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09/03/2006 | FRANCE | N°01LY00807

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5eme chmabre - formation a 5, 09 mars 2006, 01LY00807


Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2001, présentée pour M. François-Marc X, domicilié ..., par Me Weiss, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9605246-9904795 en date du 27 février 2001 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1994 et en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1995 ;

2°) de prononcer la réduction et la dé

charge demandées ;

Il soutient que le commissaire du gouvernement a, lors de l'audience du ...

Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2001, présentée pour M. François-Marc X, domicilié ..., par Me Weiss, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9605246-9904795 en date du 27 février 2001 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1994 et en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1995 ;

2°) de prononcer la réduction et la décharge demandées ;

Il soutient que le commissaire du gouvernement a, lors de l'audience du 6 février 2001, présenté des conclusions communes à son dossier et à celui d'un autre contribuable, qui concernaient, pour partie, une affaire différente et que cette présentation conjointe, qui n'a pas permis au tribunal administratif d'apprécier les spécificités et arguments particuliers contenus dans chacun des deux dossiers et au jugement de répondre à ces arguments, a méconnu les droits de la défense ; que le jugement attaqué, qui ne s'est pas expressément prononcé sur les moyens qu'il avait soulevés devant lui tirés de ce que, d'après la documentation fiscale « Francis Lefebvre » datée du 1er juin 1997, les dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts n'auraient pas remis en cause la qualification donnée par l'article 163 du même code au revenu exceptionnel par nature, de ce que la documentation « Lamy fiscal » de 1997 cite la distribution de réserves d'une société comme exemple de revenus exceptionnels, de ce que le bulletin fiscal de novembre 2000 des éditions « Francis Lefebvre » a relevé, s'agissant du jugement rendu par le Tribunal administratif de Dijon le 24 août 1999 dans une affaire Lenoir, que les sommes litigieuses avaient été prélevées sur un compte de réserves mais avaient été affectées audit compte au cours du même exercice et de ce que les sommes en litige, qui ont été placées en réserves et recueillies par son épouse dans des circonstances indépendantes de la volonté de cette dernière, actionnaire minoritaire, constituaient des revenus différés au sens de l'article 163-0 A du code général des impôts, serait entaché d'omissions à statuer ; que les sommes distribuées provenaient des résultats réalisés par la SA Société Financière La Ravarine plusieurs exercices auparavant ; que l'application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts aux revenus provenant d'une distribution de réserves conduit à une imposition similaire à celle qui aurait touché les mêmes revenus si les bénéfices placés en réserves avaient été distribués régulièrement au fur et à mesure des exercices bénéficiaires ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juin 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que le requérant n'établit pas que les premiers juges auraient méconnu le principe du contradictoire ; que les revenus en litige trouvent leur source dans l'activité habituelle de placements et de gestion de son portefeuille de la SA Société Financière La Ravarine et sont susceptibles de se renouveler ; que cette société a réalisé, depuis sa création, des bénéfices qui lui auraient permis de pratiquer une politique de distribution régulière de dividendes à ses actionnaires et était susceptible de procéder, chaque année, pour ce faire, à des prélèvements sur ses réserves ; qu'elle a effectivement procédé à de telles distributions en 1992, 1994 et 1995 ; que les liens familiaux étroits qui unissent les actionnaires de la société s'opposent à ce que les distributions décidées par l'assemblée générale des actionnaires présentent un caractère imprévisible ou inhabituel ; que les sommes litigieuses ne sauraient être regardées comme des revenus exceptionnels au sens des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts ; que le requérant ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative antérieure à l'abrogation de l'article L. 163 du code général des impôts ou des commentaires émanant de revues privées ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 septembre 2003, présenté pour M. X qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que le législateur a entendu, en abrogeant l'article 163 du code général des impôts et en créant l'article 163-0 A du même code, modifier le mode d'imposition des revenus exceptionnels mais non la nature de ces revenus et que les solutions retenues avant 1992 sont transposables aux nouvelles dispositions ; que l'application de l'article 163-0 A du code général des impôts ne lui procurerait aucun avantage fiscal injustifié ; que le refus de faire application de ces dispositions lui occasionne un surplus d'imposition ; que la mise en réserves de ses bénéfices a permis à la SA Société Financière La Ravarine de se développer et d'enrichir ses actionnaires, ce dont a bénéficié l'administration fiscale au travers de l'impôt ; que certains actionnaires de cette société ont déclaré des revenus exceptionnels qui n'ont pas été remis en cause par l'administration fiscale ; que la SA Société Financière La Ravarine n'a procédé, depuis les années en litige, à aucune autre distribution de réserves ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui maintient ses conclusions tendant au rejet de la requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit au commissaire du gouvernement d'exposer à l'audience des conclusions conjointes sur des affaires présentant à juger des questions similaires et que l'examen du jugement attaqué permet de constater que les premiers juges se sont prononcés sur des moyens spécifiques soulevés par M. X ; que la définition des revenus exceptionnels donnée par l'article 163-0 A du code général des impôts est plus précise que celle résultant de l'ancien article 163 du même code ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 janvier 2004, présenté pour M. X, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre qu'il n'a pas eu connaissance du jugement rendu par le Tribunal administratif de Lyon sur la demande déposée devant lui par M. Le Tulle ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 mars 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Le ministre soutient en outre que le requérant ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la position qu'aurait prise l'administration fiscale à l'égard d'un autre contribuable ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 juin 2004, présenté pour M. X, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la circonstance que l'administration fiscale aurait adopté des positions différentes à l'égard des actionnaires de la SA Société Financière La Ravarine méconnaît le principe de l'équité fiscale entre les contribuables ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 février 2006 :

