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11/04/2006 | FRANCE | N°05LY01922

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 11 avril 2006, 05LY01922


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 9 décembre 2005, présentée pour Mme Abra X, domiciliée chez M. Rémy Vincent, ..., par Me Maïté Roche, avocat au barreau de Lyon ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507338 en date du 10 novembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 20 octobre 2005, par lequel le préfet de l'Ain a ordonné sa reconduite à

la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pa...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 9 décembre 2005, présentée pour Mme Abra X, domiciliée chez M. Rémy Vincent, ..., par Me Maïté Roche, avocat au barreau de Lyon ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0507338 en date du 10 novembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 20 octobre 2005, par lequel le préfet de l'Ain a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont elle a la nationalité comme destination de la reconduite ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2006 :

- le rapport de M. Grabarsky, président ;

- les observations de Me Roche, avocat de Mme X ;

- et les conclusions de Mme Verley-Cheynel, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité togolaise, a été interpellée le 20 octobre 2005 et n'a pu justifier être entrée régulièrement en France muni du visa exigé pour les ressortissants togolais ; qu'elle ne justifiait pas être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité et se trouvait ainsi dans le cas prévu au 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que si Mme X fait valoir qu'elle est bien intégrée en France où elle a noué des relations personnelles, notamment avec un ressortissant français chez lequel elle réside et dont elle s'occupe quotidiennement en raison des problèmes de santé qu'il rencontre, il ressort des pièces du dossier que Mme X, qui est entrée sur le territoire national en 2001 à l'âge de quarante-neuf ans et est dépourvue d'attaches familiales en France, n'établit pas que sa présence auprès du ressortissant français chez lequel elle réside depuis le mois de février 2005 serait indispensable à ce dernier ni qu'il ne pourrait bénéficier de l'aide d'une autre personne ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de la requérante en France ainsi que du caractère récent de la relation qu'elle invoque, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » et que ce dernier texte énonce que : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que si Mme X fait valoir qu'elle serait un membre actif du parti politique d'opposition « l'Union des forces de changement », que l'un de ses fils aurait été tué au cours d'émeutes, qu'elle serait encore aujourd'hui recherchée par les autorités de son pays que des opposants politiques quittent par crainte de mauvais traitements et que des créanciers auraient, en outre, porté plainte à son encontre, faute pour elle d'avoir pu honorer ses commandes ou dédommager ses clients, suite au saccage de son atelier de couture, à la destruction de son matériel et au vol de ses tissus, la requérante, qui n'a jamais effectué de démarches en vue de l'obtention du statut de réfugié, n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, la réalité des risques auxquels elle serait personnellement exposée en cas de retour au Togo ; que le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de Mme X, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Abra X, au préfet de l'Ain et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
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N° 05LY01922


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 05LY01922
Date de la décision : 11/04/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GRABARSKY
Rapporteur public ?: Mme VERLEY-CHEYNEL
Avocat(s) : ROCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-04-11;05ly01922 ?
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