frontière de M. X et par décision distincte du même jour fixé le pays dont l'intéressé a la nationalité comme destination ; qu'étant saisi par M. X de conclusions tendant à l'annulation tant de l'arrêté de reconduite à la frontière que de la décision fixant le pays de destination, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a, par l'article 2 du jugement attaqué, rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté susmentionné, et, par l'article 1er de ce jugement, annulé la décision fixant le pays de renvoi ; que le PREFET DU RHONE fait appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé cette annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 » et que ce dernier texte énonce que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. » ; que ces dispositions font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de prévenir un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que, si le PREFET DU RHONE, qui d'ailleurs n'est pas lié par l'appréciation de la commission des recours des réfugiés, soutient qu'aurait été transmis à la commission des recours des réfugiés, le jugement du 17 mars 2003 d'un tribunal turc condamnant M. X à une peine d'emprisonnement de trois années avec sursis d'un tiers en raison de son appartenance au HADEP et de ses activités politiques, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce jugement a été examiné par cette commission ; que M. X produit également une fiche d'information rédigée le 8 mai 2006 par le maire de la commune de Baris, document traduit le 1er juin 2006, attestant que M. X fait l'objet de recherches pour appartenir à une organisation illégale, et dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il a été examiné par la commission des recours des réfugiés qui a rendu sa décision le 3 novembre 2005 ; que le PREFET DU RHONE ne conteste sérieusement ni l'authenticité ni la valeur probante du jugement et du document susmentionné, ainsi que de la carte de membre du HADEP produite par M. X, qui viennent corroborer ses allégations selon lesquelles il serait exposé, en cas de retour en Turquie, à des risques sérieux en raison de son origine kurde et de ses activités politiques ; qu'à cet égard est sans influence la circonstance que sa famille vit toujours à Elbistan ; que, dans ces conditions, M. X doit être regardé comme établissant l'existence de circonstances faisant obstacle à sa reconduite à destination du pays dont il a la nationalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par l'article 1er du jugement du 29 juin 2006, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 14 juin 2006 fixant le pays de destination de la reconduite à la frontière dont M. X a fait l'objet, au motif que cette décision méconnaissait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. X est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ; que ses conclusions tendant au versement d'une somme au bénéfice de son avocat, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle, doivent être regardées comme présentées par son avocat au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, l'Etat étant dans la présente instance la partie perdante, il y a lieu de faire droit à cette demande, sous réserve que Me Couderc, avocat de M. X, renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : Le recours du PREFET DU RHONE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Couderc, avocat de M. X, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Couderc renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre l'aide juridictionnelle.
1

2
N°06LY01542


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01542
Date de la décision : 22/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: M. D'HERVE
Avocat(s) : DOMINIQUE SCHMITT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-03-22;06ly01542 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award