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16/10/2003 | FRANCE | N°01LY01452

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4eme chambre - formation a 3, 16 octobre 2003, 01LY01452


Vu, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 juillet 2001, présentée pour la SOCIETE DES AUTOROUTES PARIS RHIN-RHONE (SAPRR), par Me X..., avocat ;

La SAPRR demande à la Cour :

1') de réformer le jugement n° 000052 en date du 15 mai 2001 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a condamné l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant limité à 17 706 francs en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'occupation par des agriculteurs le 23 mars 1999 des postes de péage de Clermont- Barrière, sur l'autoroute A71

;

2') de condamner l'Etat à lui payer la somme de 31 765 francs assortie ...

Vu, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 juillet 2001, présentée pour la SOCIETE DES AUTOROUTES PARIS RHIN-RHONE (SAPRR), par Me X..., avocat ;

La SAPRR demande à la Cour :

1') de réformer le jugement n° 000052 en date du 15 mai 2001 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a condamné l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant limité à 17 706 francs en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'occupation par des agriculteurs le 23 mars 1999 des postes de péage de Clermont- Barrière, sur l'autoroute A71 ;

2') de condamner l'Etat à lui payer la somme de 31 765 francs assortie des intérêts à compter du 15 septembre 1999 et de leur capitalisation, ainsi qu'une somme de 3 000 francs au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de la route ;

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Classement CNIJ : 17-03-01-01-02

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Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2003 :

- le rapport de M. MOUTTE, président ;

- et les conclusions de Mme RICHER, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales reprenant l'article 92 de la loi susvisée du 7 janvier 1983 : 'L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens.' ;

Considérant que la SOCIETE DES AUTOROUTES PARIS RHIN RHONE (SAPRR) a demandé la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice qu'elle a subi du fait de l'occupation par des agriculteurs le 23 mars 1999, des postes de péage de Clermont-Barrière, sur l'autoroute A71 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a condamné l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant limité à la réparation du préjudice résultant de la dégradation de l'enrobé de la chaussée, soit 17 706 francs ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.7 du code de la route : 'Quiconque aura, en vue d'entraver ou de gêner la circulation, placé ou tenté de placer, sur une voie ouverte à la circulation publique, un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou qui aura employé ou tenté d'employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle, sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et d'une amende de 30 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement'. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si les manifestants ont empêché la perception du péage dû par les automobilistes, la circulation n° a pas été entravée ou gênée, dès lors que le passage des péages entraîne par lui-même un ralentissement, voire un arrêt des véhicules ; que les manifestants ont seulement mis à profit cette circonstance pour exprimer leurs doléances ; que de tels agissements ne peuvent, dès lors, être qualifiés de délit d'entrave ou de gêne à la circulation au sens des dispositions de l'article L.7 du code de la route ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 431-1 du code pénal : Le fait d'entraver, d'une manière concertée et à l'aide de menaces, l'exercice de la liberté d'expression, du travail, d'association, de réunion ou de manifestation est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende. Le fait d'entraver, de manière concertée et à l'aide de coups, violences, voies de fait, destructions ou dégradations au sens du présent code, l'exercice d'une des libertés visées à l'alinéa précédent est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende ;

Considérant que si les manifestants ont mis matériellement les préposés aux péages dans l'impossibilité de percevoir les redevances auprès des usagers de l'autoroute, il n'est pas établi qu'ils auraient porté atteinte au libre exercice du travail de ces préposés à l'aide de menaces, coups, violences ou voies de fait ; que, par suite, leurs agissements ne peuvent être regardés comme constitutifs du délit prévu à l'article 431-1 précité ;

Considérant, , en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 433-3 du code pénal : Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 F d'amende le fait d'user de menaces ou de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation pour obtenir d'une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public, soit qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat, soit qu'elle abuse de son autorité vraie ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou tout autre décision favorable ; que si des agriculteurs se sont attroupés autour des postes de péage pour empêcher la perception des redevances, il résulte de l'instruction, notamment d'un rapport de gendarmerie que la manifestation s'est déroulée sans incident ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, les agissements des manifestants ne sont pas constitutifs du délit prévu à l'article 433-3 précité ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 431-9 du code pénal : Est puni de six mois d'emprisonnement et de 50 000 F d'amende le fait : 1° D'avoir organisé une manifestation sur la voie publique n'ayant pas fait l'objet d'une déclaration préalable dans les conditions fixées par la loi... ; qu'aux termes de l'article 1er du décret-loi du 23 octobre 1935 portant réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de l'ordre public : les réunions sur la voie publique sont et demeurent interdites dans les conditions prévues par la loi du 30 juin 1881, article 6. Sont soumis à l'obligation d'une déclaration préalable tous cortèges, défilés et rassemblements de personnes , et, d'une façon générale, toutes manifestations sur la voie publique... ;

Considérant que, d'une part, le délit réprimé par ces dispositions ne peut être retenu qu'à l'encontre des seules personnes ayant participé à l'organisation de la manifestation non déclarée ou interdite, et non à l'encontre de l'ensemble de celles qui se sont seulement présentées au rassemblement ou qui forment l'attroupement ; que, d'autre part, l'organisation d'une manifestation irrégulière ne peut, en elle-même, être regardée comme constitutive d'un délit commis à force ouverte ou par violence contre des personnes ou des biens au sens de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'aucun des délits invoqués par la SAPRR n'étant susceptible en l'espèce d'être imputé aux manifestants ou d'avoir directement causé le préjudice réclamé au-delà de celui qu'a réparé le tribunal administratif, la SAPRR n°est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a condamné l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant limité à 17 706 francs et à demander que l'Etat soit tenu civilement responsable du préjudice commercial ayant résulté de la perte de péages ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SAPRR la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

ARTICLE 1er : La requête de la SOCIETE DES AUTOROUTES PARIS RHIN RHONE est rejetée.

N° 01LY01452 - 2 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01LY01452
Date de la décision : 16/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOUGUELET
Rapporteur ?: M. BESLE
Rapporteur public ?: Mme RICHER M
Avocat(s) : CARBONNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2003-10-16;01ly01452 ?
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