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13/04/2006 | FRANCE | N°05LY01940

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 13 avril 2006, 05LY01940


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 décembre 2005, présentée pour M. et Mme Nazmi et Luljeta X, élisant domicile ..., par Me Bidault, avocat au barreau de Lyon ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507551-0507552 en date du 10 novembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 22 septembre 2005 par lesquelles le préfet de l'Ain a ordonné leur placement en réten

tion administrative et a ainsi pris de nouvelles mesures d'éloignement à leur ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 12 décembre 2005, présentée pour M. et Mme Nazmi et Luljeta X, élisant domicile ..., par Me Bidault, avocat au barreau de Lyon ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507551-0507552 en date du 10 novembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 22 septembre 2005 par lesquelles le préfet de l'Ain a ordonné leur placement en rétention administrative et a ainsi pris de nouvelles mesures d'éloignement à leur encontre se substituant aux arrêtés de reconduite à la frontière du 28 juillet 2005 qui n'avaient jusqu'alors reçu aucune exécution ;

2°) d'annuler ces arrêtés pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer leur situation administrative dans un délai de trente jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2006 :

- le rapport de M. Grabarsky, président ;

- les observations de Me Guérault, avocat de M. et Mme X ;

- et les conclusions de Mme Verley-Cheynel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que lorsqu'un arrêté de reconduite à la frontière a été dépourvu de mesure d'exécution pendant une durée anormalement longue, caractérisée par un changement de circonstances de fait ou de droit, et que ce retard est exclusivement imputable à l'administration, l'exécution d'office d'une reconduite à la frontière doit être regardée comme fondée non sur l'arrêté initial, même si celui-ci est devenu définitif faute d'avoir été contesté dans les délais, mais sur un nouvel arrêté de reconduite à la frontière dont l'existence est révélée par la mise en oeuvre de l'exécution d'office elle-même et qui doit être regardé comme s'étant substitué à l'arrêté initial ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X ont fait l'objet d'arrêtés en date du 28 juillet 2005 par lesquels le préfet de l'Ain a ordonné leur reconduite à la frontière à destination de la Serbie-Monténégro ; que si ces arrêtés ont été dépourvus de mesure d'exécution jusqu'au 22 septembre 2005, date à laquelle le préfet de l'Ain a pris à leur encontre une décision de placement en rétention administrative à compter du 9 novembre 2005 en vue d'assurer l'exécution d'office de ces arrêtés, ce délai d'exécution n'a pas été anormalement long ; qu'en décidant le placement des intéressés dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, le préfet de l'Ain s'est, par suite, borné à mettre à exécution ses arrêtés du 28 juillet 2005 ; qu'aucune décision implicite n'étant révélée par la mise à exécution de ces arrêtés de reconduite à la frontière, M. et Mme X ne sont pas recevables à demander l'annulation d'une telle décision inexistante ;

Considérant toutefois que M. et Mme X doivent être regardés comme ayant demandé au magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés de reconduite à la frontière du préfet de l'Ain en date du 28 juillet 2005 ainsi que les décisions du 22 septembre 2005 les plaçant en rétention administrative ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l'Ain ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X, de nationalité serbo-monténégrine, se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 21 juin 2005, des décisions du préfet de l'Ain du 20 juin 2005 leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et les invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date des arrêtés attaqués, le 28 juillet 2005, ils étaient dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire.(…) » et qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi » ;

Considérant d'abord que si les requérants font valoir que Mme X souffre d'un syndrome anxio-dépressif qui nécessite un suivi médical auprès d'un psychiatre, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du certificat médical produit par les intéressés qui a été établi le 19 septembre 2005 que l'état de santé de Mme X aurait effectivement nécessité, à la date de la mesure d'éloignement prise à son encontre, une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'elle ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

Considérant ensuite que les époux X, qui sont entrés en France le 6 janvier 2003, font tous deux l'objet d'une mesure d'éloignement et que rien ne s'oppose à ce qu'ils repartent ensemble dans leur pays d'origine, Mme X ne remplissant pas, ainsi qu'il vient de l'être dit, les conditions fixées au 11° de l'article L. 313-11 et au 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour des requérants en France et nonobstant la promesse d'embauche dont bénéficierait M. X et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, les arrêtés contestés ne sont pas entachés d'une erreur manifeste d'appréciation et n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ils n'ont, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que la légalité d'une décision administrative s'apprécie à la date où elle a été prise ; que, dès lors, la nouvelle demande de titre de séjour qu'auraient présentée les époux X, postérieurement à la date des arrêtés de reconduite à la frontière du 28 juillet 2005, est, en tout état de cause, sans influence sur la légalité de ces arrêtés ;

Considérant que les requérants ne soulèvent aucun moyen à l'encontre des mesures de rétention administrative prises en tant que telles ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de M. et Mme X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer à M. et Mme X une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer leur situation administrative doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de M. et Mme X, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
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N° 05LY01940


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GRABARSKY
Rapporteur public ?: Mme VERLEY-CHEYNEL
Avocat(s) : BIDAULT FREDERIQUE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Date de la décision : 13/04/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05LY01940
Numéro NOR : CETATEXT000018308112 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-04-13;05ly01940 ?
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