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Raisson, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SA Société Financière La Ravarine, qui a pour objet principal l'acquisition et la gestion de titres en portefeuille et de participations, la prise de participations, le placement de ses capitaux en actions, parts sociales, obligations, valeurs de toute nature et biens immobiliers, a distribué à ses actionnaires en 1994 et 1995 des dividendes prélevés sur le poste comptable « Autres réserves » ; que Mme X, épouse du requérant, qui détenait 352 des 2000 actions formant le capital social, a perçu à cette occasion un dividende de 528 000 francs assorti d'un avoir fiscal de 264 000 francs en 1994, qu'elle a déclaré selon le régime de droit commun des revenus de capitaux mobiliers ; qu'elle a perçu en 1995 un dividende de 1 320 000 francs assorti d'un avoir fiscal de 662 000 francs, qu'elle a porté dans sa déclaration de revenus dans le cadre « revenus exceptionnels » ; que, par réclamation datée du 17 avril 1996, M. et Mme X ont demandé que les dividendes perçus en 1994 soient également imposés en tant que revenus exceptionnels, réclamation qui a fait l'objet d'une décision de rejet le 15 octobre 1996 ; que, par notification de redressement datée du 30 octobre 1997, l'administration fiscale a par ailleurs remis en cause la qualification de revenus exceptionnels, et le régime d'imposition correspondant, que les contribuables avaient entendu donner aux dividendes perçus en 1995 et mis en recouvrement une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année en cause ; que M. X relève appel du jugement du 27 février 2001 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1994 et en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1995 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 163-0 A du code général des impôts : « Lorsqu'au cours d'une année un contribuable a réalisé un revenu qui par sa nature n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement et que le montant de ce revenu exceptionnel dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l'intéressé peut demander que l'impôt correspondant soit calculé en ajoutant le quart du revenu exceptionnel net à son revenu net global imposable et en multipliant par quatre la cotisation supplémentaire ainsi obtenue. La même faculté est accordée au contribuable qui, par suite de circonstances indépendantes de sa volonté, a eu, au cours d'une même année, la disposition de revenus correspondant, par la date normale de leur échéance, à une période de plusieurs années, même si leur montant n'excède pas la moyenne des revenus nets imposables des trois dernières années » ; que ces dispositions n'excluent pas que la distribution de dividendes provenant de bénéfices placés sur un compte de réserves puisse être regardée comme étant à l'origine d'un revenu exceptionnel pour les bénéficiaires des distributions ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Société Financière La Ravarine a constaté à la clôture de ses exercices 1989, 1991, 1992 et 1994 des résultats déficitaires ; que les résultats de ses exercices 1986, 1987, 1988 et 1993 ont dégagé un bénéfice moyen d'environ 580 000 francs, l'exercice clos le 31 juillet 1990 faisant apparaître un résultat bénéficiaire de 15 988 136 francs ; qu'à la date du 31 juillet 1987, date de clôture de son exercice 1987, la société avait affecté à son poste comptable « Autres réserves » la somme de 3 008 014 francs ; que l'évolution de ce poste comptable permet de constater que la somme de 3 643 855 francs y figurait au 31 juillet 1988 et au 31 juillet 1989 et que la somme de 11 958 401 francs y figurait au 31 juillet 1990 et au 31 juillet 1991 suite à la mise en réserve d'une fraction du bénéfice de 15 988 136 francs réalisé à la clôture de l'exercice 1990 ; que la somme de 10 958 401 francs figurait au même poste au 31 juillet 1992 et au 31 juillet 1993 et la somme de 7 941 771 francs au 31 juillet 1994 ; que la société a procédé à trois distributions successives de ses bénéfices mis en réserve pour un million de francs en 1992, trois millions de francs en 1994 et 7,5 millions de francs en 1995 ;

Considérant que les dividendes reçus par les actionnaires de la société à l'occasion de ces trois distributions intervenues sur une période de huit années et correspondant, pour une large part, à des sommes mises en réserve plusieurs années avant les distributions litigieuses, ne constituent pas pour les intéressés des revenus qui, par leur nature, seraient susceptibles d'être recueillis annuellement ; que le choix, qui a été celui de la société, de ne pas pratiquer une politique de distribution régulière de dividendes ne saurait priver ses actionnaires du bénéfice des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts ; qu'il n'est pas contesté par l'administration fiscale que le montant total de ces revenus exceptionnels perçus par le foyer fiscal de M. X en 1994 et 1995 dépassait la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce même foyer avait été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois années précédentes ; qu'ainsi c'est à tort que l'administration fiscale a refusé au contribuable le bénéfice des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les moyens relatifs à la régularité du jugement, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 27 février 2001 est annulé.

Article 2 : Les cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. X a été assujetti au titre des années 1994 et 1995 seront calculées par application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts.

Article 3 : M. X est déchargé de la différence entre les cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995 et celles résultant de l'article 2.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. François-Marc X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 16 février 2006 à laquelle siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

MM. Clot et Bédier, présidents-assesseurs,

M. Stillmunkes et Mlle Vinet, conseillers.

Lu en audience publique, le 9 mars 2006.

Le rapporteur,

J.L. BEDIER

Le président,

F. BERNAULT

Le greffier,

D. FORAY

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

Le greffier,

1

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N° 01LY00807

mch


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5eme chmabre - formation a 5
Numéro d'arrêt : 01LY00807
Date de la décision : 09/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : BOULIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-03-09;01ly00807 ?
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