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22/03/2007 | FRANCE | N°06LY01304

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 22 mars 2007, 06LY01304


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 juin 2006, présenté par le PREFET DE LA COTE D'OR ;

Le PREFET DE LA COTE D'OR demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0601256 en date du 23 mai 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 10 mai 2006 fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite à la frontière prononcée, le même jour, à l'encontre de Mme Lamia X ;

2°) de rejeter les conclusions

de la demande présentée par Mme Lamia X devant le tribunal administratif, tendant ...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 20 juin 2006, présenté par le PREFET DE LA COTE D'OR ;

Le PREFET DE LA COTE D'OR demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0601256 en date du 23 mai 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 10 mai 2006 fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite à la frontière prononcée, le même jour, à l'encontre de Mme Lamia X ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par Mme Lamia X devant le tribunal administratif, tendant à l'annulation de cette décision ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2007 :

- le rapport de Mme Lorant, présidente ;

- les observations de Mme X ;

- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;


Considérant que le PREFET DE LA COTE D'OR relève appel de l'article 1er du jugement du 23 mai 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 10 mai 2006 désignant l'Algérie comme pays à destination duquel Mme X devait être reconduite ; que Mme X défère à la Cour, par la voie de l'appel incident, l'article 2 du même jugement par lequel il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 10 mai 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Sur l'appel incident de Mme X dirigé contre l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 22 juillet 2005, de la décision du PREFET DE LA COTE D'OR du 20 juillet 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 10 mai 2006, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, qui est entrée en France moins de trois ans avant la date de la mesure d'éloignement prise à son encontre, a ses attaches familiales en Algérie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans et où ses trois enfants mineurs peuvent l'accompagner, en cas de retour dans son pays d'origine ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et nonobstant la volonté d'intégration de Mme X, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que si Mme X soutient que la mesure d'éloignement prise à son encontre méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen tiré des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine est inopérant à l'encontre de l'arrêté de reconduite à la frontière qui ne fixe pas le pays de destination de la reconduite ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Sur l'appel principal du PREFET DE LA COTE D'OR dirigé contre la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant que pour annuler la décision prise par le PREFET DE LA COTE D'OR, le 10 mai 2006, fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite à la frontière ordonnée le même jour à l'encontre de Mme X, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a jugé que cette mesure d'éloignement était entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant aux risques encourus par Mme X et le plus jeune de ses trois enfants, en cas de retour en Algérie ; que Mme X soutient que cet enfant, qui est né en France le 28 mai 2004, soit le jour même du jugement du Tribunal d'Oran ayant prononcé son divorce, était un enfant adultérin et qu'elle avait quitté l'Algérie, sept mois avant sa naissance, afin d'échapper aux violences de son époux et de son frère ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce dernier a été condamné pénalement pour violences exercées envers sa propre épouse le 15 septembre 2004 et que tant son épouse que sa mère attestent qu'il a proféré des menaces à l'encontre de Mme X, sa soeur ; que si l'époux de Mme X a retrouvé cette dernière en France, quelques jours avant son accouchement, il n'est pas contesté qu'il a été reconduit à destination de l'Algérie quelques jours plus tard et que Mme X vit seule, avec ses trois enfants en France ; que si le dernier-né de ses enfants a été déclaré à l'état civil en France, par un membre du personnel de l'établissement hospitalier, au vu des documents d'identité de Mme X, comme étant l'enfant de son époux, il n'apparaît pas sur la fiche familiale d'état civil établie à Oran le 27 août 2006 ; que dans les circonstances particulières de l'espèce, en désignant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite, le PREFET DE LA COTE D'OR a apprécié de manière manifestement erronée les conséquences que cette décision pouvait avoir sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA COTE D'OR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 10 mai 2006 désignant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite à la frontière ordonnée le même jour à l'encontre de Mme X ;



DECIDE :


Article 1er : Le recours du PREFET DE LA COTE D'OR est rejeté.
Article 2 : L'appel incident de Mme X est rejeté.
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N° 06LY01304


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01304
Date de la décision : 22/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: M. D'HERVE
Avocat(s) : DOMINIQUE CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-03-22;06ly01304 ?
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