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11/04/2006 | FRANCE | N°05LY01907

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 11 avril 2006, 05LY01907


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 décembre 2005, présentée pour M. Souaré X et Mme Aissata DIABY épouse X, élisant ..., par Me Clemang, avocat au barreau de Dijon ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502496-0502497 en date du 10 novembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à l'annulation, d'une part, des arrêtés du 3 novembre 2005, par lesquels le préfet de la Côte d'Or a ordonné le

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 décembre 2005, présentée pour M. Souaré X et Mme Aissata DIABY épouse X, élisant ..., par Me Clemang, avocat au barreau de Dijon ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502496-0502497 en date du 10 novembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à l'annulation, d'une part, des arrêtés du 3 novembre 2005, par lesquels le préfet de la Côte d'Or a ordonné leur reconduite à la frontière et, d'autre part, des décisions distinctes du même jour fixant le pays dont ils ont la nationalité comme destination des reconduites ;

2°) d'annuler les arrêtés et décisions susmentionnés pour excès de pouvoir ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2006 :

- le rapport de M. Grabarsky, président ;

- et les conclusions de Mme Verley-Cheynel, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X, de nationalité guinéenne, se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 26 septembre 2005, des décisions du préfet de la Côte d'Or du 21 septembre 2005 leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et les invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date des arrêtés attaqués, le 3 novembre 2005, ils étaient dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » et qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : « Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (…) des tribunaux, des autorités administratives (…), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que si M. et Mme X font valoir qu'ils vivent depuis cinq ans en France, pays où ils ont tissé des liens sociaux, où ils se sont rencontrés, où ils se sont mariés et où est né leur enfant qui est aujourd'hui scolarisé et qui serait confronté, en Guinée, à une situation politique et économique désastreuse et qu'une circulaire du ministre de l'intérieur demande aux préfets de suspendre les reconduites à la frontière des familles dont les enfants sont scolarisés en France, il ressort des pièces du dossier que les requérants font tous deux l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière et ne sont pas dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine ; que rien ne s'oppose à ce qu'ils emmènent avec eux leur enfant mineur âgé seulement de deux ans ; que la circonstance que cet enfant serait confronté à des conditions économiques et politiques plus difficiles dans ce pays ne suffit pas à établir que l'intérêt supérieur de l'enfant n'aurait pas été pris en compte et que les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant auraient été méconnues ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour des requérants en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, les arrêtés contestés n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ils n'ont, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » et que ce dernier texte énonce que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que si M. X fait valoir qui serait un militant du parti politique « Rassemblement du peuple de Guinée », qu'il aurait été victime de persécutions et de violences de la part des autorités de son pays et aurait fait l'objet d'un mandat d'arrêt pour motifs politiques, les pièces qu'il produit à l'appui de ses affirmations, dont certaines copies de documents et notamment celles de mandats d'arrêt et d'amener qui auraient été établis le 10 avril 2000 à l'encontre de M. X ne présentent aucune garantie d'authenticité, ne peuvent suffire à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour en Guinée ; que le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
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N° 05LY01907


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 05LY01907
Date de la décision : 11/04/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GRABARSKY
Rapporteur public ?: Mme VERLEY-CHEYNEL
Avocat(s) : CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-04-11;05ly01907 ?
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