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08/02/2007 | FRANCE | N°06LY00609

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 5ème chambre, 08 février 2007, 06LY00609


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 23 mars 2006, présentée pour M. Khaled X, domicilié ..., par Me Bidault, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601283 du 10 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 7 mars 2006, décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la

reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pou...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 23 mars 2006, présentée pour M. Khaled X, domicilié ..., par Me Bidault, avocat au barreau de Lyon ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601283 du 10 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 7 mars 2006, décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) de faire application des articles L. 911-1 à L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat à verser la somme de 1 196 euros à son avocat, Me Bidault, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;


Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2007 :

- le rapport de M. Bernault, président ;

- les observations de Me Bidault, pour M. X, et de M. Guinet pour le Préfet du Rhône ;

- et les conclusions de M. Pourny, commissaire du gouvernement ;


Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...). » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité syrienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 10 octobre 2003, de la décision du préfet du Rhône en date du 6 octobre 2003 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a déposé à la mairie de Brignais un dossier en vue d'un mariage avec une ressortissante française ; que les bans ont été publiés le 22 février 2006 et la date de célébration fixée pour le 25 mars 2006 ; que, le 24 février 2006, le procureur de la République, a, en réponse à son courrier du 20 février 2006, précisé au maire qu'il ne s'opposait pas à la célébration dudit mariage ; que, le même jour, le maire a informé les services de la gendarmerie du projet de mariage du requérant et de ce que celui-ci serait en situation irrégulière ; que, le 6 mars 2006, le requérant a été convoqué par les services de la gendarmerie ; que, s'étant rendu à cette convocation le 7 mars 2006, M. X a été placé en garde en vue et a fait l'objet le même jour d'un arrêté de reconduite à la frontière et d'une mesure de placement en rétention administrative, que le requérant n'avait pas changé de département de résidence depuis l'invitation à quitter le territoire et le jugement du Tribunal administratif du 29 mars 2005 rejetant sa demande d'annulation du refus de titre de séjour susmentionné et qu'il ressort du procès-verbal de gendarmerie du 7 mars 2006, visé par l'arrêté attaqué, que le préfet du Rhône avait connaissance du projet de M. X et de la date prévue pour sa célébration ; que si le mariage a finalement pu être célébré, comme prévu, le 25 mars 2006, ce n'est que parce que le juge des libertés, estimant que l'intéressé présentait des garanties de représentation suffisantes, l'a assigné à résidence sans maintenir la rétention ; que la reconduite a finalement été exécutée le 26 mars suivant ; qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, notamment à la précipitation avec laquelle l'administration a agi, alors qu'elle avait connaissance de la situation irrégulière de M. X depuis octobre 2003, l'arrêté attaqué doit être regardé comme ayant pour motif déterminant la prévention du mariage du requérant ; que cet arrêté est, pour ce motif, entaché de détournement de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2006 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de destination de cette reconduite ;


Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que M. X demande à la Cour d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer son droit au séjour dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé.» et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. » ;

Considérant, qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée ;


Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet du Rhône de délivrer, sans délai, à M. X une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée : « (…) En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Si le juge fait droit à sa demande, l'avocat dispose d'un délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée pour recouvrer la somme qui lui a été allouée(…) » ;

Considérant que M. X n'est pas bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce que l'Etat verse une somme à son conseil, Me Bidault, sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 10 mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon, l'arrêté du préfet du Rhône du 7 mars 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et la décision du même jour fixant le pays de destination de cette reconduite, sont annulés.
Article 2 : Il est prescrit au préfet du Rhône de délivrer, sans délai, à M. X une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation administrative dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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N° 06LY00609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY00609
Date de la décision : 08/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GRABARSKY
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : BIDAULT FREDERIQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-02-08;06ly00609 ?
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