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24/06/2003 | FRANCE | N°01LY02119

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2eme chambre, 24 juin 2003, 01LY02119


Vu le recours présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, enregistré au greffe de la Cour le 28 septembre 2001 ;

Le ministre demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 9901004 du Tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2001 déchargeant M. Alphonse X de l'obligation de payer une somme de 821 722 francs, révélée par le commandement de payer émis le 7 octobre 1998 par le comptable du Trésor de Romans-sur-Isère,

2') de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif ;

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Vu les autres piè...

Vu le recours présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, enregistré au greffe de la Cour le 28 septembre 2001 ;

Le ministre demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 9901004 du Tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2001 déchargeant M. Alphonse X de l'obligation de payer une somme de 821 722 francs, révélée par le commandement de payer émis le 7 octobre 1998 par le comptable du Trésor de Romans-sur-Isère,

2') de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

CNIJ : 19-01-05-02-02

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 75-619 du 11 juillet 1975 relative au taux de l'intérêt légal ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu l'article 73 de la loi n° 80-30 du 18 janvier 1980 portant loi de finances pour 1980 ;

Vu l'article 10 de loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981 portant loi de finances rectificative pour 1981 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret n° 2001-373 du 27 avril 2001 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2003 :

- le rapport de M. GAILLETON, président ;

- et les conclusions de M. BONNET, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non recevoir opposée au recours par M. X :

Considérant qu'aucune disposition du code de justice administrative ou du livre des procédures fiscales, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit, ne subordonne la recevabilité de l'appel contre un jugement d'un tribunal administratif à l'exécution préalable de ce jugement ; que les recommandations que l'administration a adressées en ce sens à ses services ne constituent pas une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dont M. X serait en droit de se prévaloir sur ce fondement ; que celui-ci ne peut pas plus utilement invoquer ces recommandations sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983, dès lors que l'instruction qui les édicte, et qui rajoute ainsi à la loi ou au règlement, est entachée d'incompétence ; que, dès lors, la circonstance que l'administration n°aurait pas, en exécution du jugement attaqué déchargeant M. X de l'obligation de payer la somme de 821 722 francs, restitué à l'intéressé la partie de cette somme qu'il a payée, ne constitue pas, pour regrettable qu'elle soit, une cause d'irrecevabilité du recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie dirigé contre ce jugement ; que la fin de non recevoir opposée par M. X à ce recours ne peut, par suite, être accueillie ;

Sur le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales : Lorsque le tribunal administratif rejette totalement ou partiellement la demande d'un contribuable tendant à obtenir l'annulation ou la réduction d'une imposition établie en matière d'impôts directs à la suite d'un redressement ou d'une taxation d'office, les cotisations ou fractions de cotisations maintenues à la charge du contribuable et pour lesquelles celui-ci avait présenté une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires au taux de l'intérêt légal. Ces intérêts moratoires ne sont pas dus sur les cotisations ou fractions de cotisations d'impôts soumises à l'intérêt de retard visé à l'article 1731 du code général des impôts. - Ces dispositions sont également applicables en cas de désistement du contribuable auprès de la juridiction saisie. - Sur demande justifiée du contribuable, le montant des intérêts moratoires est réduit du montant des frais éventuellement engagés pour la constitution des garanties propres à assurer le recouvrement des impôts contestés. - Les intérêts courent du premier jour du treizième mois suivant celui de la date limite de paiement jusqu'au jour du paiement effectif des cotisations. Ils sont recouvrés dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que les impositions auxquelles ils s'appliquent ;

Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 209 en vertu desquelles les intérêts moratoires dus par un contribuable dont la demande en annulation ou en réduction d'une imposition a été rejetée par le tribunal administratif sont recouvrés dans les mêmes conditions, et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que les impositions auxquelles ils s'appliquent, ont seulement pour objet de fixer les formes et procédures à suivre dans l'exercice des poursuites contre les débiteurs, et non de rendre applicables aux intérêts moratoires les règles de fond régissant les créances de nature fiscale, notamment celle relative à la prescription quadriennale de l'action en recouvrement prévue par l'article L. 274 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en deuxième lieu, que les intérêts moratoires, s'ils sont assis sur les impositions mises en recouvrement, constituent toutefois des créances étrangères à l'impôt et au domaine ; qu'ils sont, dès lors, soumis, en l'absence de dispositions spéciales prévoyant une prescription plus courte pour cette catégorie de créances, à la prescription trentenaire de droit commun édictée par l'article 2262 du code civil ;

Considérant, enfin, que lorsque, comme en l'espèce, le contribuable a bénéficié du sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales et que l'action du service du recouvrement n'a pu, en conséquence, s'exercer avant la date de la notification au contribuable du jugement du Tribunal administratif rejetant sa demande, le délai de prescription susmentionné ne peut commencer à courir avant cette date ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un jugement qui lui a été notifié le 2 novembre 1991, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. X en décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981 et 1982, mises en recouvrement le 31 mars 1984 ; que par un commandement de payer du 7 octobre 1998, le comptable du Trésor de Romans-sur-Isère a liquidé le montant des intérêts moratoires dus en application de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales, et courant du 1er avril 1985 au 4 août 1996, et lui en a demandé le paiement, fixé à la somme de 821 722 francs ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le délai de prescription desdits intérêts n'était pas expiré à la date de ce commandement ; que, dès lors, c'est à tort que, pour décharger l'intéressé de l'obligation de payer les intérêts moratoires en litige, le Tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur le motif tiré de leur prescription ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. X tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour administrative d'appel ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le moyen tiré de ce que les intérêts moratoires auraient été appliqués aux pénalités d'assiette manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision par laquelle l'administration liquidant les intérêts dus, détermine le taux qui doit être appliqué, ne revêt pas le caractère d'une sanction et n'a pas, dès lors, à être motivée en application de la loi du 11 juillet 1975 susvisée ;

Considérant, enfin, que si M. X soutient que les dispositions de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales mettant les intérêts moratoires à la charge des contribuables ayant bénéficié d'un sursis de paiement seraient incompatibles avec les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'indique pas, en tout état de cause, les stipulations qui seraient ainsi méconnues et ne met pas, par suite, la Cour à même de se prononcer sur le bien-fondé de son moyen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. X de l'obligation de payer les intérêts moratoires en litige et à demander à la Cour de remettre à sa charge la somme de 821 722 francs ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2001 est annulé.

Article 2 : Les intérêts moratoires s'élevant à la somme de 821 722 francs, sont remis à la charge de M. Alphonse X.

N° 01LY02119 - 2 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 01LY02119
Date de la décision : 24/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. CHEVALIER
Rapporteur ?: M. GAILLETON
Rapporteur public ?: M. BONNET
Avocat(s) : BOINOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2003-06-24;01ly02119 ?
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