Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 23 février 1999, la requête sommaire présentée par Mme Christelle X, domiciliée ..., représentée par Me BORE et XAVIER, avocats aux Conseil d'Etat et à la cour de cassation ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 97-3427 du 17 novembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 1997 par lequel le préfet de l'Ain a rejeté sa demande d'ouverture dérogatoire d'une officine de pharmacie à Arbent ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 27 juin 1997 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de prendre une nouvelle décision, dans le délai maximal de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous menace d'une astreinte de 1 500 francs par jour de retard ;
4°) de condamner la partie adverse aux entiers dépens ainsi qu'au versement d'une somme de 10 000 francs au titre des frais visés par l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Classement CNIJ : 55-03-04-01
Vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels publié par le décret n° 81-77 du 29 janvier 1981 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2004 :
- le rapport de M. Evrard, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Kolbert, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Les jugements et arrêts... contiennent les noms et conclusions des parties... ; que si l'expédition du jugement notifiée à Mme X ne mentionne pas dans ses visas le mémoire enregistré le 26 décembre 1997 et présenté pour la requérante, il résulte de la minute de ce jugement que ce mémoires a été précisément visé ; que par ailleurs, le tribunal a analysé l'ensemble des conclusions dont il était saisi et y a statué de manière expresse ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit en conséquence être écarté ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 27 juin 1997 :
Considérant qu'en application de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 571 du code de la santé publique, il peut être dérogé par décision préfectorale aux règles instituées par les précédents alinéas de ce même article si les besoins réels de la population résidente et de la population saisonnière l'exigent ; qu'aux termes du dernier alinéa du même article, dans sa rédaction issue de la loi du 18 janvier 1994 : Les besoins réels de la population résidente et de la population saisonnière... sont appréciés au regard, notamment, de l'importance de la population concernée, des conditions d'accès aux officines les plus proches et de la population que celles-ci resteraient appelées à desservir... ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la population de la commune d'Arbent (Ain) qui comptait 3 369 habitants au recensement de 1990, est regroupée autour de deux quartiers d'Arbent-centre et d'Arbent-Manchon distants d'environ deux kilomètres ; que le premier quartier, bénéficiant principalement de l'apport des populations des communes de Viry, Rogna et Choux, situées dans le département du Jura, comporte une officine, tandis que le second quartier, qui a été le premier bénéficiaire de l'augmentation de la population depuis le dernier recensement, est convenablement desservi par trois officines de l'agglomération d'Oyonnax en continuité de laquelle il se trouve ; que la demande de licence par voie dérogatoire formée par Mme X est relative à une implantation dans la galerie marchande d'un centre commercial situé à égale distance des deux quartiers précités, dans une zone industrielle, pratiquement dépourvue de toute population résidente ;
Considérant qu'il ressort de l'ensemble des éléments de fait produits au dossier par les parties au litige, que ni les besoins propres de la population habitant le quartier d'Arbent susceptible d'être desservi par l'officine de Mme X, quartier disposant d'une population résidente de faible importance, ni ceux de la population d'Arbent, même si on y ajoute la population saisonnière séjournant dans la commune et la population de trois communes voisines dépourvues d'officine, ne justifiaient la création d'une nouvelle pharmacie, alors que la commune comptait déjà une officine pour 3 369 habitants à la date de la décision attaquée ; qu'ainsi, et alors même que la population d'Arbent aurait augmenté depuis le recensement de 1990, le préfet de l'Ain a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article L. 571 du code de la santé publique en refusant à Mme X, par l'arrêté attaqué, l'autorisation de créer une officine de pharmacie à titre dérogatoire ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels : 1. Les Etats parties au présent pacte reconnaissent le droit au travail, qui comprend le droit qu'a toute personne d'obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce droit ; que ces stipulations, qui ne produisent pas d'effet direct dans l'ordre juridique interne, ne peuvent être utilement invoquées contre la décision refusant la création d'une officine de pharmacie ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1. de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. ; que les décisions de l'autorité administrative statuant sur les demandes de création ou de transfert d'officine de pharmacie sont susceptibles de porter atteinte à l'exercice du droit d'exercer la profession de pharmacien, lequel revêt le caractère d'un droit civil au sens des stipulations de l'article 6-1 ; qu'en statuant sur la demande de Mme X, le tribunal administratif, qui a apprécié tant les conditions projetées d'exercice de la profession de pharmacien que les besoins sanitaires réels des populations considérées, n'a pas méconnu les stipulations de la convention invoquée ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 juin 1997 par lequel le préfet de l'Ain a refusé l'autorisation d'ouverture, à titre dérogatoire, d'une officine de pharmacie à Arbent ;
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution, les conclusions de la requérante tendant à ce que la Cour délivre une injonction au préfet de l'Ain doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de Mme X est rejetée.
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N° 99LY00717