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12/10/2006 | FRANCE | N°02LY01978

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2eme chambre - formation a 5, 12 octobre 2006, 02LY01978


Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2002, présentée pour M. Bernard X, domicilié ..., par Me Grebot ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 012745 du 30 juillet 2002 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande de décharge des intérêts de retard qui ont été appliqués aux droits supplémentaires à la taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1998 et de la majoration pour mauvaise foi appliquée à ces mêmes droits ;

2°) à titre principal,

de prononcer la décharge des pénalités de 40 % et des intérêts de retard ; à titre subsidi...

Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2002, présentée pour M. Bernard X, domicilié ..., par Me Grebot ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 012745 du 30 juillet 2002 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande de décharge des intérêts de retard qui ont été appliqués aux droits supplémentaires à la taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1998 et de la majoration pour mauvaise foi appliquée à ces mêmes droits ;

2°) à titre principal, de prononcer la décharge des pénalités de 40 % et des intérêts de retard ; à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des pénalités de 40 % afférentes aux sommes dues en principal de 468 458 francs et de 729 775 francs, des intérêts de retard en tant qu'ils excèdent le taux de l'intérêt légal, enfin des intérêts de retard appliqués à la somme en principal de 468 458 francs en tant qu'ils sont calculés sur une période excédant trois mois ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2006 :

- le rapport de M. Puravet, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gimenez, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, qui exerce l'activité de négoce de caravanes neuves et d'occasion a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1998 ; que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande de décharge de la majoration pour mauvaise foi et des intérêts de retard qui ont été appliqués aux droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1998 ;

Considérant, en premier lieu, que, d'une part, aux termes du 1 de l'article 1729 du code général des impôts, « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit (…)», et, aux termes de l'article 1727 du même code, « Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions (…) Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0, 75 % par mois… » ; que, d'autre part, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (…) », et, aux termes de l'article 14 de la même convention, « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation » ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts proportionnent les pénalités selon les agissements commis par le contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de celui-ci ; que le juge de l'impôt, qui exerce son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit d'appliquer la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, sans pouvoir moduler celui-ci pour tenir compte de la gravité de la faute commise par le contribuable, soit de ne laisser à la charge de celui-ci que les intérêts de retard ; qu'ainsi, même en l'absence de possibilité de modulation, les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts et l'application de la majoration qui en découle ne sont pas contraires aux stipulations de l'article 6 de la convention précitée ;

Considérant que l'intérêt de retard vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction alors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'ainsi M. X ne saurait invoquer utilement ni l'article 6 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979, qui prévoit que les décisions qui infligent une sanction doivent être motivées ;

Considérant que M. X ne saurait faire valoir utilement que le retard dans le paiement des impôts a des conséquences différentes selon l'impôt dont il s'agit pour soutenir que l'application des intérêts de retard serait contraire aux stipulations de l'article 14 de la convention précitée ;

Considérant, en deuxième lieu, que, si M. X fait valoir qu'il avait déclaré et payé au titre de la taxe sur la valeur ajoutée collectée les sommes de 729 775 et 468 458 francs, il résulte de l'instruction que les déclarations et paiements invoqués n'ont été effectués qu'à titre de régularisation pour des périodes antérieures ; qu'ainsi ils ne pouvait être pris en compte pour compenser les insuffisances constatées ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la base sur laquelle sont assises les pénalités et intérêts de retard serait erronée en tant qu'elle comprend les sommes de 729 775 et 468 458 francs doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance qu'un contribuable ait réparé, avant tout contrôle fiscal, mais après expiration du délai de déclaration ou de versement une insuffisance de sa déclaration, ne suffit pas à faire obstacle à l'application de pénalités pour mauvaise foi ; qu'il résulte de l'instruction que M. X, en décembre 1998, a déclaré et payé des droits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 468 458 francs au titre de la période allant du 1er octobre 1997 au 30 septembre 1998 ; qu'alors que M. X a procédé tardivement à cette déclaration et ce paiement, l'administration, en faisant valoir que la taxe omise figurait au passif du bilan de l'entreprise et que des contrôles antérieurs avaient révélé des omissions de même nature, établit la mauvaise foi de l'intéressé ;

Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 1727 A du code général des impôts, « 1. L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 est calculé à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'impôt devait être acquitté jusqu'au dernier jour du mois du paiement (…) », et qu'aux termes du 2 de l'article 1729 du même code, dans sa rédaction alors applicable, le décompte de l'intérêt de retard est arrêté au dernier jour du mois de la notification de redressement ;

Considérant que, la notification de redressement étant intervenue le 9 juin 1999, l'administration, se fondant sur les dispositions précitées du 2 de l'article 1729 du code général des impôts l'administration, a calculé l'intérêt de retard afférent à la somme de 468 458 francs mentionnée ci-dessus jusqu'au 30 juin 1999 ;

Mais considérant que les dispositions du 2 de l'article 1729 du code général des impôts n'ont, dans le cas où le paiement des impositions par le contribuable est intervenu antérieurement à la notification de redressement, ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application de celles de l'article 1727 A en repoussant au dernier jour du mois de cette notification la fin de la période durant laquelle sont dus les intérêts de retard ; qu'il s'ensuit que, M. X ayant, ainsi qu'il a été dit plus haut, payé la somme de 468 458 francs en décembre 1998, les intérêts de retard sur cette somme doivent être arrêtés au 31 décembre 1998 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en tant qu'elle concernait les intérêts de retard de la somme de 468 458 francs pour la période postérieure au 31 décembre 1998 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les intérêts de retard portant sur la somme de 468 458 francs (71 415, 96 euros) sont arrêtés au 31 décembre 1998.

Article 2 : M. X est déchargé de la différence entre le montant des intérêts de retard portant sur la somme de 468 458 francs (71 415, 96 euros) auquel il a été assujetti et le montant résultant de l'application de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 30 juillet 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. X est rejeté.

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N° 02LY01978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2eme chambre - formation a 5
Numéro d'arrêt : 02LY01978
Date de la décision : 12/10/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Michel PURAVET
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : FIDAL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-10-12;02ly01978 ?
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